La jeune femme s’enflammait. Elle était magnifique : brune, le teint halé et les yeux verts. Si j’avais aimé les femmes, son corps, sportif mais généreux, m’aurait sûrement fait voyager cette nuit. Son visage, paisible quelques secondes auparavant, s’était rembruni. Ses sourcils s’étaient froncés et elle serrait le poing, se retenant certainement de saisir l’épée qui pendait le long de sa jambe. Pendant ce temps, l’homme en face d’elle avait perdu de sa hauteur. En une phrase elle avait déchiré toute la confiance qu’il semblait avoir en lui.

Quelques secondes auparavant, ils avaient pourtant l’air complices, discutant paisiblement et marchant main dans la main. L’homme avait alors arrêté la jeune femme puis avait chuchoté au creux de son oreille. Certainement une maladresse, car la jeune femme s’était emportée d’un coup en le repoussant et lui hurlant dessus. Il rougissait à mesure que ses mots défilaient.

Un homme s’approcha d’eux, il les écoutait depuis un moment. Il désigna la ruelle dans laquelle nous nous trouvions et, avant qu’il ne puisse aligner deux mots en faveur de l’un ou l’autre, se fit empoigner le col par la femme. Elle lui avait glissé un poignard sous le cou. Le nouveau venu était livide. Le premier homme, de bonne carrure, posa la main sur l’épaule de la femme et lui glissa une seconde phrase à l’oreille. Un acte courageux, peut-être des excuses ? Elle libéra sa victime, le laissant s’effondrer sur les dalles de pierre qui jonchaient le sol. Je vis l’homme remuer ses lèvres envoutantes pour une dernière phrase. Il saisit la main de la femme, l’amena à sa suite jusqu’à disparaitre, quelques minutes après, au croisement d’une nouvelle ruelle.