La bouche de béton

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Cela faisait 4 mois que j'étais en couple avec Oscar. Nous nous étions rencontrés a la bibliothèque de notre ville durant les vacances d'été. Je m'en souviens encore, il lisait un livre sur Freud, et moi je lisais une revue qui expliquait comment s'épiler les jambes à la cire. Nous nous étions souris timidement.

Je fus bien evidement extrêmement surprise de constater lors de la rentrée que nous étions dans la même classe de terminale. Nous étions tout le temps collés l'un à l'autre, puis nous avons décidé de sortir ensemble.

Cela faisait donc un moment que nous étions en couple, mais nous ne nous étions encore jamais embrassés, et je dois admettre que je commençais à m'impatienter. Je savais qu'Oscar était un garçon timide, mais moi j'avais la bouche séche à force de l'attendre ! Un soir, alors que nous étions au téléphone, je pris la décision d'aborder le sujet avec lui.

- Bon Oscar je t'aime bien mais il faudrait peut-être qu'on passe au level suivant, tu ne crois pas ?

Mon copain ne comprenait pas du tout à quoi je faisais référence. J'ai donc décidé d'aller droit au but.

- Oscar c'est quand qu'on s'embrasse ?

Il y eu un gros blanc, plus personne ne parlait. Après plusieurs longues minutes Oscar reprit enfin la parole.

- Euh d'accord mais tu veux faire ça quand Lucie ?

"Tu veux faire ça quand Lucie ?", j'avais sincerement envie de lui répondre "Bah écoute on se fait ça samedi en huit". Ce garçon me désespérait. Nous avions continué à parler de tout et de rien le reste de la soirée, mais de mon côté je réfléchisais à un plan pour parvenir à mes fins.

Le lendemain, lors de notre cours d'histoire, j'ai demandé à Oscar si je pouvais manger chez lui ce midi étant donné que nous n'avions pas cours l'après midi. Il a accepté tout de suite, tout content de pouvoir faire un bon petit plat pour sa copine, ce garçon était beaucoup trop naïf.

Nous sommes donc arrivés devant chez lui. Sa maison était minuscule et les murs étaient en briques rouges. C'était la première fois que j'entrais dans son espace personnel, mais j'étais heureuse car j'allais bientôt visiter un autre de ses espaces personnel.

Oscar m'a préparée son plat aux légumes, et il s'est assis à son bureau qui était littéralement à l'autre bout de sa chambre, et par ailleurs à l'opposé de moi. Alors que je savourais la nourriture en étant assise sur une petite chaise à roulettes, je décidais de relancer le sujet du baiser.

- Oscar tu te souviens de notre discussion d'hier ?

Mon copain devînt alors blanc comme un linge. J'ai cru qu'il allait tomber dans les pommes.

- Oui je m'en souviens.

Je voyais bien qu'il n'était pas du tout à l'aise, mais il était hors de question que je laisse tomber.

- Puisque tu t'en souviens, tu comprends maintenant que je ne suis pas venue ici pour la qualité de ta nourriture ?

Oscar hocha simplement la tête, puis je fus totalement prise au dépourvu par sa réaction. Il fit une espèce de 190 degrés sur sa chaise pour se retourner, et être dos à moi. Il tapait sur son clavier d'ordinateur qui était éteint.

Je me disais intérieurement que ce n'était pas possible, que ce garçon se fichait de moi. D'habitude je n'étais pas du genre à forcé la main aux autres, mais là ce n'était pas possible autrement.

J'entrepris donc de le rejoindre à l'autre bout de la pièce. Pour cela je me propulsais sur la chaise à roulettes à l'aide de mes jambes. Il ne me fallait plus que quelques mètres pour l'atteindre.

- Non Oscar, tu n'échappera pas à ton destin mon grand.

Après avoir vaincu la distance qui nous séparait, j'arrivais enfin près de lui. Il se crispa et se leva de sa chaise lorsqu'il sentit ma main sur son épaule.

- Bon Lucie tu as vu l'heure ? Il faut que j'aille promener mon chien.

J'ouvris de grands yeux.

- Mais tu n'as pas de chien.

Il ne m'écouta pas, et commença à marcher en direction de son entrée. Dans mon cerveau c'était la goutte de trop. Je me suis levée, et je l'ai attrapé par le bras, lui faisant comprendre ce que je voulais. Il eut un petit sourire timide, mais accéda enfin à ma demande.

Il posa donc ses lèvres sur les miennes. Pour être honnête, j'avais entendu plusieurs personnes me dire que c'était génial d'embrasser quelqu'un, mais dans mon cas j'avais l'impression d'embrasser le mur en briques de sa maison. Ces lèvres étaient extrêmement dures, deux blocs de béton. Je sais qu'on dit que la première fois est souvent décevante, et pour le coup ça n'a jamais été aussi vrai. Contrairement à la plupart des gens je n'ai pas ressenti de papillons dans le ventre, ni de sensation de plénitude.

Notre échange dura moins d'une seconde. Nous nous sommes séparés, les yeux toujours plongés dans ceux de l'autre. Oscar était toujours aussi gêné.

- Alors c'était comment Lucie ?

A part lui dire qu'il avait des lèvres en béton, je ne voyais vraiment pas quoi lui répondre.

- C'était vraiment si décevant que ça ?

Il osait me poser cette question après tout le cinéma qu'il m'a fait ? Il aurait du le dire dés le départ qu'il ne voulait pas faire ça.

- Franchement ? Franchement ouais c'était trop nul.

Fin

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