La tempête…

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C’est un vendredi, en pleine nuit, tandis qu’un violent orage gronde au-dessus de la vallée, résonnant entre les montagnes et déversant des trombes d’eau monumentales qu’une nouvelle alerte se déclenche. Prise de crampes, Charlène se tord de douleur à mes côtés, me réveillant en sursaut.

- Ma puce? Y’a un problème?

- J’ai mal… Mais ça ressemble pas aux contractions que j’ai eu jusqu’à maintenant… Ça ressemble même pas à des contractions…

- Bouge pas, essaye de te détendre…

- Et tu crois que je fais quoi là!!!

- T’as pas vraiment l’air détendue…

- Et toi trop détendu!!! T’est pas normal!!!

- Tiens, boit un coup, déjà…

Voyant son état je n’hésite pas une seconde de plus, et compose le numéro du SAMU, j’explique à mon interlocuteur la situation, écoute attentivement ses conseils et les applique dans le plus grand calme.

Calme apparent bien entendu, car à l'intérieur, c’est un peu comme à l'extérieur, ça tambourine, ça gronde et ça tremble, mais je me dois de faire comme si tout allait aussi bien que possible

Le temps que les pompiers arrivent, je prends sur moi pour la rassurer, paisiblement, l’encourageant à respirer comme nous avons appris lors des cours de préparation, je l’installe un peu plus confortablement, ajoutant quelques oreillers sous ses jambes et je lui masse les pieds pour essayer de la détendre tout en discutant de tout et de rien.

Lorsque j’entends au loin les sirènes qui hurlent, je me précipite pour accueillir les secours, et les guider jusqu'à la chambre, puis patiente en observant de loin et en écoutant attentivement ce que disent l’infirmier et le médecin du SMUR tandis qu’ils pratiquent une échographie et posent le monitoring pour vérifier la bonne santé du bébé et de la maman.

- Mademoiselle, ne vous inquiétez pas, tout va bien, votre bébé va bien, et tout va bien se passer.

- Vous êtes sûrs de vous? Parce que c’est pas vraiment l'impression que ça donne!

- Je vous comprends. On a juste un petit problème, c’est que votre bébé essaye vainement de se retourner pour se présenter dans le bon sens, mais qu’elle a l’air de manquer de place, et plutôt que de changer de sens et de direction, elle insiste et pousse sur vos organes, ce qui explique les crampes.

- Et il faut que je fasse quoi là?

- Alors on va essayer de vous mettre debout pour commencer, histoire de libérer un peu de place.

- Debout? Vous plaisantez?

- Ma puce, s’il te plait, essaye de te calmer, il n’y sont pour rien, c’est la nature…

Je détestais la voir en colère, la voir souffrir, et ne rien pouvoir y faire.

- Allons-y. On va voir immédiatement si c’est efficace. Monsieur Rivière, aidez-moi un peu.

- Pffff… Mr Rivière!!!

Nous avons profité de ce moment de relâchement pour la mettre debout.

Ouch! Ça va pas bien Mr Rivière? Tu m'as fait mal!!!

Lorsque nos regards croisent, nous explosons de rire, tous les deux, malgré l’inquiétude et la douleur.

- Y’a un problème?

- Mr Rivière… C’est… C’est pas… C’est mon père… Il t’a appelé comme mon père…

- Désolé… Je croyais que…

- Pas de soucis… C’est juste un peu bizarre… Mais, à-priori, ça fait bien rire certaines personnes…

- Et c’est assez efficace. C vous a un peu détendue, on dirait…

- Ouais…

Effectivement, elle avait l’air de moins souffrir, d'être moins crispée, en ce moment, ce qui me soulage un petit peu. Le médecin l’incite, ensuite, à faire quelques pas, pour continuer à décontracter ses muscles, et aider notre fille à réussir son demi-tour sans encombre, malgré la douleur qui la fait grimacer.

Après quelques minutes supplémentaires de souffrance, le médecin décide de la transporter directement à la maternité où le personnel, mieux équipé et plus habitué à la situation, pourra la prendre en charge. Je les laisse partir devant et je profite des quelques minutes qui me sont offertes pour rassembler toutes les affaires nécessaires, fumer une cigarette, et reprendre mes esprits.

‘ Ma petite étoile, je t’en supplie, veille sur elles. Ne nous laisse pas tomber maintenant. J’ai peur, je veux pas me retrouver seul encore une fois, ou perdre l’une des deux, je crois que je le supporterais pas. Je t’en supplie Cécilia fait le pour moi…’

Lorsque je retrouve Charlène dans la salle d’examen de la maternité, elle semble plus sereine malgré la douleur.

- Coucou mon amour. Alors, les nouvelles sont bonnes?

- Un peu oui, je pense qu’elle a réussi à se retourner, j’ai toujours mal mais plutôt à cause des contractions… Ouffff…

- Souffle un bon coup, respire calmement… Voilà, c’est très bien.

- Et toi, comment tu te sens?

- Un peu inquiet quand même… Tu m’as vraiment fait peur…

- Pourtant t’avais l’air assez calme… T’as géré comme un chef…

- Tu parles… J’ai fait ce que j’avais à faire, c’est tout… Je voulais pas te stresser plus…

- Ah… Je vois que le futur papa est là… Très bien… Bon ma chère demoiselle, ça ne va pas être facile pour vous, votre bébé va bien, elle est enfin bien positionnée, mais… Il risque de manquer de la place pour passer, les douleurs que vous ressentez sont classiques dans ce cas, assez rares mais rien d’anormal, donc on va déjà vous poser une péridurale pour vous soulager des contractions, et j’ai prévenu l’équipe de garde pour qu’ils se préparent à une césarienne en urgence si ça devient vraiment trop compliqué.

- Non!!!

- Comment ça, non?

- Je veux qu’elle vienne au monde naturellement, pas de césarienne s’il vous plaît…

- Alors je vais vous expliquer la situation, ce n’est plus à vous de choisir malheureusement, si votre bébé ne choisit pas la bonne position, votre bassin ne sera pas assez large pour permettre le passage, on n'aura pas le choix.

- Fait chier!

- Et ben? Chou?

- Désolée… Je… Déjà la péridurale… J’étais pas trop pour… Même si…

- Ma puce, c’est pour votre bien à toutes les deux, pense à votre santé en premier. Puis si ça se trouve elle va arriver se placer comme il faut…

- Monsieur, vous allez devoir nous laisser quelques minutes quand l'anesthésiste sera là. Vous souhaitez toujours assister à l'accouchement?

- Bien sûr… Mais…

- D'accord, mais en cas de césarienne c’e sera impossible, on devra vous faire sortir, par contre, pour le début, vous pourrez être présent.

- Je comprends…

Trois coups rapides à la porte, qui s’ouvre sans attendre de réponse et une tête qui apparaît nous interrompent

- Bonjour? Bonsoir?

- …

- Bon allez, vu l’heure, on peut se dire bonjour… Je suis Fabien, l’anesthésiste…Ne vous levez pas pour me saluer madame, c’est pas la peine…

Je regarde Charlène à ce moment, me retenant d’éclater de rire.

Alors, on va poser la péridurale dans un premier temps, puis une perf pour l’anesthésie au cas où. Tout va bien à part ça?

Son immense sourire, son ton jovial, et sa décontraction font disparaître immédiatement une partie de l’inquiétude qui nous habite

- Bien, bien… C’est vite dit… Mais à part "ÇA", pas trop mal.

- C’est super, allez on va s’occuper de vous, vous chouchouter, vous bichonner, vous allez voir. Vous serez mieux qu'à la maison… Monsieur, je vais devoir vous mettre dehors… Désolé…

- Pas de soucis. A tout de suite ma puce. Je t’aime.

Je dépose tendrement un baiser sur son front, et quitte la pièce pour passer quelques coups de fils et prévenir nos proches, avant de retourner faire le pied de grue dans la salle d’attente.

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