Lettre à un fantôme.

2 minutes de lecture

Cher Alexis,

Ce matin je suis passée devant un homme, il était de profil. Sa mâchoire a percuté mes pupilles. Il possédait ta mâchoire. Ta si jolie mâchoire d'homme musclé, d'homme droit, d'homme neutre, d'homme parmi tant d'autres. Je dois bien te l'avouer aujourd'hui, ta mâchoire m'a toujours fascinée. Tu aimais tant ma bouche, tu ne désirais que l'embrasser, tu aimais tant ma main, tu la serrais contre ta paume et du bout de tes doigts tu effleurais mes bras plein de cicatrices à ce moment là et tu me murmurais que jamais tu n'avais vu plus belle fille que moi. J'aurais tant aimé te croire, mais je ne me suis jamais aimée. Te rappelles-tu de ce canapé rouge, de nos corps, serrés l'un contre l'autre, fuyants les infirmières de ce foutu hôpital entourés de « malades » que j'appelais communément par leur prénom, ils étaient humains, ils étaient comme nous. Un peu à l'écart de cette société, mais nous sommes ce que nous sommes. Je me faufilais dans la queue des médocs pour être derrière toi et pour sentir ton odeur contre moi. Et à 22 heures lorsque nous étions obligés de regagner nos chambres, et, qu'à cette époque-là, j'étais mineure, ils m'enfermaient à clé dans ma triste chambre, entre ces quatre murs bleus. Je pensais à toi. Toi, toi et ta belle gueule qui faisait craquer toutes les filles. Toi, et tes capacités intellectuelles au-dessus de la moyenne qui n'en rajoutaient que plus à ton charme. Toi et tes mains se baladant sur mon corps, désir interdit dans un hôpital meurtri. Sans se l'avouer, on s'aimait, sans se regarder, nos âmes s'étreignaient dans un assourdissant silence. Mes cils te cherchaient à longueur de temps, tes jambes courraient vers moi dès qu'elles m'apercevaient. Nous étions inséparables. Je me souviens de tout tu sais. De nos mots doux gravés sur cette fameuse table du fond, dans le patio. Des gitanes et des cigares que nous fumions en se moquant de « requin », tu te rappelles, celui qui m'avait collée contre le mur en m'ordonnant de lui donner une cigarette et sa fidèle accompagnatrice qui me faisait peur de par sa violence. Tu t'en souviens, dis ? Que tu m'avais promis de ne jamais me laisser ? Tu te souviens de cette glace que tu avais acheté et que j'avais fait tomber par terre par mon étroite maladresse ? Tu te souviens de notre balade interdite dans ta voiture ? Tu te souviens de tout ce dont on nous accusait ? On nous reprochait notre amour sain dans ce lieu si malsain.

Tout cela pour te dire que tu me manques, que ton ignorance perfore mon cœur et arrache mes artères de mon être si frêle.

Pourquoi m'ignores-tu ainsi ? On m'a dit que c'était par ce que tu m'aimais toujours et que tu n'avais pas supporté que mon cœur s'en aille pour en aimer d'autres. Mais notre amour interdit m'était monté à la tête, alors je me suis perdue dans d'autres chairs pour oublier ce désir irrationnel de ta peau contre la mienne.

J'espère qu'un jour tu reviendras.

Avec ma plus grande amitié et ma plus dévouée attention,

Léa.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Neptune ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0