... qui sombre dans le côté obscur.

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Hélas. Trop d’éléments s’accordent. Mes récentes ruptures, l’alcool, l’ascenseur émotionnel que je viens de me prendre en pleine figure, les menaces, l’adrénaline, la trahison de cet homme qui m’avait juré fidélité…


Nous y voici donc. Ma montre sonne discrètement, il est deux heures du matin.


J’avance la lame d’un coup sec. Mon cerveau ne l’a pas ordonné. C’est le cœur qui dirige. La pointe perce la peau, tranche les artères. Je me retire d’un coup sec, elle hoquette, tombe à genoux en tentant de couvrir la plaie. Bien que n’ayant fait qu’une légère entaille, la sève vitale s’écoule déjà à gros bouillons d’entre ses doigts. Elle s’étouffe dans son propre sang, le cerveau cesse d’être alimenté.

Elle s’effondre après une lutte vaine pour survivre, morte.


Je papillonne encore des paupières, regarde la lame à peine ensanglantée. Une autre révélation s’empare de moi. Je suis une meurtrière.

L’homme à mes pieds gémit d’autant plus fort alors que ses genoux sont atteints par le sang de ma victime. Il se débat, un craquement sonore m’indique qu’il vient de se briser un os, à moins que ce ne soit moi qui aie forcé, je ne saurais dire.

J’analyse toujours la situation. Qu’est-ce que je ressens ? Je cherche de l’inquiétude, une peur des conséquences, des remords devant la vie détruite… rien. Il n’y a que du soulagement, de la joie même, de libérer enfin ce poids qui oppressait mon cœur. Ce poids que l’on appelle la raison, la tempérance. La civilisation ?...


Je me sens libre.


Plus que ça, j’ai l’impression d’avoir une illumination. La vie m’apparaît sous un autre jour. Je ris, je ris à gorge déployée en plongeant mon couteau dans la nuque du déchet à mes pieds. Il n’a même pas le temps de hurler, lui aussi meurt sur le coup. Ça ne me plaît pas. J’aurais voulu qu’il souffre, seulement un tout petit peu plus.


Il m’en faut encore.

Je m’éloigne en dansant, léchant la lame pour m’enivrer de ce goût de fer. Je quitte la ruelle en laissant les deux cadavres au bord du trottoir. Les éboueurs les ramasseront demain. Je sautille, je chantonne la première musique qui me vient.

« Libéréééé, délivrééééé ! »

Du bruit attire mon attention. Un type est en train de dégueuler sur le capot d’une voiture tandis qu’un pote s’amuse à le filmer. Je m’approche par derrière, l’air de rien.

  • Hey ! Fis-je à l’attention de celui qui tient le téléphone.

Il tourne un regard hilare vers moi, ouvrant grand les yeux en voyant ma face souriante et probablement un peu hystérique.

  • Euuuuuuh.. Salut m’zelle.

Je m’amuse à détailler son air surpris, voulant soudainement caresser cette barbe naissante Oh combien attirante. Oui, je le veux ! Pourquoi résister à mes pulsions ? Je l’attrape par le col et plaque sauvagement mes lèvres contre les siennes. Je mords sa langue, le fais chuter sur la voiture et commence à caresser sa barbe, poussant des gémissements dont je ne me croyais capable qu’en plein orgasme. Tout est si… intense ! Pourtant, l’objet de mes fantasmes tente de me repousser.

  • Non… j’peux pas… j’ai une copine…

Bam. Second ascenseur émotionnel dans la gueule. Je passe d’un désir intense à une expression de rage, me saisi du couteau et le plante à deux mains dans son ventre ! Il hurle de douleur alors que ses boyaux apparaissent à la lueur des lampadaires dans des bruits de succion immonde. Son pote sur le côté me fixe d’un air hagard. Sa figure prend la forme de mon ex tout récent. Un quatrième besoin de violence s’empare de moi, je me jette sur lui en criant et lui plante mes ongles dans les yeux ! Mon plaisir est égal à sa douleur, alors je vais plus loin, enfonçant mes doigts dans cette gelée visqueuse jusqu’à ce que cessent ses hurlements. L’autre garçon ne bouge presque plus, il essaye d’étouffer ses cris pour que je l’oublie.

Oh, je l’ai déjà oublié. Lui, mais pas mon couteau que je reprends d’un geste sec, le faisant crier à nouveau. J’entends des bruits de pas, prends la fuite en couvrant mes rires d’une main et me libérant de mon manteau sali par le sang. Des voix résonnent dans mon dos, on a dû découvrir les corps. Les premiers, chuchote une voix sadique dans ma tête, ma voix. Je mets encore un peu de distance, puis, n’y tenant plus, j’éclate d’un grand rire en m’appuyant contre un mur. Quelle joie, quel plaisir, quel BONHEUR de laisser libre court à sa rage, de n’obéir qu’à ses pulsions ! Vite ! Une autre, une autre ! Crie la petite voix.


Je tourne en rond, ne croise que des groupes plus ou moins éméchés. Trop risqué… Bah, après tout. J’en rejoins un au hasard, quelques filles accompagnées de leurs conquêtes du soir. Je les suis, me rapproche lentement en m’identifiant aux raptors de Jurassic Parc 2. Je cible ma proie, une petite brune n’ayant trouvé de partenaire, laissée en arrière.

Je l’attrape par surprise, plaque ma main contre sa bouche alors que je lui tranche la gorge. Elle s’effondre dans un gargouillis à peine audible. Je ne suis déjà plus là, j’ai pris sa place dans le groupe. Nous marchons de concert alors que je compte chaque seconde qui passe, telle la petite et mignonne enfant profitant de l’efficacité de sa cachette à un jeu de cache-cache.

  • Bah alors ? Elle est où, Lucie ?

Je suis déçue. Il leur a fallu 13 secondes pour se rendre compte de son absence. Ils regardent un peu partout, je tourne autour d’eux, si bien qu’ils ne me remarquent pas. L’un des garçons pointe le corps de leur amie à un peu plus de dix mètres. Lui, il m’énerve déjà ! Je fonce à travers le groupe, bousculant trois idiots pour l’atteindre et lui plante le couteau dans le dos. Sans m’arrêter, je prends la fuite dans une petite ruelle. La surprise est totale, il faudra attendre qu’il tombe à genoux pour que les autres réalisent ce qu'il vient de se passer.

Le temps de reprendre mon souffle entre deux spots de lumière, j'entends des cris provenir des alentours, vois des gens se mettre à courir. Un doux vent de panique s'empare de cette nuit en y apportant des couleurs ocre. Je commence à frissonner sans mon manteau, à m'énerver en sentant l’adrénaline quitter mon corps. J’avance au hasard, les bras serrés contre mon buste pour me tenir chaud. La devant, une personne arrive. Un policier. Il vient droit vers moi, je le regarde avec une petite figure innocente. Je ne feins rien, je ne me sens pas coupable.

  • Mademoiselle ! C’est dangereux ici, un meurtrier sévit dans les rues.

Je saiiiiis.

  • Ah bon ? Là, je joue la comédie avec ma petite voix inquiète.

Le flic remarque que je suis peu couverte, me prend par les bras pour m’amener avec lui. Il me répète que je suis hors de danger. Je trouve la situation monstrueusement amusante.

J’ai envie de jouer, m’assois dans sa voiture en écoutant son talkie-walkie. Ils ont retrouvé quatre cadavres, six ! Respectez-moi ! Je boude. Un périmètre de sécurité est en train de se former, de cinq kilomètres de rayon. Et bla bla bla, que ça parle de qui surveille quel secteur… Je m’ennuie. Ma pulsion de meurtre doublée d'une autre, plus espiègle, devient irrésistible. J’ai envie de tuer, et qu’on tente de m’arrêter.

J’attends patiemment que l’homme ayant pris la place conducteur décroche son talkie pour répondre à un message. L’attente est délicieuse, je sens l’adrénaline revenir au grand galop, et en même temps, chaque seconde passée sans tuer m'exaspère un peu plus. Puis, vient fatalement son heure. Il décroche au moment où je plonge en avant pour me saisir de son arme posée sur le siège passager, grossière erreur qui te coûtera la vie ! Je jubile, tenant l’arme entre mes doigts, lui et son expression surprise sur le visage. Il s’en veut d’avoir été si bête, ça crève les yeux. En une seule et simple seconde, je peux me mettre à sa place, imaginer tout ce qui s’y déroule. Le regret qui s’empare de lui, se dire qu’il va mourir sur une erreur stupide, qu’il serait prêt à donner absolument TOUT pour remonter le temps de quelques secondes. Cette dernière réflexion m’excite à un point… j’en mouille ma culotte. Je gémis doucement, m’amusant de l’effet qu’ont ces sensations sur mon corps. J’ai envie de jouer avec lui, personnellement. Quel veinard.

  • Que ferais-tu, pour remonter le temps de quelques secondes ? Je susurre ces mots, me sentant une succube version meurtrière.

Il ne répond rien. Je le vois désespérément chercher une réponse qui me conviendra, quelque chose qui lui sauverait la vie. À mon air de folle, il doit bien se douter que je ne veux rien qu’il puisse m’offrir, mise à part sa vie, bien entendu.

  • Ne fais pas ça. Il est encore t-…

BAM !

Mauvaise réponse.

La balle va se loger dans sa poitrine, enlaçant son cœur dans une étreinte mortelle. Je me sens tellement poétique, je pourrais être l'apprentie de Khada Jhin. Ma figure s’avance lentement, j’essaye de contenir mon plaisir en goûtant son sang. Il m’en faut… Encore !

On exige de ses nouvelles, pourquoi il ne répond plus. Je dois m’éloigner au plus vite. Je sors donc et m’élance au hasard, comprenant par essence que je me dois d’être illogique pour qu’ils n’arrivent pas à me retrouver. Dans ma poche gauche, j’ai un pistolet avec cinq balles. Dans la droite, mon IPod avec des écouteurs que je plonge dans mes oreilles. Je mets une musique au hasard, quelque chose de sanguin. Je trépigne d’impatience, avançant en voyant des gens continuer à courir. Je tire deux autres fois, élimine deux nouvelles vies sans même entendre le bruit des détonations. La première était pour Théo, le connard qui m’avait trompé. C’est son visage que j’avais vu sur celui de la fille, je ne le supportais pas, alors je l’ai faite… disparaître ! La seconde victime, c’était juste parce qu’il avait voulu me prévenir qu’un meurtrier rôdait dans les parages. J’étais encore à savourer la mort du Théo intérimaire et ne voulais pas forcément le tuer, mais il avait voulu enlever mes écouteurs.


Mon téléphone vibre. C’est Rachelle. Elle a tenté de m’appeler onze fois, me dit par SMS qu’un meurtrier rôde ce soir, me supplie de lui répondre. Son inquiétude me touche. Je me dis que je devrais essayer de me contenir pour elle…. Naaaan ! Je ris en rangeant le téléphone dans une poche, répondant par un { xD } qui illustre parfaitement mon expression actuelle. Les rues sont devenues désertes, dommage. On dirait que j’approche de la fin du jeu.

Enfin, voilà un défi intéressant. Face à moi, deux policiers barrent la route. J’ai dû atteindre l’extrémité de leur périmètre devant ‘’’’’’soi-disant’’’’’’ me contenir. Je mime des oreilles de lapin de mes doigts en me faisant cette remarque. Au vu de mes déplacements anarchiques, je suppose qu’ils doivent penser que je me déplace au Nord, alors que je suis actuellement à l’Est. En tout cas, ils sont seuls, ce qui va parfaitement dans mon sens. Je les vois les deux policiers, deux femmes, me faire signe de m’arrêter. Un air faussement apeuré apparaît sur ma figure alors que j’enlève mes écouteurs en leur demandant ce qui se passe. Comme je m’y attends, elles tombent dans le panneau… à moitié. Elles s’interrogent du regard. Je devine qu’elles ne me suspectent pas vraiment, mais elles ont ordre d’être prudentes. Une petite fierté s’empare de moi, j’ai réussi à rester totalement discrète, ils ne savent même pas s’ils recherchent un homme ou une femme, et je n’ai pas le profil d’un tueur fou… Il faudra que j’y remédie. Quelques couleurs, du maquillage et des tatouages... comme Harley Quinn ! Elle devient instantanément ma nouvelle idole. pourtant, Carrie Fisher était drôlement bien placée, même devant Amanda Tapping, c'est dire !


Perdue dans mes pensées, l’une s’approche de moi, méfiante, alors que l’autre se saisit de son communicateur.


Quand je dis que je deviens succube… J’ai pris goût au sang. Je la laisse venir, l’air de rien. J’ai bien réfléchi à mes manœuvres, habituée aux combats et à la gestion du stress. On me guide à l’arrière de la voiture où la deuxième policière me demande mes coordonnées qu’elle fait remonter à la cellule de crise. L’autre se remet à surveiller la rue. Je les laisse faire, puis à l’instant où elle s'apprête à raccrocher… je dégaine et lui tire deux balles dans le corps ! Elle s’effondre sur un cri, je me suis déjà retourné vers l’autre policière qui vient juste de se retourner. Je prends soin d’arracher l’alimentation du communicateur avant de profiter tout mon soûl de ma dernière victime de la soirée.

Je ne dis rien, compte mentalement, il ne me reste qu’une balle, il ne faut surtout pas me foirer, ce serait trop stupide. Un silence de mort s’installe entre nous. À l’inverse du premier policier, elle n’exprime que de la rage, une envie de meurtre similaire à la mienne. Je lui souris en penchant la tête sur le côté, tentée de lui laisser l’occasion de se libérer, comme moi.


Mais.


Je n’ai pas envie de m’arrêter. Oh non. Je me mords la lèvre en la regardant avec désir. Je me retiens, comme une affamée devant un buffet. D’une main, je viens caresser mon entre-jambe, poussant un fin gémissement. La voir me dévisager alors que je prends mon pied m’excite d’autant plus. J’attends qu’elle craque, je profite de chaque instant de ce pur bonheur. Elle n’y tient plus, elle pousse un cri de rage en me fonçant dessus ! Je presse la détente comme on dégrafe un soutien-gorge. Le tir me pénètre, me fait jouir avec une extase jamais ressentie par avant. Le tableau est moins agréable pour elle. La balle la pénètre par l'oeil droit, la tue sur le coup. L’arme s’échappe de mes mains, je tombe à genoux, toute tremblante pendant de longues secondes.


Le bruit des sirènes me ramène à la raison. En repensant aux films policiers, je prends soin de nettoyer l’arme pour effacer mes empreintes, puis me fourre en boule, cherchant à faire remonter la moindre parcelle de terreur et de malaise que la vie m’est offerte pour paraître la plus crédible possible.

Les pneus crissent contre le sol pavé. Des pas de bottes se rapprochent de moi. La terreur augmente d’un cran, je fais carrément une crise de panique non feinte. Je suis terrifiée à l’idée qu’on me découvre… que je ne puisse plus assouvir mes pulsions meurtrières. Je ferme les yeux, prie silencieusement qu’on me prenne dans des bras réconfortant en me demandant ce que j’ai vu…


Il me tarde de recommencer.

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