Entretient

4 minutes de lecture

Lorsque j'ai parlé à maman de cette idée de travailler en ville elle sembla très enthousiaste. En vérité je pense que Georges est passé par là peu de temps avant moi.

Quelques jours plus tards il me montre une annonce dans le journal. On cherche en ville une bonne de maison.

- Tu pourrais peut être candidater? Qui sait, c'est peut-être le travail que tu cherche?

Je caresse l'annonce du bout des doigts et en quelques instants à peine ma décision est prise. Dès le lendemain ma mère me prête une de ses robes. Bien que passée de mode et quelque peu défraîchie on en attend guère plus d'une bonne. Georges m'accompagne en voiture jusqu'a la gare, sors mon vélo du coffre pour l'attacher à un arbre pour que je puisse rentrer plus rapidement à mon retour de la ville.

- Ca va aller Mady. Et tu sais quoi? Même si ils ne te prennent pas dans cette maison il y en aura beaucoup d'autres.

Il m'embrasse sur la joue lorsque le train arrive en gare.

Je me laisse bercer par les roulements du train. Quand mes pieds déscendent du wagon et que j'arrive en ville tout me semble si différent. Tout cela ne ressemble en rien à ce que je connais. Adieu les grandes étendues d'herbes folles au profit de maisons hautes, au revoir le calme et bienvenu les rue peuplées de monde. Même le sol est différent, la terre à été remplacée par des pavés et cela change du sol, tantôt boueux tantôt désséché, dont j'ai l'habitude. Après avoir tourné en rond pendant un bon moment et demandé de l'aide à des passants grincheux, je finis par trouver ladite maison. Heureusement on m'a avertie que mon entrée ne se ferait pas par la grande porte devant laquelle je me trouve. Cela me convient très bien car la porte elle même réussie à m'intimider. Je me rends compte que cela fait déjà quelques minutes que je suis sur le trottoir à regarder la porte et visiblement je ne suis pas la seule à m'en rendre compte.

- Vous venez pour le poste de bonne?

Je tourne la tête vers la voix provenant d'une petite porte quelques pas plus loin. Alors que pour acceder à la porte principale il faut gravir quelques marches, il faut pour celle ci, en déscendre une volée. Je hoche la tête sans dire un mot et la femme me fait signe de la tête pour que je la suive, ce que je fais docilement.

- Je préviens Madame Martin que vous êtes là.

J'attends donc seule dans l'office désert. J'entends, venant de quelques pièces plus loin, le tintement des casseroles puis des pas progresser dans le couloir. Débouchant dans l'office, une grande femme dont la robe grise semble la vieillir encore plus que son âge réel. La bouche pincée, elle me regarde de haut en bas comme si les capacitées à faire de moi une bonne convenable était écrite sur mes vêtements.

- Suivez-moi.

Je lui emboite le pas, me pressant pour ne pas me laisser distancer. Nous entrons toute deux dans un petit bureau sobrement meublé. Alors que je regarde autour de moi, avide de toute nouveauté, j'entends Madame Martin prendre place sur une chaise. Je me retourne et attends donc patiemment qu'elle m'invite à m'asseoire, chose qu'elle ne fit pas. Je reste donc debout en silence. Je ne sais pas trop ce qu'il se passe mais ce que je peux dire c'est que je déteste ça. Je la regarde, guettant un signe de sa part, mais j'ai la sensassion que cela risque de durer longtemps. Au moment ou je m'appretais à annoncer mon départ, agacée d'attendre de façon inutile, il semblerait que mon interlocutrice fort peu bavarde, décide de se manifester.

- Avez-vous un courrier de vos anciens employeurs qui vous recommandent?

- Non Madame Martin, je n'ai encore jamais travaillée en dehors de la ferme familiale.

-Hum, vous n'avez pas vraiment l'accent des paysans.

Je ne savais pas que les paysans avaient un accent particuliers. Ou peut- être a-elle dit ça pour tenter de me rabaisser. Si c'est le cas elle risque fort d'être déçue, je n'ai nullement honte d'avoir travaillé de mes mains.

- C'est surement grâce à mes lectures assidue Madame.

- Sans doute. Vous commencerez demain et logerez ici-même, inutile de vous dire que vous devrez apporter vos affaires, seuls vos uniformes et un bloc de savon vous seront fournis. Si vôtre travail est jugé satisfaisant nous vous garderons, mais la famille Moreau est des plus exigeante. Vous aurez le droit à un dimanche après midi de repos une fois toute les trois semaines. Odette se chargera de vous, présentez vous à l'office à 5h demain matin.

Je reste debout, bêtement, Madame Martin déjà repartie à ses tâches. J'attends quelques secondes, regardant autour de moi, puis comprends que les mots de la gouvernante voulaient dire non seulement que je peux rentrer chez moi mais surtout que j'ai obtenue mon premier travail. Lorsque je sors de la maison des Moreau le soleil me semble encore plus éclatant que d'habitude! J'aimerais beaucoup flaner dans la ville mais il serait plus sage que je rentre chez moi pour préparer mon départ.

C'est une fois dans le train, sur le chemin du retour que je commence à avoir des doutes. Est-ce vraiment une bonne idée? Je n'avais pas pris conscicne de ce que ce travail aller impliquer. Je ne verrais ma famille qu'un après midi de temps à autres. Est-ce que c'est vraiment ça que je veux? Sur le trajet de la maison, pédalant sur mon vélo, j'ai soudainement envie de m'enfoncer dans le sol. Maintenant je sais que ce n'est pas une bonne idée. En fait c'est même une très mauvaise idée. Qu'est-ce qui m'a pris de faire ça?

Dès que je franchis le portail de la ferme Georges m'apperçois et se précipite vers moi, ses cheveux collés à son front par la sueur.

- Alors? Ne me fais pas attendre comme ça, tu l'as eu ou pas?

J'essaie d'afficher un sourire heureux qui semble le convaincre.

- Tu l'as eu... je suis tellement fier de toi! Viens il faut l'annoncer à maman!

Je me laisse entraîner vers la maison et je tente de toutes mes forces de faire taire cette petite voix en moi qui me hurle de faire marche arrière.

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