001 - Un nouveau départ

9 minutes de lecture

(Pas vraiment satisfait du résultat de cette semaine, mais c'est pas grave, c'est aussi le but de ces petits défis, ecrire un texte en une semaine autour d'un thème. Après, réussi ou pas, l'important c'est que ça entraine et qu'on peut se rattrapper la semaine suivante (ou celle d'après XD)

J'ai galéré toute la semaine pour enfin trouver un angle d'attaque et une porte de sortie à mon histoire, du coup j'ai presque tout réécrit le dimanche même. Rendez-vous la semaine prochaine!

(Le thème de la semaine prochaine: Un apéro compliqué)

Un nouveau départ

 Dans une vie, il y a la naissance et la mort, ce qu'il se trouve entre deux n'est que fioritures. Jusqu'à maintenant, ma vie ne fût qu'une succession d'échecs, d'abandons, de claques dans la gueule. Puis un jour, il faut se rendre à l'évidence... Le temps est venu de tirer sa révérence. Je n'arrive plus à porter mon baluchon, trop lourd de chagrin et de lames intérieures. Je commande un dernier rhum au barman. Au fond, le pianiste entame une mélopée tandis que monte sur scène un homme grisonnant, armé de son saxophone. La mélodie fait remonter en moi des souvenirs de séparation, des relents d'inachevé. Je bois une gorgée, une boule au ventre. Mon regard croise celui du saxophoniste alors qu'il met l'instrument à sa bouche. Lors de ce bref échange, j'ai l'impression qu'il me comprends, l'espace d'un instant. Bon sang, ses premières notes, lentes et mélancoliques, me font frissonner. Comme un prologue à mon dernier acte. Je décide de finir mon verre cul-sec et de sortir m'en griller une. Je dépose un peu de monnaie sur le bar, mets mon manteau et mon fedora, et me dirige vers la sortie.

 Sur le seuil du bouge, je sors la dernière clope de mon paquet, l'allume, inspire un grand coup la fumée et la laisse ressortir par mes narines. Je regarde la ruelle devant moi. De la vapeur s'échappe des bouches d'égout. L'atmosphère bleutée de la nuit enveloppe la ville de sa chape de plomb. Il doit être deux ou trois heures du matin. L'envie me prends de marcher un peu. Mes pas résonnent dans les rues vides. Après quelques minutes à errer dans la ville et mes pensées, je jette mon mégot dans le caniveau.

 Soudain, sortant d'une petite allée, une main musclée me prends par le col et me tire à elle. Je suis projeté contre le mur. J'essaie de donner un coup de poing pour me défendre, mais j'en suis empêché par un deuxième homme. Je sens une piqûre dans mon cou. L'autre me maintient contre le mur. Ils ont des masques de carnaval. J'essaie de me libérer, mais je sens déjà mes forces me quitter.

 - Qui êtes-vous ? Qu'est-ce que vous me voulez ?! Bordel, butez-moi, qu'on en finisse !

 Ma vision se trouble. J'entends une porte de voiture se refermer et des pas s'approcher de moi. Une femme mince et bien habillée, elle aussi cachée derrière un masque, est maintenant devant moi, à m'observer. Je remarque ses yeux verts. Je lutte pour garder mes esprits encore quelques secondes. L'un des hommes demande :

 - Madame ? C'est bien lui ?

 - Oui. Mettez-le à l'arrière. Ne l’abîmez pas, il doit être prêt pour l'opér...

 Noir. J'entends des sons. Une sonnerie récurrente et artificielle. Des voix incompréhensibles, comme un tableau abstrait rempli de couleurs mélangées. J'essaie d'ouvrir les yeux.

 Blanc. Des formes s'affairent autour de moi. On me touche. On m'observe. Ma vision est encore floue, la lumière ambiante m'aveugle et je n'arrive pas à distinguer les visages. J'entends la voix de la femme aux yeux verts, mais je ne comprends pas ce qu'elle dit. Je les entends sortir. Je sombre à nouveau dans l'inconscience.

 Un moment plus tard, je reprends enfin mes esprits. J'ouvre les yeux. Je suis dans un lit d’hôpital, dans une pièce sobre, sans décorations. J'ai un cathéter dans le bras, des appareils électroniques surveillent mon état. Il n'y a pas de fenêtre et la lumière provient de néons au plafond. Bon sang, mais qui sont ces gens ? Qu'est-ce qu'ils me veulent ? J'enlève le cathéter, je tends le bras pour éteindre les appareils et j'arrache tous les câbles qui prenaient mes signes vitaux. Suis-je capable de marcher ? Je tente de m’asseoir sur le bord du lit, pour voir. J'y arrive avec peine, mais je sens qu'il ne faut pas que je m'attarde ici tant que je n'ai pas une idée de ce qu'on veut de moi. Je me lève doucement, les jambes encore un peu tremblantes. Ils m'ont affublé d'un habit une pièce, comme un patient après une opération. J’aperçois, sur un porte-manteau vers la porte, une blouse blanche que je m'empresse d'enfiler.

 En prenant appui contre le mur pour ne pas tomber, j'essaie de tourner doucement la poignée, mais la porte ne veut pas s'ouvrir. En mettant les mains dans les poches, je sens un porte-clés ainsi qu'une carte d'accès. Aucun nom dessus. Par chance, une des clés rentre dans la serrure. J'entre-ouvre la porte et jette un oeil. Derrière, un long couloir étroit semble mener à une pièce principale. Il y a plusieurs portes sur les côtés, et la plus proche est munie d'une serrure électronique avec un voyant rouge. Quelqu'un passe au fond, mais la personne ne me remarque pas. Je sors de ma cachette, ferme derrière moi, et me faufile jusqu'à la première porte. Bingo ! La carte trouvée plus tôt dans la blouse fait passer le voyant au vert, il y a un cliquetis de serrure et la porte s'ouvre. J'entre.

 Me voilà dans un bureau. Mes habits sont posés en boule dans un coin, mes affaires éparpillées. Il y a un ordinateur et des dossiers posés à côté du clavier. Lorsque je me change, je remarque une cicatrice dans le cou, avec encore les points de suture. Putain, mais ils m'ont fait quoi ? Je fais le tour du bureau et jette un oeil sur l'écran. Un fichier est ouvert avec ma photo. Sujet 42. Il y a des graphiques et le schéma d'un... dispositif ? Vraiment étrange. Je regarde les dossiers à côté du clavier. Ils sont nommés par sujets mais le mien n'est pas là. Pas le temps de faire dans la finesse. J'en prends un au hasard que je plie et que je glisse dans mon manteau. Je fouille dans les tiroirs pour trouver quelque chose d'utile. Un seul est déverrouillé, et je trouve à l'intérieur un coupe-papier que je prends pour me défendre, au cas où. J'entends des pas dans le couloir. Merde ! Je me positionne derrière la porte, prêt à agir. Des voix étouffées me parviennent.

 - Il a disparu, Madame !

 - Et bien cherchez-le ! Il n'a pas pu sortir du bâtiment. Prévenez-moi quand vous l'aurez trouvé. Je serai dans mon bureau. Attendez. Passez-moi votre carte, je ne sais pas où j'ai laissé la mienne...

 J'entends le petit bip et la serrure qui s'ouvre.

 - Merci. Et retrouvez-moi 42 !

 Je la laisse entrer. À peine la porte refermée, je m'approche par derrière et la menace en lui mettant le coupe-papier sous la gorge tout en la maintenant avec l'autre bras.

 - Un cri ou un appel à l'aide, et je vous fais un nouveau sourire. Alors fermez-là et tout se passera bien. C'est compris ?

 Elle ne semblait pas avoir peur. Elle fit un hochement de tête pour confirmer.

 - Qu'est-ce que vous m'avez fait ? C'est quoi cet endroit ?

 - Calmez vous. Vous êtes dans une clinique privée. On vous offre une deuxième chance.

 - Arrêtez vos conneries! J'étais sur le point d'en finir quand vous avez déboulé de nulle part. Il ne me restait plus qu'une chose à faire après cette soirée, c'était me foutre en l'air une bonne fois pour toutes !

 - Précisément. Nous sommes à la recherche de gens comme vous. Prêts à en finir. Chez certaines personnes, les émotions d'un esprit à bout sont si fortes qu'elles provoquent un changement au niveau génétique... On est vraiment obligés de discuter avec une lame sous ma gorge ?

 - Oh que oui, tant que j'ai pas des réponses que me satisfont.

 - Je vais tout vous expliquer. Mais s'il vous plaît, lâchez moi. Je vous promets de ne rien faire contre vous ni d'appeler à l'aide. J'aimerais vous montrer quelque chose. Dans ma poche, il y a la clé de ce bureau. Ouvrez le premier tiroir et prenez ce qu'il y a dedans.

 Je prends la clé dans la poche de son blazer long et la pousse pour la dégager. Elle s'affale sur une des chaises. Pour la première fois, je vois bien son visage. Des lunettes, rousse, les cheveux longs et les yeux verts. Habillée en tailleur noir. Si elle ne m'avait pas kidnappé, je l'aurai presque trouvé jolie.

 - Pourquoi ne pas m'avoir simplement demandé au lieu de me charcuter à la sauvette ?

 - Nous avons eu quelques... soucis avec vos prédécesseurs. Dites-moi, Charlie... Charlie ? C'est bien votre prénom ? Dites-moi, est-ce que vous avez déjà entendu parler du concept de vies antérieures ?

 Tout en ouvrant le tiroir du bureau, je lui réponds :

 - Comme quoi certains humains se rappelleraient leur vies passées ? Ce sont juste des illuminés.

 Je trouve à l'intérieur une sorte de télécommande avec un petit bouton rouge. Je la montre à la femme.

 - C'est quoi, ça ?

 - Votre avenir, Charlie. Et le notre à tous. J'ai mis au point un dispositif que nous avons implanté dans votre corps. Jusqu'à vous, les précédents sujets ne nous avaient permis que d'avoir des bribes, mais avec les résultats préliminaires que nous avons menés, je suis plutôt confiante quant à votre capacité à vous souvenir de votre futur.

 - Attendez, attendez... Putain, de quoi vous parlez, bon sang ?

 - Pendant des années, j'ai fait des recherches sur la possibilité d'avoir eu des vies passées, et j'ai trouvé une faille dans nos émotions. Voyez-vous, lorsqu'une personne à tout perdu et qu'elle s'est résignée à la mort, cela débloque une partie de son cerveau et lui donne accès à ses souvenirs de vies antérieures. J'ai poussé ma théorie encore plus loin, et je pense qu'en donnant un petit coup de pouce à notre esprit, il est possible de débloquer des souvenirs de nos vies postérieures. Imaginez, la possibilité de prédire le futur, en quelque sorte. Mais cela ne fonctionne qu'avec très peu de personnes. Et toutes ont échoué jusque là. À part quelques bribes, il nous à été impossible de prédire précisément ce qu'il va se produire. Mais...

 - Vous êtes complètement folle. Et qu'est-ce qui vous dit que je ne finirai pas en légume après un traitement pareil ?

 - Rien. C'est même déjà arrivé avec nos précédents sujets. Mais écoutez, pourquoi ne pas me faire confiance ? De toutes façons, vous ne pensiez pas voir un nouveau jour se lever, qu'avez-vous à perdre ? Appuyez sur ce bouton. Si cela ne marche pas, je vous relâche et vous pourrez finir votre vie comme bon vous semble. Dans le cas contraire...

 - Quoi ?

 - Dans le cas contraire, vous comprendrez pourquoi nous avons besoin de vous, et vous changerez peut-être d'avis ?

 Elle a raison. De toutes façons, je n'ai plus rien à perdre. J'appuie sur le bouton. Une douleur phénoménale me traverse la tête. Je lâche la télécommande et je m'écroule sur le sol...

 Je vois des choses défiler, c'est moi, sans être moi. Je vois à travers les yeux d'une personne. Je suis un marine de l'armée, en train de me préparer à partir au combat. Je prends mon arme. Je vois un calendrier contre le mur. Novembre 2064. Je donne une tape dans le dos à mes camarades et nous sortons du bunker au pas de course. Il y a de l'agitation dans la caserne. Des avions et des hélicoptères décollent à la chaîne. On nous fait monter dans un véhicule blindé. Après ce qui me semble être une heure de route, le véhicula s'arrête. Le gradé nous demande de sortir et de continuer à pied. A peine quelques mètres franchis, une explosion aveuglante à lieu au loin, en direction de New York. Un champignon atomique commence à se former. Je vois des missiles intercontinentaux décoller dans le ciel. Ma vision se trouble. Le mal de tête revient...

 Je me prends la tête entre les mains. La douleur s'estompe après quelques secondes. J'essuie sur ma manche un filet de sang qui s'était échappé de mes narines. Je tente de me relever en m'appuyant sur le bureau. La femme rousse s'était approchée pour m'aider à tenir debout.

 - Alors ? Qu'avez-vous vu ?

 - Je... Je vais vous aider. Il faut empêcher cela...

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