Réponse à "La vérité sort de la bouche des enfants"

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Ce matin, je suis arrivée à l'école avec un pull tout neuf. Ma maîtresse que j'aime beaucoup m'a accueillie avec le sourire et m'a fait un très gentil compliment en me disant que j'étais très jolie avec mon pull. Je lui ai répondu que c'était ma maman qui me l'avait tricoté. Ma maîtresse porte le même nom de famille que moi, il faudra que je lui demande un jour si elle veut bien m'adopter. Un jour, elle a dit à ma maman qu'elle n'avait pas encore d'enfant et qu'elle aimerait bien avoir une petite fille aussi gentille et intelligente que moi. C'est pour cela que j'ai pensé à l'adoption. J'ai cinq ans et je connais déjà le sens du mot adopter.

Tous les enfants sont à peine assis à leur place qu'on entend des grands cris dans le couloir. Ma maîtresse pâlit et sort de la classe. Les cris augmentent de violence. Je sais qui pousse de tels cris. C'est la mère du fiancé de ma maîtresse qui est déjà venue plusieurs fois à l'école pendant la classe pour faire un scandale. Je me demande pourquoi elle en veut autant à ma maîtresse. Les hurlements ont cessé. Ma maîtresse rentre dans la classe puis soudain s'écroule par terre. Je la regarde terrifiée. Elle a le visage livide. On dirait qu'elle est morte. Nous les enfants, nous sommes paralysés. Personne n'ose bouger. Nous avons tous les yeux rivés sur le sol. Je ne sais pas combien de temps s'écoule avant qu'un adulte vienne nous prendre en charge. Il nous fait évacuer la classe en essayant de nous rassurer. Ce qui me traumatise encore plus, c'est qu'il nous fait passer au-dessus des jambes de la maîtresse. Je prends bien garde de ne pas marcher sur elle pour ne pas lui faire de mal. Il nous emmène dans l'école juste en face (il y a 2 groupes scolaires de maternelle) et nous répartit dans d'autres classes. Je me retrouve chez la directrice.

Le midi quand ma maman vient me chercher pour le repas, je lève les yeux vers la fenêtre de ma classe pour essayer d'apercevoir ma maîtresse. Je la vois. Elle est assise, elle regarde dehors. Elle m'a vue. Elle me fait un petit signe de la main. Je suis heureuse de voir qu'elle n'est pas morte. Je ne sais pas quand je vais la revoir. J'ai hâte de la retrouver.

La directrice, l'après-midi, nous fait asseoir tous en cercle et nous met une histoire avec son appareil à cassettes. C'est la chèvre de Monsieur Seguin. Je me mets à pleurer à gros sanglots en écoutant l'histoire au moment où Blanquette se retrouve seule dans la montagne et qu'il fait nuit. Je me sens comme Blanquette, seule face au danger. Le combat qu'elle mène jusqu'à la mort contre le loup m'arrache un flot de larmes que je n'arrive pas à faire cesser. Aucun enfant ne pleure. Je suis la seule à réagir de cette façon. La directrice ne vient même pas pour me consoler ni même m'expliquer que ce n'est qu'une histoire. 

Après l'histoire, c'est le moment de faire de la peinture. Je suis devant ma feuille blanche et j'ai mon pinceau dans la main droite que je tiens levée. Je suis paralysée et je ne parviens pas à tremper mon pinceau dans un pot de gouache. Mon esprit est ailleurs. Je suis toujours avec Blanquette, la téméraire, qui a perdu la vie pour avoir voulu gagner la liberté. Cette histoire m'a traumatisée. Je repense au malaise de ma maîtresse le matin. Je ne sais pas combien de temps va s'écouler, cela me paraît interminable, mais je vais rester la main en l'air sans jamais rien dessiner ni peindre. A la fin, je rends ma feuille toujours blanche.

C'est l'heure de la sortie. La classe à mon époque se termine à 17H30. Je suis assise sur un banc du préau et j'attends ma maman. Je me sens vidée et inerte. Je n'ai pas prononcé un mot de la journée à part le bref échange avec ma maîtresse le matin. Je regarde les enfants partir les uns après les autres. Je suis la dernière. Il ne reste plus que moi et ma maman n'est toujours pas là. Toutes les maîtresses sont parties. La directrice est dans son bureau. Elle a allumé la lumière mais dans le préau, il fait sombre, la nuit est tombée. Je suis assise toute seule et j'observe le ciel constellé d'étoiles lumineuses. Je suis toute seule comme Blanquette et je n'ai pas peur. Je voudrais rejoindre les étoiles qui scintillent tout là-haut. Je regarde la grande horloge. Je sais déjà lire l'heure. Je vois les aiguilles tourner et toujours personne n'est là pour moi. De temps en temps je guette ce que fait la directrice de l'école. Elle est en train de téléphoner mais je sais que ce n'est pas à mes parents car à la maison, on n'a pas le téléphone. La grande aiguille est maintenant sur le 12 et la petite aiguille sur le 7. Il fait vraiment très sombre dans le préau et la directrice ne vient jamais pour me parler ni pour me rassurer. Soudain, je vois mon papa qui arrive en courant. Il va s'excuser auprès de la directrice. Il me prend par la main. Je suis comme une poupée de chiffons. Je ne réclame même pas pour aller me réfugier dans ses bras. ça m'était bien égal qu'on ne vienne pas me chercher. Je voulais aller au ciel parmi les étoiles et rejoindre Blanquette. Mon papa me raconte qu'il était parti faire des courses pour acheter une chaise haute pour mon petit frère et qu'il croyait que c'était ma maman qui allait venir me rechercher à l'école mais ma maman était déjà partie l'attendre chez mes grands-parents et elle, elle croyait que c'était lui qui allait aller me récupérer à l'école. Bref, une histoire qui me donne mal à la tête. ça ne m'intéresse pas, je l'écoute à moitié. Je me sens tellement fatiguée. La journée a compté double pour moi. 

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En réponse au défi

La vérité sort de la bouche des enfants

Lancé par Laeti Tia

Les histoires sont trop peu souvent racontées par des enfants.

Pourtant, la voix d'un enfant peut apporter à un récit une touche de fraîcheur, une bonne dose d'innocence ou un accent de vérité.

Aussi, je vous propose de rédiger un texte dans lequel le narrateur sera un enfant, qu'il soit ou non le personnage principal.

Aucune exigence pour le thème abordé. Il peut aussi bien être léger ou drôle que grave ou triste, du moment que vous faites parler une petite tête blonde.

Alors, à vos crayons :)

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Un samedi bien noirChapitre0 message

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