Non-binarité
Camille devait se rendre à l’évidence, iel était tombé amoureux·se de Hyacinthe. Dès qu’iel l’avait vu·e la première fois à l’internat, iel avait su qu’iel serait l’amour de sa vie. Il y avait encore un problème à résoudre : les nouvelles lois sur la non-binarité interdisaient de désigner quelqu’un·e par les anciens mots homme ou femme devenus tabous, seuls les prénoms et le langage épicènes étaient autorisés. Or Camille préférait faire l’amour avec une personne qui avait un pénis et des testicules, et iel ne savait pas si Hyacinthe en avait.
Ce n’était plus possible de regarder dans quelles toilettes Hyacinthe entrait, c’étaient les mêmes cabines pour tou·te·s. On ne pouvait plus se mater sous la douche, elles n’étaient plus collectives. Pas d’habits différents, ils étaient amples afin de cacher les contours du corps. Et les chambres n’accueillaient qu’un·e interne.
Un soir, Camille et Hyacinthe se promenaient dans le parc, discutant d’un devoir de mathématiques. L’air était doux, le soleil se couchait. Camille osa franchir le pas.
— Hyacinthe, que ressens-tu pour moi ?
— Nous sommes de bon·ne·s ami·e·s, même un peu plus.
— Accepterais-tu de me dire ?
— Te dire quoi ? demanda Hyacinthe en riant.
— Si tu en as…
— Mais oui, j’en ai, une bite et des couilles.
Camille était aux anges.
— Alors je peux enfin te le dire, je t’aime, Hyacinthe !
— Je t’aime aussi, Camille, mais j’aimerais être sûr·e, j’ai aussi mes préférences.
Au lieu de répondre, Camille prit la main de Hyacinthe et la plaqua sur son entrejambe. Iel fut satisfait, iels échangèrent un long et doux baiser.
Iels se marièrent et vécurent heureux. Le conte ne dit pas si iels eurent beaucoup d’enfants.
Annotations