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Vous voici dans le couloir de la mort. Encadré de gardes aux mines lugubres, vous cheminez vers votre fin. La chaise où on vous pose, à défaut d'être électrique, est très inconfortable. Le couloir n'est qu'une allée débordante de livres et les gardes ne sont qu'une poignée d’intellos dégingandés. On pourrait aisément croire que ce n'est pas si grave. Détrompez-vous !

Votre avenir de docteur est compromis. Être thésard, c'est un peu comme tenter de devenir miss Amérique. C'est plus une affaire de ”public relation“ ou d’habilité à coller un sourire sur votre face, qu'une question de mérite ou de talent.

Or, votre réputation est en jeu. On va vous accuser. On va vous lorgner d'un air méprisant, vous voir comme un collabo stalinien... Oh mais non, vous rappelez-vous, personne n'est au courant de vos nouvelles fréquentations ; tous les témoins potentiels avaient leurs nez écrasés dans leurs bouquins ! Ouf ! Hormis sur votre dodo inopiné, nul ne pourra vous attaquer.

Rappelez-vous, la loi ! La présomption d'innocence ! Sans preuves, ils peuvent toujours courir !

— Que faisiez-vous à la bibliothèque ? interroge la bibliothécaire, jouant l'accusation.

— Je faisais des recherches sur la littérature européenne durant la période des croisades. Ces guerres saintes auraient-elles influencé les œuvres de leur temps ? Et inversement, les gestes et mystères auraient-ils eut une influence sur les croisades ? proclamez-vous, en faisant un teasing du tonnerre sur votre doctorat.

— Pffff, c'est évident, fit la bibliothécaire, méprisante, avant de reprendre. Pourquoi – et sans mentir – étiez-vous en train de dormir dans l'allée 77 ?

Là, contre toute attente, une idée fulgurante vient estomper votre défense organisée. Elle est si simple que ça en devient risible... Mais attention ! Retenez-vous ! Ne riez pas ! Parlez, sortez vos tripes !

— J’étais à la recherche... d'un livre... ululez, vous, misérable. Sur la troisième croisade, quand soudain, semblant crever l'espace, et venant de nulle part, surgit une femme en noir !

— En noir... souligna l'inquisitrice, l'air entendu.

— Oui ! (Heureusement, vous vous rappelez de la chemise et la jupe noire de Marika) Et elle tenait une énorme...

Une barre de fer ? Une épée ? Une fronde ? Une enclume ? Qu'est ce qui passera le mieux ? Ah, vous avez trouvé !

— ... Une encyclopédie... une énorme Encyclopaedia Universalis ! geignez-vous (quel acteur !). Et puis tout est devenu noir...

La juge jette sur vous un regard sombre.

— Bien... Je vous crois, tonne-t-elle, sentencieusement, avant de se tourner vers deux ahuris. Vous, là ! Allez chercher Mr Armitage et Mr Fernbern, ils doivent savoir que notre collection occultisme est menacée.

— Elle... n'a rien pris ? hasardez-vous, prudemment.

— Non, en me voyant, elle m'a réclamé le De Vermis Mysteriis, comme s'il était disponible à l'emprunt. Quand je lui ai dit de sortir... elle... elle...

Tout le monde se tourne alors vers la bibliothécaire, comme si elle se trouvait à présent sur les bancs des accusés. Curieux renversement de rôles.

— Elle... m'a menacé d'un briquet, vous vous rendez compte ? Une flamme, ici ! Et puis, elle m'a réclamé l'ouvrage ! Mais je ne l'ai pas, moi ! explosa-t-elle, soudain en larmes, perdant tout contrôle. C'est Alastair Beck qui l'a emporté pour l'étudier !

Elle s'effondre. Vous vous redressez.

Ce nom... Ce professeur... Maintenant ? Vous n'en revenez pas !

Vous savez où continuer votre enquête, vous savez où pêcher Marika. Elle se tient, telle une araignée, tapie au 69

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