She isn't the right one

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7 mars, Cape Jervis, Australie, Océanie.

Felicia sortit de la voiture, une main en visière pour se protéger des rayons du soleil. C'était peut-être le mois de mars mais il faisait déjà vingt-deux degrés à l'ombre.

— Enfin du soleil ! s'enthousiasma Blake en chaussant son gigantesque chapeau et ses lunettes à verres sombres. Je commençais à en avoir marre de ses nuages et de cette affreuse pluie canadienne.

Elle poursuivit en soupirant :

— Ça fait du bien d'être de retour chez soi.

Hayden éteignit le moteur. Il était venu les chercher à l'aéroport d'Adélaïde pour les emmener à Cape Jervis, là où Blake avait grandi et où son père vivait encore. Issu du premier mariage de son paternel, il avait trois ans de plus que Blake. Grand, une barbe mangeant son menton, des yeux bleus comme le ciel, Felicia aurait pu lui trouver un certain charme si elle n'était pas aussi stressée à l'idée de passer son bac si loin de chez elle. Blake la saisit rapidement par le coude et l'entraîna vers la maison.

C'était une bâtisse comme on en voyait parfois peupler les bords de plage. Toute de bois vêtue, peinte en bleu écaillé, elle évoquait tout de suite une maison de vacances, celles où on se prélasse le ventre apparent, les tongs aux pieds. La porte s'ouvrit à la volée.

— Caleb ! s'écria Blake qui lâcha le bras de son amie pour sauter sur son frère.

Caleb n'avait que dix-huit mois de plus que Blake. Ils étaient vraiment très proches tous les deux.

Elle l'entoura de ses bras et ils s'enlacèrent. Enfin, il sembla se rendre compte de la présence de Felicia. Il la salua de la main, comme si c'était une vieille amie que sa sœur avait invitée pour une soirée pyjama alors que c'était la première fois qu'ils se rencontraient en vrai.

Ils se séparèrent et Blake reprit la main de son amie pour l'entraîner dans la maison. Elle la lui fit visiter de fond en comble, sans oublier, ni la cave, ni le grenier. Puis, elle la mena dans la chambre qu'elles partageraient. C'était celle où Blake avait grandi. Ses affaires de petite fille étaient toujours en place, comme si elle les avait quittées le matin même pour se rendre à l'école. Mais la poussière qui couvrait les meubles avouait la vérité : personne ne mettait les pieds dans cette pièce en l'absence de son occupante.

La chambre était idéalement située. Ou du moins, du point de vue de Blake. Si la jeune fille adorait se prélasser sur la plage et savourer le soleil sur sa peau, ce n'était pas le cas de Felicia. Enfin, si. Ça aurait pu l'être si elle n'avait pas été en période d'examen. Rien de pire pour la stresser.

L'invitée déposa sa valise au sol et entreprit de l'ouvrir pour vider ses affaires.

— Laisse, Felicia. On s'en occupera plus tard. D'abord, il faut que je te montre la plage et la...

Bien que ce soit ordinairement opposé à sa façon de réagir, Felicia la coupa en plein milieu de sa phrase.

— Blake. Je suis crevée. Est-ce que je peux au moins ordonner mes affaires avant que je ne m'écroule de sommeil ? Je passe le BAC demain.

Blake ouvrit la bouche de surprise.

— Oui, bien sûr. Ton armoire est là.

Elle désigna la penderie du doigt en reculant de quelques pas. Avec un sourire gêné qui ne lui sied guère, elle ajouta :

— Si tu as besoin de quelque chose, dis moi.

Puis, face au silence de son amie, elle choisit de sortir de la pièce et de fermer doucement la porte.

À peine Blake eut-elle tourner la poignée derrière elle que Felicia se prit la tête entre les mains. Elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi elle avait réagi ainsi. Cela ne lui ressemblait pas du tout. C'était même totalement contraire à sa façon d'agir habituelle.

Elle défit sa valise, tria ses affaires dans l'armoire et s'assit sur un des lits. Elle n'avait aucune idée duquel était le sien alors elle se laissa tomber sur le premier venu, celui qui se trouvait aligné le long de la fenêtre.

Lorsque Blake revint, une dizaine de minutes plus tard, pour voir si tout allait bien, elle trouva son amie recroquevillée sur le dessus de lit, dormant paisiblement, la main refermée autour d'une de ses anciennes peluches qui prenaient la poussière.

Elle redescendit en essayant de ne pas faire craquer les vieilles marches sous son poids et croisa son frère dans la cuisine.

— J'ai invité Renee, ce soir, lui apprit Caleb.

Blake grogna. Elle n'aimait pas cette fille, et, chaque fois qu'on la questionnait sur le sujet, elle n'avait aucun mal à exposer ses arguments.

Premièrement, son nom état ridicule. Renee Charles. On aurait dit le nom du voisin de la grand-mère de Felicia – un vieux bonhomme qui aurait pu épouser sa bouteille d'alcool tant il passait de temps à lui embrasser le goulôt.

Ensuite, bien qu'elle soit la copine de son frère depuis un peu plus d'un an et qu'elle la respecte pour ça, elle était parfaitement superficielle. La quasi-totalité des discussions en sa compagnie tournaient autour de beauté, richesse & gloire. Si Blake était, en plus de faire partie d'un des girls band les plus suivis au monde, une actrice reconnue, elle n'était pas intéressée par d'aussi futiles sujets de conversation. Parfois, elle était frustrée que ce soit l'image que les gens percevaient chez elle, uniquement parce qu'il lui arrivait de jouer une écervelée au cinéma.

Non, décidément, elle n'aimait pas cette fille. Et ce depuis leur plus jeune âge. Car, en vivant dans un si petit village que Cape Jervis, il est rare de croiser des enfants. La preuve : il n'y eut que trois familles avec des petits qui vécurent dans ce petit village durant toute l'enfance de Blake.

Les premiers étaient eux, les Taylor. Son père était né à une trentaine de kilomètres et cet endroit l'avait toujours attiré. Lorsqu'il avait divorcé de sa première femme, il était venu s'y installer avec son tout petit Hayden. Depuis, cette maison avait accueilli deux nouveaux Taylor, Caleb, puis Blake qui avaient choisi de rester ici plutôt que de partir avec leur mère lors du divorce.

Le long de la plage, il y avait eu les Walsh. Ils n'avaient qu'une fille, Eden, d'un an plus jeune que Blake, mais elle avait été sa meilleure amie durant les deux ans où ils avaient vécu à Cape Jervis. Partis en Nouvelle-Zélande l'année des onze ans de leur fille, Blake avait perdu tout contact avec les Walsh si ce n'était une carte de vœux qu'elle recevait signée de la main d'Eden, tous les ans.

Les tous derniers à être arrivés dans le paysage étaient les Charles. La famille, composée de cinq filles dont Renee était l'avant-dernière, et de leur mère, logeait à trois maisons d'écart des Taylor. Il s'étaient installés un an après le déménagement d'Eden, et Blake avait espéré se trouver une amie parmi ce groupuscule exclusivement féminin. Mais ses attentes avaient été rapidement revues à la baisse. Martina, l'aînée, était enceinte jusqu'au nez, d'un ancien dealer en cavale en Asie du sud-est. Nicole et Simone se firent choper en vol à l'étalage et Renee commença à devenir la pire garce que Cape Jervis eu connu. Quand à Marie Lyn, la petite dernière, nul ne l'avait jamais aperçue sans son immense chien qui aboyait toujours comme si le diable en personne se tenait devant lui. Les habitants de Cape Jervis les fuyaient comme s'ils étaient une famille de pestiférée. Jusqu'à ce que le frère de Blake sorte avec l'une d'elle.

Cela avait choqué tout le monde, au début, mais Hayden et Renee formaient un couple si heureux et fusionnel que chacun oublia vite qu'elle appartenait aux Charles. Car oui, avant de sortir avec Caleb, Renee s'est d'abord entichée de Hayden, l'aîné. Et ça ne c'est pas très bien terminé.

Puis, cinq mois après sa rupture avec l'aîné, Renee avait commencé à fréquenter le cadet. Ni Hayden, ni Blake, ne voyaient cette union d'un bon œil, mais tant que leur frère paraissait heureux, ils ne pouvaient s'y opposer. Ce n'était pas comme s'il s'étaient fiancés. Ou du moins, ils espéraient secrètement tous les deux que cette histoire n'arriverait jamais jusque là.

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