Platitudes un peu moins venteuses (?)

2 minutes de lecture

Les troupeaux d'hommes fonctionnent ainsi : ils tournent en rond, ne regardent rien autour d'eux - chacun marche au rythme des autres. Surtout pas un faux pas, pas un écart.

Il arrive pourtant qu'un être dans la masse choisisse d'en sortir. Il change son rythme, prend une route différente, où il rencontre la douleur du choix, la force des fatalités... Si son courage devient une chance, il pourra le conduire vers des endroits splendides et des actions nobles. Mais s'il croule sous la douleur, il sera blessé, en colère, débordant d'une violence qui le noiera. La folie n'est pas loin, à ce stade. Ainsi naît le génie ou l'assassin, le fou, le généreux. Parfois les quatre en même temps. Et que peut-il y faire ? La vie désigne les moutons noirs au hasard pour pallier à son propre ennui.


Bernard est l'un de ces moutons là. L'une de ces brebis galeuses qui forment et déforment le piquant du quotidien. Bernard, englué dans sa douleur, n'a réussi à poursuivre son mouvement qu'en se parant de violence.

Ce qui l'a sorti du troupeau n'a que peu d'importance. Il a sûrement agi comme personne n'ose le faire ; marché un pas de plus dans l'une de ces directions qui les terrifient. Peut-être que ses parents l'y ont aidé. Peut-être que son frère l'y a poussé, un couteau dans le dos. « Avance où ce qui t'attend sera bien pire que l'inconnu ».

Bernard a choisi d'avancer. Il a rampé dans sa glue, à la recherche d'une issue. Il a pleuré, crié, hurlé. Il a cogné les bouches qui lui parlaient... Que disaient-elles ? Bernard ne s'en souvient pas. Il ne regarde plus en arrière. D'ailleurs, il voit à peine devant lui. Savoir comment c'est arrivé n'est pas important : le voilà en dehors du troupeau.


Et dehors, les exilés sont seuls. Ils cherchent la compagnie ; les autres galeux. Mais Bernard, lui, ne distingue plus rien au delà de lui-même. Immobile, il pleure sur son sort. Il attend qu'on vienne à lui. Alors, il frappe, il crie, il montre les dents. Il tue. Ses mains s'abattent, sourdes à sa volonté et à ses larmes qui glissent en silence sur ses joues. Le sang coule et lui brûle la peau comme de l'acide. C'est trop tard, après coup. Pleurer ne sert plus à rien. Il ne reste plus qu'à courir.


Un jour, la vie de Bernard finira. Toutes les vies se terminent ; la sienne sans doute plus tôt que les autres. Alors... une nouvelle brebis galeuse sortira du troupeau.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 5 versions.

Vous aimez lire Zosha ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0