Le dauphin blanc

de Image de profil de Nicolas HaarmanNicolas Haarman

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Mes grand-parents ont acheté une maison dans le midi, plus précisément près de Bormes-les-mimosas, dans un domaine privé appelé le Gaou Bénat.

A cette époque je n’étais pas encore né. Je l’ai découverte bien plus tard dès ma naissance, car c’est l’endroit ou nous allions passer toutes nos vacances d’été.

L’endroit était idéal. Proche de la mer, complètement privatisé (gardiens avec guérite, épicerie fine, cabanon de location d’optimistes, cours de natation). J’ai d’ailleurs appris à nager avec le père d’un garçon qui allait par la suite devenir un de mes meilleurs amis.

La maison s’appelait le « dauphin blanc », elle se situait sur un flanc de colline, entourée de pins et d’arbres fruitiers. Le premier étage contenait deux chambres, un salon avec cheminée et une cuisine. Le Rez-de-chaussée était principalement voué à la vocation dortoir. Une grande pièce composée de cinq lits, une chambre « rouge » qui faisait écho à une chambre « verte » localisée au premier.

On les nommaient ainsi car elle étaient tapissées de papier peint avec une végétation dite jungle et une autre dite rouge.

A 7 ans après avoir passé une nuit dans la chambre « verte », s’est déclenché un cauchemar récurrent en moi qui allait durer une année. Un an à refaire le même cauchemar. A hurler dans mon sommeil, à faire réveiller les deux niveaux de la maison. Je suis encore aujourd’hui incapable de vous résumer ce cauchemar. Les rares fois où j’ai tenté de l’expliquer ce fut un échec car plus je mettais de mots sur cette expérience, plus l’on me prenait pour un fou. C’était des sensations d’oppression. Pas d’images gore, pas de cliché, juste une sensation de vitesse et d’oppression.

Alors on m’a bien évidemment fait voir des psychologues pour enfant, fait suivre une thérapie, mais rien n’y faisait. Le cauchemar revenait toutes les nuits. Usant la patience de mes proches.

Je précise que le cauchemar en question a débuté dans cette maison mais a continué à me suivre après nos vacances dans des endroits totalement différents de son origine.

Bond dans le temps. Des années ont passées et j’ai à peu près 10 ans. Nous continuons à revenir touts les étés dans cette maison, bien qu’à chaque fois je refuse de dormir dans la chambre verte. Je loge du coup avec mes frères dans la pièce dortoir.

Ma grand-mère avait un chien. Un teckel à poil longs, très hargneux et absolument antipathique. Il n’aimait pas du tout les enfants. Et surtout il était constement sur le qui-vive. Lorsque des invités, ou des voitures ou autres passaient à une centaine de mètres, il aboyait sans cesse comme si l’on envahissait son espace. Un petit roquet. Mais avec une ouïe et une capacité à la haine, chaque crissement de gravier un étage plus haut, chaque odeur suspecte détectée, il se mettait à aboyer en furie.

A 10 ans, nous avions entendu des histoires sur cette maison. Nos parents y étaient venu faire la java avec leurs amis. Et ma mère me raconta que lors d’une soirée, un bon ami à eux était descendu au Rez-de-chaussée pour y aller chercher une de ses affaires. Il y es remonté ensuite pâle comme un cadavre en disant : « J’ai vu! J’ai vu ! » avant de perdre conscience.

Encore aujourd’hui et après maintes interrogatoires, il ne veut pas en parler. J’ai essayé de lui poser la question bien des années plus tard mais rien n’y fait. Le regard se ferme et la limite est franchit.

Pour en revenir au roquet, un soir, nous étions touts réunis dans le salon. Pas de télé, chacun valait à ses occupations: lecture, jeu de cartes, mots-croisés. Bref avant internet. Il me faut préciser que la maison est faite en pierres du midi. Pas de bois donc.

Soudain nous entendons des craquements. Sonores, bien distincts. Réguliers. Dans les murs. Comme si l’on grattait la pierre. Le chien était au milieu du salon et ne faisait pas un bruit. Il avait les yeux grands ouverts, les oreilles couchées comme exprimant de la peur. Mais il n’aboyait pas. Il ne bougeait pas. Je crois que c’est là que je me suis rendu compte que cette maison n’était pas net.

Une année plus tard, mes grand parents ont fait venir des sourciers, des croiseurs de cheveux, pour tenter de conjurer ces craquements. Qui devenaient réguliers, Mais toujours le même jour: le dimanche. Finalement, au fur et à mesure le phénomène s’est éteint. Et le chien avec.

Re-bond dans le temps. J’ai 16ans. Je travaille dans l’épicerie du domaine à vendre des fruits et légumes.

Mes grands-parents s’absentent pendant un mois et je me retrouve seul à garder la maison. J’ai oublié de vous parler de la pièce la plus importante de la maison: La chambre indépendante. Située au bas des escaliers du premier étage avant de mener au rez-de-chaussée. Elle est individuelle et comporte une salle de bains avec douche et lavabo.

Une nuit, je suis réveillé par le bruit de la douche. Pas un mince filet d’eau non, une douche ouverte à fond. Je me lève, un peu embrouillé, il est 3 heures du matin. J’allume la salle de bains. La douche tourne à plein régime, le pommeau fixé. Il y a deux robinets: le rouge et le bleu que l’on tourne pour ouvrir ou dans un autre pour fermer l’arrivée d’eau. Je ne comprends pas comment il est possible que cela arrive. Prudemment je vais pour tourner les robinets dans le sens inverse pour arrêter l’eau. Ils sont fermés.

La douche crache de l’eau en puissance alors que les robinets sont fermés. Je décide de les ouvrir pour les refermer ensuite en me disant c’est un problème de tuyauterie.

Premier essai, rien ne fonctionne. Je jure et recommence. La douche s’arrête.

Je vais me recoucher. Et là après tant de thérapies et tant de temps, je refais le cauchemar que j’avais eu lorsque j’avais 7 ans dans cette chambre verte.

Mon coeur battant à tout rompre, je décide daller dormir sur un matelas de fortune devant l’épicerie de mon employeur. Et ce durant tout le reste de l’été.

Je ne suis jamais revenu dans cette maison par la suite, même en ayant eu l’occasion.

J’ai appris bien après que mes grands-parents l’avaient acheté pour une bouchée de pain. L’histoire retiendra que le fils du propriétaire qui leur avait vendu s’était donné la mort dans la maison. Ils l’on sut par la suite mais l’on caché. Le morts n’aiment pas être oubliés.

Je pourrais vous raconter d’autres anecdotes bizarres, sur mes expériences dans cette demeure, mais s’il y a une chose dont je suis convaincu, c’est que les endroits de vie réverbèrent les tragédies des vivants.

Et que si on est hypersensible comme moi. On les prend de pleine face.

Cette histoire est authentique.

Romancée, certes, mais les faits peuvent être corroborer par de nombreux témoins.

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Le dauphin blancChapitre2 messages | 5 ans

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