Partie IV et fin

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Newt retourna voir la psychologue à la fin du mois. Puis plusieurs fois au cours des semaines qui suivirent. Chaque jour l'amélioration était palpable, mais la femme n'y était que pour une faible part. Le plus important morceau, c'était son patient qui l'accomplissait. Il lui fallut des semaines entières pour mettre un terme à un alcoolisme bien ancré dans le quotidien, mais il y arriva.

Les premiers temps furent les plus durs. Il passait ses journées à ressasser le passé et à douter d'un possible futur. Ni l'alcool ni son travail ne lui étaient plus accessibles, et le vide était si difficile à combler qu'il crût plusieurs fois qu'il n'y parviendrait jamais.

Il ne détesta Aurore à aucun moment. Il avait réussi à se défaire de son emprise, après des mois d'acharnement, mais pas de l'amour qu'il éprouvait pour elle. Il ne réussissait pas à voir en elle le monstre que son entourage décrivait. Il était peut-être faible d'esprit de préférer se mentir que de s'avouer qu'elle avait empoisonné son existence, mais tout comme chaque vie est ponctuée par des choix, Newt avait fait le sien.

Il avait un nouveau but. Un but qu'il avait eu jadis, en tant que jeune homme à peine assis sur les bancs de l'université : il voulait sauver des vies. Avec le temps, ses motivations n'avaient en rien changé, mais elles étaient devenues son quotidien, le genre de choses qu'on exécute sans y porter une réelle attention, qu'on fait juste parce que c'est notre job. Parce que c'est comme ça.

Les vies humaines avaient fini par récupérer de la valeur à ses yeux. Il reprit du service à l'hôpital. Cela ne fut pas facile, évidemment, il lui fallut du temps pour récupérer toute la confiance qu'il avait perdue. Mais lorsqu'il eut l'occasion pour la première fois depuis son départ à lui et à elle de remettre les pieds dans une salle d'opération, ce fut l'accomplissement de sa vie.

D'une main sûre, la petite lame est guidée sur la peau.

Je suis plus déterminé que jamais. C'est la première fois que j'escalade cette foutue paroi aussi vite. Je suis très consciencieux : une chute pourrait être mortelle.

Le foie est retiré, l’œil du chirurgien ne cligne pas.

Un petit rai de lumière illumine le terrier. Je fronce les sourcils, prends quelques instants pour reprendre mon souffle. Les derniers mètres vont être les plus durs.

Le sang se déverse, un circuit externe est immédiatement mis en place.

Je reprends ma montée. Mes bras me tirent. Mes jambes me font atrocement souffrir. Je ne désire qu'une seule chose, tout lâcher. Mais je tiens bon, j'y suis presque.

Le foie neuf est mis en place, c'est le moment de vérité.

La lumière m'aveugle. Je sors une main du terrier, m'agrippe au bord. Je fournis les derniers efforts que mon corps détient en réserve pour me hisser à l'extérieur.

Tout fonctionne à merveille, le chirurgien referme le patient.

Je me laisse tomber à terre. J'ai réussi.

Trop heureux d'avoir pu faire son retour dans le corps médical, Newt quitta l'hôpital, la poitrine gonflée de fierté. La pluie n'entachait en rien son humeur splendide. Il se sentait revivre. S'autorisant enfin à regarder dans le futur, il en oublia le moment présent lorsqu'il traversa la route sans en vérifier la circulation. Lorsque les sirènes résonnèrent au loin, il était déjà trop tard.


Tout était trop beau pour être vrai.

FIN

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