Fin de séjour…

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Les jours qui ont suivi ont été beaucoup plus paisibles, Patrick m’avait trouvé un vélo, j’avais investi dans quelques équipements, et je pouvais me défouler quand bon me semblait. Le matin je pédalais jusqu’au centre, et le soir, j'errais au grès des routes et de mes envies.

Magali a fait un travail remarquable avec moi, même si elle me soutient qu’elle n’a fait que me guider et que c’est moi qui ai progressé tout seul. Nous avons lié une forme d’amitié au fil des jours et je lui ai promis de l’appeler régulièrement pour continuer, à distance, mon suivi, après mon départ.

De mon côté, j’avoue que le sport m’a fait un bien fou, j’ai déjà perdu quatre kilos, arrêté de fumer (presque…), et trouvé une certaine sérénité, de la stabilité, je me sens déjà mieux dans ma peau.

Rouler me permet de m’évader, de me concentrer sur mon effort en ne pensant à rien d’autre, de repousser mes limites et de me redonner confiance en moi.

Le jour de notre départ, tous les résidents du centre ont tenu à chanter une dernière fois avec moi, et m’ont promis de continuer, Magali s’étant proposée pour prendre le relais.

- Louis, on est tous ravis d’avoir pu t’aider à aller mieux, quand je me rends compte des progrès que tu as fait en cinq semaines, je me dis qu’on a fait le bon choix, que j’ai eu raison de faire confiance à ma fille.

- Merci Patrick, merci pour tout, j’ai été ravi de mon séjour ici, de votre accueil.

- C’est mon boulot… Le gros du travail c’est toi qui l’as fait, et même s’il y a eu quelques accrocs, t’as été parfait…

- On peut le dire…

- Il faut échouer pour avancer et apprendre… Et puis, t’est un cas léger, en général un simple suivi psychologique suffit, si Charlène avait pas poussé, t’aurais jamais mis les pieds ici… Mais ça fait du bien de voir un jeune s’en sortir aussi vite, ça montre qu’on a été efficaces.

- Surtout moi !!!

- Charlène !!!

- Magali a été super avec moi aussi, malgré des débuts difficiles… Mais elle y était pas pour grand-chose…

- T’as été au top avec les autres résidents également, la chorale c’est une super idée, on cherchait quelqu’un pour lancer le truc, mais Magali n’osait pas, et finalement elle s’est laissé convaincre. Pour te remercier, je t’offre le vélo, tu pourras continuer à t’entretenir…

- Merci beaucoup, vous êtes vraiment un beau-papa génial, et Charlène vous ressemble tellement.

- Merci Louis. À bientôt. Ma fifille, prend bien soin de lui.

- On part que dimanche après-midi, on peut aller manger au restaurant ce soir, avec Maman ?

- Bonne idée ma chérie. Et maman sera ravie de voir Louis.

J’ai quitté le centre avec beaucoup d’émotions, tout le monde m’attendait pour une dernière étreinte, j’ai pris le temps de glisser un mot à l’oreille de chacun d’entre eux, et leur ai promis de repasser les voir à l’occasion de nos séjours et de venir chanter avec eux pour Noël.

Nous avons diné avec Patrick et Caro le soir-même, puis flâné une nouvelle fois dans les rues de Briançon, pris un dernier verre, avant de retrouver pour une dernière nuit notre petit studio.

Le samedi nous avons chaussé une dernière fois nos chaussures de randonnée, chargé une dernière fois nos sacs à dos, et suivi une dernière fois un sentier qui serpentait à flanc de montagne.

Après avoir garé la voiture sur le parking du pré de Mme Carle, nous avons entamé l’ascension jusqu’au Glacier Blanc, deux heures à crapahuter sur un sentier caillouteux, pour au final arriver au pied de ce géant de glace, nous avons essayé de poser les pieds dans l’eau, mais elle était bien trop froide.

Puis nous sommes montés jusqu’au refuge pour déposer nos affaires, et nous avons profité de la vue depuis la terrasse.

- Ma puce…

- Oui ?

- Encore merci pour tout, merci de m’avoir fait confiance, d’avoir cru en moi, merci pour tous ces beaux moments, ici, et merci pour ça.

J’ai balayé les panoramas d’un geste du bras.

J’ai passé un séjour magnifique, grâce à toi, à tes parents, aux gens, au centre, à Mag… Vous m’avez redonné envie de vivre…

- Tu nous as pas rendu la tâche facile, mais ça a été un plaisir, j’ai aimé tous ces moments qu’on a passé ensemble, te découvrir, te connaitre vraiment, te voir te reconstruire au fil des jours… Simplement être avec toi…

- J’ai plus envie de rentrer, je veux qu’on reste ici… J’ai pas envie de te quitter, de retourner chez mes parents, au lycée… J’ai vraiment peur de pas arriver à gérer tout seul…

- Tu vas y arriver, j’en suis sûre. Tu vas retrouver ta famille, tes potes, et on se verra tous les week-ends…

- Tu parles, ça fait deux mois que j’ai donné de nouvelles à personne, et j’ai mon bac à la fin de l’année, j’ai une tonne de retard à rattraper, tu crois qu’on aura le temps de se voir le weekend ?

- On fera tout pour… Je veux pas que tu lâches, que t’abandonnes, ne bousille pas tout le travail qu’on a fait ici…

- Et toi, tu vas avoir une tonne de boulot aussi, on y arrivera pas, c’est impossible…

- Putain mais arrête un peu de toujours envisager le pire… Si je te dis qu’on y arrivera, crois-moi, c’est tout ce que je te demande !!!

- J’admire ton esprit positif, t’arrive quand même à trouver du positif dans la situation… Mais je suis pas convaincu…

J’ai pris le temps, malgré tous ces doutes, d’apprécier ces dernières heures au grand air, le coucher du soleil sur le Glacier Blanc, son lever sur les crêtes rocheuses, cette nuit au refuge, mais j’ai trouvé ça beaucoup trop court.

Le lendemain, nous avons pris les chemins du retour, retour à la voiture, retour au studio et retour à la maison. Mes doutes ne m’avaient pas quitté, bien au contraire, je ruminais dans mon coin, fermé comme une huître, essayant de me persuader, en vain, que le futur serait toujours aussi beau.

Avant de rentrer, nous avons rendu visite à Cécilia, seule éclaircie de ma journée.

‘Coucou petite étoile… Tu m’as manqué… Mais tu vois, je vais beaucoup mieux… Je sais ce qu’il m’arrive, en fait c’est juste mon cerveau qui déraille… Mais j’ai les armes pour me battre contre ça maintenant… J’ai beaucoup pensé à toi ces dernières semaines, et Charlène aussi… Elle t’a accepté dans notre relation… Je l’aime… Tellement… Mais je sais pas si ça va durer… Elle à la fac, moi au lycée… Elle dans son appart, moi chez mes parents… On se verra pas beaucoup, et j’ai peur de pas tenir le coup… Je veux pas la perdre… Bon sinon, tu vois, j’ai perdu du poids, avec le vélo, c’est génial comme sport, je m’éclate vraiment… Je me défoule en roulant, et je me vide la tête, ça me fait un bien fou… Te moque pas, je suis sportif maintenant, et j’aime vraiment ça… Allez, je t’embrasse ma belle, tu me manques, je t’aime mon étoile…’

De retour chez mes parents, j’essaye de masquer mon trouble derrière une apparente bonne humeur, je suis heureux de les retrouver, de retrouver mon chez-moi, ma chambre, mais je suis inquiet. Puis nous courons chez Émeline qui languissait de me revoir et de rencontrer Charlène, tous les copains sont là et l'attendent de pied ferme. Ils sont surpris de me retrouver en si bonne forme, s’ils savaient seulement ce qui me trotte dans la tête, mais je fais encore bonne figure pour l’apparence.

Le soir nous avons mangé avec mes parents et dormi dans mon lit, Charlène ne devant emménager que le lendemain. Une nouvelle nuit blanche pour moi malgré la fatigue, mon cerveau tourne à plein régime, essayant de trouver une solution pour ne pas être séparé d’elle, mais rien ne me semble possible. Je tourne et me retourne, cherchant un plan pour continuer à être à ses côtés, et réussir nos études, on a prouvé qu’on était capables de cohabiter, et d’être sérieux, mais sans avoir à bosser nos cours et réussir d’examens. Là c’est une autre histoire et mes parents ne me laisseront jamais quitter la maison si tôt, pour m’installer avec une fille, même si c’est Charlène, trop inquiets de me voir lâcher mes cours et échouer.

Finalement, je décide d’aller méditer sur la terrasse, en bonne compagnie, ne cherchant qu’à noyer ces tracas dans la musique, en duo avec les étoiles.

- Tu dors pas ?

- Non…

- Qu’est-ce qu’il se passe ?

- Je cogite…

- J’ai bien compris… À quoi ?

- Rien de grave…

- Louis, j’ai bien compris que quelque chose ne va pas… Je te connais…

- M’man, c’est juste moi, rien d’autre…

- C’est Charlène ? Ça se passe pas bien tous les deux ?

- Si justement, trop bien, j’ai peur que ça s’arrête… Je veux pas qu’on soit séparés…

- Vous allez pas être séparés… Juste éloignés… Quelques mois…

- Joue pas sur les mots… C’est pas le moment… Je viens de vivre des moments formidables, je viens de passer un été merveilleux, j’ai retrouvé le goût de la vie grâce à elle…

- J’ai compris, ne t'inquiètes pas… Mais…

- Mais je dois avoir mon bac cette année, j’ai du retard à rattraper, il faut que je bosse deux fois plus… Je sais tout ça, j’en suis conscient… J’ai pas l’intention de foirer… J’ai même pensé à voir pour des cours de rattrapage… Et de bosser pour payer tout ça… Pour vous rembourser les frais de cet été, pour passer mon permis, acheter une voiture…

- Laisse tomber tout ça, on peut te le payer, c’est pas la question, le fric… Ce qui est important c’est que tu redeviennes celui que tu étais…

- C’est impossible… Je serai plus le même… Plus jamais…

- Tu m’as compris, joue pas avec les mots toi non plus… Essaye d’aller dormir un peu, on verra ça demain…

- Ouais… On verra…

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