52. Un fantasme d'ado qui abuse

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Rafaela

J’ai du mal à le croire. Me voilà attablée dans un grand restaurant avec mon fantasme d’adolescente, après avoir passé la matinée nue contre lui… Me voici clairement draguée par cet homme que je rêvais de rencontrer au début de ma carrière, avec qui j’ai tourné et à qui j’ai donné la réplique dans l’un de mes premiers gros films. J’étais impressionnée, une vraie petite fan qui aurait pu dire Amen à tout ce qu’il me demandait. Patrick, un canon qui faisait fantasmer la plupart des femmes il y a dix ans, quinze, vingt… Et il est là, devant moi, clairement entreprenant. C’est un peu un rêve de jeune femme.

Je l’observe se resservir un verre de vin et m’offrir un sourire. L’acteur ? Le Don Juan ? J’ai l’impression d’avoir devant moi un homme d’ordinaire inaccessible m’ouvrir les portes de son palais… et de son lit, je n’en doute même plus vu ses regards et sa façon de me parler. Un vrai lover. Il ne s’en cache même pas, attrapant ma main quand il me parle, me lançant des allusions à peine dissimulées.

— Qu’est-ce que tu penses du film, alors ? C’est super intéressant de tourner avec Allan, en tout cas.

— Je n'ai accepté de tourner que parce que je savais que j'allais jouer avec toi. Tu sais que j'étais un peu en froid avec Allan ? Je ne le trouve pas assez audacieux dans ses scénarios. Mais vu comment tu illumines tout ce que tu joues, je savais qu'il fallait que j'accepte.

— Pas assez audacieux ? Peut-être, oui… En attendant, il est l’un des rares à accepter qu’on mette vraiment notre touche à l’histoire. Pourquoi vous étiez en froid ? lui demandé-je alors qu’il repose son verre et se penche davantage vers moi.

— Il m'a reproché de ne pas m'occuper assez de mes partenaires. De ne pas répondre à leurs besoins de se mettre en valeur alors que je pense que les bonnes actrices font ça naturellement. Comme tu le fais si bien d'ailleurs. Je peux t’assurer que maintenant que la scène de ce matin est passée, j'ai vraiment envie de m'occuper de toi. Je ne voudrais pas qu'Allan me fasse encore des reproches.

Merde… j’ai du mal à croire que le grand Patrick me fasse des avances. OK, ce n’est qu’un homme, mais il reste quand même le mec qui me faisait fantasmer dans son rôle d’agent secret il y a quelques années.

— On n’a pas toutes le même caractère, ça dépend des personnes et il faut s’adapter. Je peux te poser une question ? lui demandé-je en me penchant à mon tour dans sa direction.

— Bien sûr, répond-il en plongeant ses beaux yeux bleus dans les miens.

— Comment tu comptes t’occuper de moi, au juste ? souris-je.

Il ne se démonte pas le moins du monde et rapproche encore ses lèvres des miennes.

— Je vais te caresser sur chaque centimètre de ce corps magnifique que tu m'as fait découvrir ce matin, pour commencer. Puis, je te promets que mon objectif suivant sera de te faire jouir avec ma langue, mes lèvres et mes mains. Et enfin, je te laisse totalement maîtresse de la suite.

Wow… Bon sang, est-ce que c’est une bonne idée ? Il nous reste quelques semaines de tournage. Qu’est-ce qu’il cherche, au juste ? Et pourquoi je me pose cette question ? Pourquoi ne pas simplement profiter ?

— Je vois… C’est le discours télescopé que tu balances à toutes tes potentielles conquêtes ? ris-je.

— Non, du tout. Si tu savais le nombre de ces potentielles qui ne m'attirent pas du tout… alors qu'avec toi, c'est vraiment différent.

— J’imagine que tu n’as pas déjà vu tes potentielles à poil… et que tu ne leur as pas déjà joui dessus, gloussé-je alors qu’il n’affiche pas un soupçon de gêne, ne me lâchant pas du regard.

Il ne me répond pas tout de suite et son regard se porte sur ma bouche. J’ai du mal à croire qu’à tout moment il va se lancer et m’embrasser, moi. C’est juste inimaginable pour l’ado impressionnée qui fait sa réapparition dans mon cerveau. Pourtant, quand il approche encore et que ses lèvres caressent les miennes, l’ado se tait et savoure, tout simplement. On n’est pas sur un baiser de cinéma, là, il y a une vraie tension sexuelle, un réel plaisir, aucune obligation. Juste le plaisir de sentir sa langue chercher à s’insinuer dans ma bouche pour venir trouver la mienne. Patrick m’embrasse. C’est réel. Et il semble apprécier ça. Et moi ? Je crois bien que moi aussi, même si…

Je mets fin à ce baiser en reculant et détourne les yeux, mal à l’aise. Il va falloir que mon cerveau m’explique pourquoi Angel s’est insinué dans mon esprit et m’a poussée à stopper ce moment des plus agréables alors que le regard perçant de mon partenaire me scrute. Je lui souris, gênée, et bois quelques gorgées d’eau pour me redonner une contenance et réfléchir à ce qui vient de se passer.

— Eh bien, on n’a pas été suffisamment proches ce matin pour que tu recommences si vite ? plaisanté-je finalement, tentant de calmer un peu les choses.

— Ce matin, on jouait. Là, on vit. Tu viens prendre le dessert à la maison ?

Je prends le temps de réfléchir à sa proposition. Réellement. Est-ce que Rafaela, trente ans, a envie de coucher avec lui ? Ou est-ce que c’est l’ado qui fantasme toujours sur son acteur préféré qui le souhaite ? Parce qu’une partie de moi ne dirait pas non, c’est sûr. Mais… mais la femme que je suis aujourd’hui, à l’instant T, n’éprouve rien de particulier à l’idée de finir au lit avec lui. Oh, soyons honnêtes, Patrick est un acteur talentueux, un homme superbe et libre, aujourd’hui. Mais c’est aussi un mec qui se tape tout ce qui bouge depuis qu’il est séparé de sa femme, un tombeur en pleine crise de la quarantaine, ou de la cinquantaine, aucune idée, mais qui a besoin de se sentir encore beau et désirable. Et, méfiante comme je le suis depuis qu’on m’a clairement utilisée, je me demande s’il ne cherche pas simplement à faire du buzz. Une petite boulette devant les médias, ou une allusion qui va pousser les paparazzi à se renseigner, et le serveur qui nous observe passera vite à la casserole, avouant qu’il nous a vus nous embrasser. Ce sera un joli coup de pub pour le film que nous tournons actuellement, mais j’en ai marre de baser ma vie sur ce genre de choses. Après Tyler, j’ai décidé d’arrêter toutes ces choses malsaines. Oui, on peut rencontrer l’amour sur un plateau de tournage, pour preuve Brangélina, même s’ils sont aujourd’hui séparés. Mais non, je ne me vois pas faire autre chose que quelques parties de jambes en l’air avec Patrick, et encore.

Mon esprit revient inévitablement à Angel alors que mon partenaire termine son verre et s’en sert un nouveau. Pourquoi est-ce que j’ai l’impression de l’avoir trompé en embrassant Patrick ? C’est n’importe quoi… Coucher avec ce dernier serait pourtant un bon moyen d’oublier ma bourde avec mon assistant, de remettre de la distance entre nous, de… Bon sang, je n’ai pas non plus envie d’utiliser l’acteur pour oublier Angel. Je suis toute chamboulée par cette proposition et me dis que j’aurais sans doute mieux fait de ne pas accepter ce déjeuner.

— Heu… je te remercie pour la proposition, mais je vais la décliner, Patrick.

Il ne me répond pas tout de suite mais se lève pour aller régler l’addition au bar avant de venir me rejoindre à table. Il me tend la main pour m’aider à me relever et m’entraîne à sa suite vers la porte d’entrée. J’ai peur de l’avoir vexé mais au contraire, il revient à la charge alors que nous nous approchons de sa voiture.

— Tu es sûre que le dessert ne t’intéresse pas ? me demande-t-il en se collant contre moi qui suis coincée entre lui et la portière de son véhicule.

— Je te remercie pour la proposition, mais je crois que ça compliquerait trop le boulot entre nous, dis-je en tentant de m’extirper de sa prise alors qu’il attrape mes hanches pour m’immobiliser. Patrick, s’il te plaît… Je sors d’une rupture, en plus, je ne suis pas prête à me laisser aller avec un homme.

— Allez, ne te fais pas prier. J’ai bien vu comment tu me regardais, ce matin. Tu avais envie, il y a des signes qui ne trompent pas, tu sais. Ce soir, tu pourras vraiment en profiter, belle Rafaela, alors, n’hésite pas.

— Qu’est-ce que tu ne comprends pas quand je te dis non ? Il faut un non clair et précis ? Tu as un problème avec la langue ? m’agacé-je. S’il te plaît, Patrick, arrête, c’est gênant.

— Mais j’ai envie de toi, insiste-t-il en m’attrapant par les fesses pour m’embrasser.

Enfin m’embrasser est un bien grand mot vu comment mes lèvres sont fermées et comment j’essaie de m’éloigner de lui. Les conseils de mon père me reviennent en tête. Patrick est trop fort et trop imposant pour que je parvienne à le repousser comme il se doit, simplement avec ma poigne. Sauf qu’il se colle tellement contre moi que je peine à bouger, et il doit prendre ça pour autre chose qu’une envie de ma part de me barrer d’ici vu son entrain. Je suis bien obligée de faire avec les contraintes, mais je parviens à glisser mon genou entre ses jambes et le relève aussi brusquement que possible pour m’attaquer à son service trois pièces. Les conseils de mon paternel ne sont pas très efficaces, parce qu’il grogne un peu mais ne me relâche pas pour autant. Bon sang… Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire pour me sortir de là ? Peut-être que je ferais mieux d’accepter et de me barrer aussi vite que possible une fois qu’il s’est éloigné ? Bien sûr, je suis du genre à subir, moi.

Réfléchis, Rafie, réfléchis… Lui mordre la lèvre ? Je doute que ce soit très efficace. Lui pincer le flanc ? Nul. En revanche… Je glisse tant bien que mal ma main entre nous et chope son service trois pièces, non pas pour le plaisir, mais pour le serrer avec force. Bizarrement, quand on touche à ça, soit ça fait grogner de plaisir, soit le bruit est plus étouffé et les jurons sont plus désagréables. Patrick me relâche enfin et se plie en deux tandis que je recule vivement pour mettre de la distance entre nous.

— Je t’ai dit non, coño ! T’es sourd ou t’es stupide ? Hijo de… Dios mio, mais t’es malade ?
— Ah, j’aime quand tu me résistes ainsi ! C’est comme ça que tu veux le jouer, ce soir ? me demande-t-il en m'attrapant à nouveau par le bras pour éviter que je ne m’éloigne trop.

Je crois bien que c’est la première fois que j’aimerais qu’il y ait des paparazzi. Quoi que je ne suis même pas sûre qu’ils interviendraient. Ils préféreraient sans doute avoir de jolies photos d’un scandale en puissance. D’ailleurs, je sais que je dois rester discrète. Ne manquerait plus qu’on ait justement un scandale sur le dos pour le film à venir. Mais en même temps, je ne vais pas me laisser violer pour un film, non plus. Je savais qu’il buvait trop, à table, mais je ne pensais pas qu’il avait l’alcool aussi désagréable. Patrick n’a plus aucune retenue, et il me tire dans sa direction pour m’enlacer à nouveau, mais je ne me laisse pas faire et la colère doit me donner de la force, ou ses couilles douloureuses l’affaiblissent, parce que je parviens à m’extirper de ses bras et reste attentive au moindre de ses gestes sans pouvoir m’empêcher de l’invectiver rageusement.

— Ne m’approche plus, espèce de connard ! crié-je. Je te jure que si tu me touches encore je crie au viol !

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