Retour en marche…

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Malgré la courte nuit que nous avons passée, pas besoin de réveil le lendemain, nous n’avons pas changé de position, enlacés sous les draps. Nos sourires en disent long sur notre humeur du jour, et ce ne sont pas les quelques nuages qui s’accrochent aux sommets environnants qui vont nous les enlever et nous empêcher de passer un nouveau weekend sur les sentiers.

Après un petit déjeuner copieux, nous préparons les rations de repas pour nos deux jours de randonnée, vérifions nos sacs à dos, le matériel de camping et chargeons le tout dans le coffre de la voiture avant de prendre la route vers le départ de notre périple.

Plus nous approchons et plus je sens le courage me quitter, les sommets qui se dessinent sont de plus en plus impressionnants, et je ne vois pas vraiment comment je pourrais y grimper. Mon inquiétude doit se lire sur mon visage et Charlène me rassure d’une caresse sur la cuisse, en plongeant son regard serein dans le mien.

Lorsqu’elle gare sa voiture à la sortie du petit village, je lui fais part de mes doutes.

- Tu veux me faire grimper où, là ?

- Pas là-haut ne t’inquiètes pas.

- Et à part là-haut, tu voudrais aller où ?

- C’est juste un effet d’optique, regarde à gauche, le sentier part en lacets, ça monte tranquillement, même moins qu’à Dormillouse, et ça vaut le coup d’œil une fois au bord des lacs. Fait-moi confiance, si je t’en croyais pas capable, on viendrait pas ici…

- Au pire tu me porteras…

- Rêve… Allez ! On attaque pour arriver en forêt avant la chaleur…

Et je l’ai suivie, sans rien dire, sur le sentier, comme à son habitude elle ouvre la route, joue aux guides sur le début du parcours, entièrement à découvert, sur un sentier caillouteux qui serpente à flanc de montagne et qui laisse voir un panorama magnifique sur la vallée de la Durance.

Après deux heures de marche, quatre kilomètres parcourus et sept cent mètres de dénivelé avalés à un train soutenu pour moi, nous arrivons enfin dans une partie ombragée et presque plate où nous nous accordons une petite pause salvatrice.

Un kilomètre plus loin, nous nous installons sous les pins, au bord du torrent pour dévorer notre repas et nous autoriser une petite sieste à l’ombre. Il ne nous reste que trois heures de grimpette avant notre destination et nous sommes finalement en avance sur notre programme.

Nous profitons de l’ombre sur la portion montante suivante, qui longe toujours le torrent de l’Ascension, avant d’arriver sur la zone d’alpages, plus plate, mais totalement à découvert sur laquelle nous rencontrons notre premier troupeau de la journée.

Les bêtes paissent tranquillement au bord du sentier, imperturbables, tandis qu’au loin les chiens veillent, à l’ombre de la cabane. Le soleil commence à chauffer sérieusement et nous nous approchons du petit logis, pour profiter de l’abri des murs quelques minutes.

Après cette pause bien méritée, la suite du parcours se passe sans encombres, nous croisons un nouveau troupeau, discutons avec le berger qui nous propose un ravitaillement en eau, et nous conseille pour le bivouac.

- Vous serez pas dérangés ce soir, j’ai vu personne monter avec du matériel aujourd’hui. Quand vous arriverez au lac, quittez le sentier et contournez le par la gauche, il y a une zone rocheuse, vous serez abrités pour camper.

- Ça risque d’être plutôt inconfortable, non ?

- Non, il y a des rochers mais le sol est plutôt meuble, et propre. En cas de besoin je serai dans ma cabane juste derrière cette petite butte là.

- Merci. Bonne fin de journée.

- Merci les jeunes, bonne nuit.

Nous arrivons au lac une demi-heure plus tard, et je dois dire que le cadre vaut bien les cinq heures de marche que nous venons d’encaisser. Le lac est situé au fond d’une cuvette, entre les crêtes rocheuses, entouré de prairies vertes, l’eau est limpide, peu profonde en cette saison, et les orages de la veille ont laissé l’herbe humide et fraîche.

Nous repérons immédiatement la zone rocheuse indiquée par le berger et nous nous y rendons tranquillement pour établir notre campement. Le soleil commence déjà à baisser, nous indiquant l’approche de la fin de journée.

Nous contournons le rocher pour nous trouver à l’abri des autres randonneurs, je retire rapidement les quelques cailloux qui pourraient rendre la nuit inconfortable, et notre tente est montée en quelques minutes, une pierre faisant office de marteau pour l’arrimer correctement au sol. Nous installons ensuite notre couchage, préparons le matériel pour la soirée et la nuit, puis nous effectuons un petit tour de repérage pour trouver un coin tranquille pour les besoins naturels.

Le soleil a maintenant disparu derrière les crêtes, la température est plus agréable tout à coup, et cela annonce également le début de la tranquillité pour nous, le retour jusqu’au premier parking demandant au moins deux heures de marche, plus personne ne devrait venir nous déranger.

J’annonce donc le début de notre soirée bivouac en amoureux en me déshabillant pour aller me rafraîchir dans l’eau du lac, rapidement suivi par Charlène, qui ne se fait pas prier pour venir me rejoindre. L’eau est très fraîche et l’entrée est plus que compliquée, mais une fois habitué à la température, l’effet est très agréable, les douleurs musculaires disparaissent, la fatigue aussi.

Allongés près du bord, la tête reposant sur la rive, nous profitons des sensations, nouvelles pour moi, de l’eau qui glisse sur nos corps nus.

- Putain, si on m’avait dit un jour que j’allais aimer la rando, camper dans la montagne et me baigner à poil dans l’eau d’un lac d’altitude avec une fille…

- Ha ! Donc tu aimes ça ?

- Oh que oui, mais je pense que tu y es pour beaucoup. C’est différent de ce que j’ai toujours fait pour les vacances.

- Je savais que ça allait te plaire, tu aimes le calme et la solitude, ici c’est l’endroit parfait pour toi.

- Je te dirai ça demain matin… Pour l’instant on va profiter pour se détendre. On se fait péter les roteuses et du bonheur à fumer ?

- Loulou !!!! T’abuse là… Mais le cadre s’y prête tellement… Envoie…

Je sors rapidement de l’eau, prends deux bières dans le sac, et un joint que j’avais préparé avant de partir et retourne à ses côtés.

- Voilà mademoiselle Rivière.

- Arrête de m’appeler comme ça… Et puis je suis plus vraiment une Mademoiselle maintenant…

- Vu ton âge c’est sur…

- Petit con… Fait tourner un peu… Je parlais pas de mon âge mais plutôt de ce qu’il s’est passé hier soir…

- J’avais compris… Mais j’ai pas pu résister… Viens…

Je l’attire entre mes jambes, l’embrasse tendrement et lui fait tirer quelques lattes. Je suis presque au paradis ici, l’atmosphère est paisible, rassurante, le silence est fabuleux, seulement troublé par le bruit de l’eau qui clapote sur la rive, j’ai dans mes bras celle que j’aime et qui m’a redonné foi dans la vie, un nouveau but, nous fumons ensemble et sirotons une bière bien fraîche à poil dans un lac. Que demander de plus ? Un peu de guitare peut-être, mais Mélo m’aurait vraiment encombré ce weekend, cela ne nous empêche pas de chanter a-capella quelques minutes. Je me rends compte sur le moment de la particularité de sa voix lorsqu’elle chante, légèrement rauque, un peu cassée, quand elle pousse le volume, sa voix s’éraille, se brise, je trouve ça tellement sexy, mais il va falloir travailler sérieusement ce point…

L’air se rafraîchit soudain et nous ne tardons pas pour nous sécher et nous habiller pour la nuit, avant de cuisiner un petit dîner des plus revigorant : un délicieux plat de pâtes à l’huile d’olive et au basilic, accompagné d’un petit verre de rosé bien frais.

Nous terminons la soirée, allongés dans l’herbe à observer le ciel, et je dois dire que l’endroit est parfait, aucune pollution lumineuse, un panorama immense, et un silence monacal. Nous listons les étoiles, les constellations que nous connaissons, et je me dis qu’elle apprend très vite, tandis que j’ai du mal à mémoriser ses indications, commençant à me perdre dans mes pensées qui divaguent de nouveau vers Cécilia, de nouveau accompagnées de quelques larmes qui se tarissent rapidement. Après une dernière étreinte nous nous glissons dans nos duvets pour la nuit, épuisés par cette longue journée de marche.

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