Amiens

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Comme chaque année, nous partons en voyage avec les servants d’autel. Nous nous rendons à Amiens cette année. J’aime beaucoup partir en pèlerinage, qui plus est avec ma vraie famille.

Pendant le trajet dans le bus, je me mets à côté de Victoire. Même si elle n’a qu’un an de moins que moi, elle ne me semble pas très mature, et elle ressemble beaucoup à ces petites filles qui se cachent encore dans les jupons de leur mère pour ne pas voir les horreurs que la vie peut produire. Pourtant elle a tout d’une femme, et elle est très belle.

Elle fait au moins deux têtes de plus que moi, et j’envie fortement sa taille de guêpe. Elle a de longs cheveux blonds attachés en queue de cheval et de magnifiques yeux bleus. Pour faire bref, j’ai absolument tout à lui envier avec ma taille de naine, mes cheveux courts et coiffés en pétard, et mes yeux marrons, tout ce qu’il y a de plus banale se trouve en moi et je voue un tel sentiment détestable face à mon corps qu’il semble peu probable que ce soit réellement possible. Bref, j’envie beaucoup Victoire et je donnerais cher pour lui ressembler. Pour avoir autant d’amour et d’admiration devant ma mère. Mais je dois me contenter de mon physique, et du peu d’amour que j’ai. Mais au moins, pour le moment j’ai une chose de plus qu’elle, l’amour d’Alexandre. Il m’aime tellement qu’il ne peut se passer de moi ne serait qu’une seule journée.

Le trajet du bus ne me semble pas long. Même plutôt court. Maxence nous fait bien rire et nous entraine à chanter pour la messe que nous animerons dans la cathédrale. Et il me fait répéter moi aussi car aujourd’hui, c’est moi qui orchestre tout le monde, tout le service de l’autel, pendant que lui s’occupe de la chorale.

La journée passe à une vitesse effarante. Quand vient le moment de faire le tour du marché de noël, Maxence m’entraine face à un marchant de bonnets. Il m’en montre deux, deux identiques et de couleur vraiment flash.

-Allez Violette, on s’achète le même !

Je ne peux dire non face à un tel enthousiasme. Et ça me fait tellement plaisir qu’il me l’ai demandé à moi et à moi seule. On n’a pas l’air bête avec, mais on ne risque pas de se perdre au moins.

Le soir, remontant dans le bus, je mets à côté de Rémi, le frère de Victoire. Alors que Théophile, son ami se met à côté d’Eloïse. Nous rions bien à quatre.

Puis pendant un moment, Rémi se morfond au fond de son siège et me fait signe de faire pareil. Il passe son manteau par-dessus nos têtes, puis dans le noir, à l’abri de tous les regards, il me prend mon visage en coupe et il m’embrasse. Ce n’est pas un simple petit baiser mais au contraire, il prend bien son temps pour explorer toute la longueur de ma bouche.

Je n’arrête pas ce baiser, bien que je sache que ce n’est pas bien car je sais que je suis déjà avec Alexandre. Au lieu de cela, je le lui rends quand même. Contre toute attente, je ressens quelque chose. Quelque chose de si différents de tous les baisers que j’ai pu faire dans ma vie. Il est unique. J’ai envie de continuer ce baiser pendant une éternité, mais quelqu’un enlève le manteau révélant nos lèvres collées les unes contre les autres. Nos deux sœurs respectives nous regardent comme si nous étions devenus des extraterrestres avant de s’écrier :

-Ils s’embrassent !

Elles explosent de rire en se disant que ce n’est pas possible. Je m’en veux de donner un si mauvais exemple à ma petite sœur, mais moi aussi je veux être comme toutes ces adolescentes et changer sans cesse de petit ami, de vivre sans penser aux conséquences, de ne penser à rien si ce n’est au moment présent.

-Je suis désolée, mais je ne peux pas.

-Tu as aimé, ne dis pas le contraire.

Oui, j’ai aimé ce moment, mais c’est mal. Alexandre m’aime lui aussi, plus que Rémi. Et Alexandre n’est sûrement pas en train d’embrasser des jeunes filles sous son manteau comme moi. Je dois lui être fidèle. Non, franchement je ne peux pas. Rémi m’est interdit. Et même s’il est très différent d’Alexandre, il n’est toujours pas celui qu’il me faut réellement. Ce n’est toujours pas Maxence. Il n’est toujours pas l’homme que je préfère plus que tout au monde, il ne passe même pas avant Alexandre dans mes priorités. Rémi n’est pas celui qui me rendrait heureuse malgré tous les efforts qu’il ferait. Comme Alexandre, Rémi ne me comblerait pas. Alors pourquoi choisir si cela fait déjà plusieurs mois que le choix s’est arrêté ?

Je n’ai jamais dit à personne que durant un moment, j’avais envie de quelqu’un d’autre qu’Alexandre et Maxence. Que j’avais embrassé quelqu’un d’autre que mon copain. J’ai tout gardé au fond de mon cœur, et Rémi a fait pareil je suppose car plus jamais il ne m’a parlé de ce baiser. Il est passé à autre chose tandis que moi, je suis restée sur place.

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