80. Un détective amoureux reste compétent

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Angel

Me voilà de retour sur les lieux du crime et je m’assure qu’il n’y a pas de journaliste prêt à me tomber dessus avant de sortir de ma voiture. J’essaie de me repasser tout ce qu’il s’est passé depuis que je suis entré au service de Rafaela pour comprendre comment j’ai pu faire à ne rien trouver pendant tout ce temps. J’ai vraiment été si nul que ça ? Ou alors, j’étais si occupé à gérer mes sentiments que j’ai mis mon cerveau en pause, c’est pas possible autrement. Et à cause de ma bêtise, voilà que Rafaela a été enlevée ! Je m’en veux à un point où je suis prêt à m’exploser la tête contre la portière de ma voiture. Franchement, je ne mérite pas mieux.

Je commence mon observation en partant de la porte d’entrée et constate qu’en effet, avec la pénombre et vu où le fou était caché, elle n’a pas vraiment pu le voir avant de lui tomber dessus. A l’endroit où la caméra nous a indiqué qu’il l’attendait, j’examine les murs, le sol, mais ne trouve aucune trace, rien du tout. C’est désespérant. Ce gars ne fait donc jamais d’erreur ? Ce n’est pas possible d’être aussi pervers et aussi parfait dans le crime, quand même ?

Je continue à explorer les environs et essaie de trouver un indice sans rien voir qui sorte de l’ordinaire. A l’endroit où il l’a forcée à entrer dans la voiture, je ne trouve d’abord rien du tout, mais un peu plus loin, une touche bleue attire mon regard et je reconnais l’écharpe que portait Rafaela quand elle s’est fait attaquer. Je la ramasse et la passe autour de mon cou. Il y a encore un reste de son odeur et je ressens encore plus son absence. Où est-elle ? Qu’a-t-il fait d’elle ? Qui est-il ?

Je retourne au bureau sans être allé saluer Ellen. Je n’ai pas le courage d’affronter son regard accusateur et je préfère aller me replonger dans le dossier sur lequel a travaillé Morgan. A mon retour, elle est toujours plongée dans des recherches pour découvrir à qui peut bien appartenir le véhicule de l’agresseur de Rafie. Elle n’arrive pas à déterminer quel est le dernier acquéreur du pick-up tellement il semble avoir changé de propriétaire, ce qui est étrange en soi. A priori, quelqu’un s’est amusé à enregistrer des achats et ventes afin de brouiller les pistes. Vraiment très fort.

— Tu galères vraiment, là. Tu crois que tu vas aboutir à quelque chose ? Et tu peux me donner le dossier du fan pervers ? Je vais reprendre les choses depuis le début. Je n’ai rien trouvé sur place, à part cette écharpe, soupiré-je.

— Galérer est un terme bien faible… Vas-y, prends-le, et bon courage, grimace-t-elle en me tendant l’épaisse pochette. Je ne sais pas où on a merdé, mais c’est impossible que ce type soit un fantôme.

— Je vais regarder ça. Mais on a besoin de concret parce qu’à cette heure-ci, ils sont peut-être déjà très loin. Plus le temps passe, plus nos chances de les retrouver s’amenuisent… D’habitude, j’aime bien travailler sous pression, mais là… c’est juste horrible.

— Respire un bon coup et lance-toi… Il ne faut pas penser aux conséquences, là. Juste aux faits. Vous l’avez certainement croisé plusieurs fois. Il faut que tu épluches à nouveau les personnes de la séance de dédicaces, non ? Ben a fait plein de photos. Et j’ai contacté la boîte de production du talk show, ils doivent nous envoyer les images des caméras qui sont positionnées en direction du public.

— Très bien. Tu me les envoies dès que tu les as. Moi, je vais réfléchir.

J’observe le travail minutieux qu’a réalisé Morgan et me dis qu’elle a creusé sérieusement chaque piste, chaque possibilité, et je ne vois pas ce que je peux faire de plus. Ce qu’il y a de bien en me plongeant dans ce dossier, c’est que j’arrive à en oublier un peu ma belle brune pour me consacrer sur le dossier du fan. Je ne sais pas trop comment avancer, mais mon cerveau continue de travailler et je retrouve certains automatismes. Je commence à réorganiser un peu le dossier en classant les éléments non pas par événement mais par personne. Cela me permet d’en éliminer rapidement plusieurs en raison d’incohérences dans les disponibilités, les possibilités d’écrire les courriers. Je relis d’ailleurs les copies qu’elle a faites quand tout à coup, une idée me vient.

— Morgan, tu as une liste de toutes les équipes qui intervenaient au Canada ?

— Les équipes ? Heu… Oui, bien sûr, dossier bleu dans ton tiroir. Non, dossier rouge, pardon. J’en perds mon latin avec tout ça. Tu crois que ça pourrait être un membre du staff ?

— Oui, forcément. Vu les infos qu’il avait, il était là parmi nous. Et c’est de ça qu’on aurait dû partir. Tu as fait comme on procède d’habitude ? Une photo avec chaque dossier personnel ?

— Bien sûr. Ben m’a même donné un coup de main quand je ne trouvais pas d’infos sur les personnes. Il a répondu à ton message, au fait ?

— Non, je n’ai pas de nouvelles, mais ce n’est pas le plus important.

Je me saisis du dossier rouge et commence à l’éplucher. Je revois toutes les têtes de ceux qui nous ont accompagnés pendant le tournage, cela me rappelle plein de souvenirs et je constate que là aussi, Morgan a fait un excellent travail, même si elle a mis de côté cette liste bien trop vite. Quand je reçois la vidéo de l’émission, je me résigne à me la coltiner. Je n’ai pas beaucoup d’espoir, mais c’est aussi ça, la vie de détective. On suit des pistes, on explore des dossiers, on piétine, on n’avance pas jusqu’à ce que la lumière se fasse. Pas très glamour, tout ça.

Je lance la vidéo et vois les premières personnes arriver. Je soupire car je pense que cet exercice est inutile mais continue. Lorsque tout le monde est installé, je n’ai remarqué personne que je connaissais et je m’apprête à couper la vidéo quand un homme vient des coulisses et s’installe pas si loin que ça de moi qui semble complètement subjugué par la vision de Rafaela sur scène. Je repasse la scène et zoome sur son visage.

— Oh non, lui, je le connais, murmuré-je en ressortant le dossier rouge.

— Tu connais qui ? me demande Morgan en levant la tête de son ordinateur.

Je ne réponds pas et fouille fébrilement dans le dossier avant de sortir une feuille que je colle à côté de mon écran. C’est bien le même homme. La fiche indique qu’il s’agit de Franck Horwat, le technicien des lumières.

— Dans les histoires du pick-up, tu n’aurais pas un Franck Horwat ? Je crois qu’on a une piste, là.

— Attends, je regarde… Horwat, tu dis ? Ça me dit quelque chose, mais comme j’ai tout regardé à nouveau pendant ton absence… Ah oui ! Il est là, effectivement ! C’est qui ?

— Purée, j’y crois pas. Il était là, sous nos yeux ! Tout ce temps passé, et là en quelques heures, on le trouve enfin ! Mais pourquoi je n’ai pas fait ce travail plus tôt ? Je suis trop con.

— Attends, tu es sûr de toi ? me demande-t-elle en me rejoignant à mon bureau. Je veux dire… Comment on a pu rater ça, si c’était si simple ?

— Je crois qu’un détective amoureux ne fait pas un bon détective, Morgan. Essaie de trouver tout ce que tu peux sur ce salop. Je… J’allais appeler la police, mais je crois qu’il vaut mieux que je vois avec Ben ce qu’on va faire. Je te jure que s’il a touché à Rafaela, je vais le découper en tranches, ce pervers.

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