Décembre 2010

7 minutes de lecture

Les premiers flocons de neige commencent à tournoyer dans les airs. C’est tellement beau la neige. Comme si le sol se recouvrait de son magnifique manteau blanc sans tâches.

Noël approche à grands pas, et comme les vacances viennent de commencer, ça n’a fait qu’augmenter notre impatience à être à l’une des plus grandes fêtes chrétiennes.

Etant donné qu’Alexandre part une semaine chez son père, je passe une nuit là-bas, en guise d’adieu. Mais je ne me sens pas très bien. J’ai la nausée, je me sens fiévreuse. Mais je ne peux plus annuler et faire marche arrière. Alexandre serait tellement déçu si je ne le vois pas une dernière fois avant son départ qu’il ne me parlerait plus pendant des jours et des jours. Alors comme prévu, il passe me chercher avec sa mère pour que nous allions chez lui.

Le trajet en voiture est calme. Je ne suis jamais à l’aise en présence de sa mère, alors il allume la radio pour qu’il y ait un bruit de fond. Sur le coup je me demande si c’est fait exprès ou non, car il s’agit de Let it be des Beatles, que j’ai l’habitude de jouer et chanter sur mon piano. Mais j’opte plus pour la coïncidence, il n’aurait pas mis une musique pour mon propre plaisir.

Arrivés chez lui, j’enlève mon manteau et mes chaussures et je me mets à l’aise, comme si j’étais chez moi. Après tout, c’est ce qu’on me demande de faire. Je m’installe dans l’un des fauteuils qui se trouve face à la télé et je sers mes genoux contre moi pour essayer de faire passer ma nausée.

Alexandre vient à côté de moi, il me murmure quelque chose à l’oreille. Je n’entends pas, je ne sens que de brefs chatouillis.

-Tu viens dans ma chambre ? J’ai quelque chose à te faire montrer …

Etant donné que nous sommes chez lui, je fais ce qu’il me demande de faire. Je me lève et je l’accompagne dans sa chambre d’un pas mal assuré. J’ai mal au ventre, c’est comme si j’allais avoir mes règles, mais la douleur ne va qu’en s’amplifiant. J’ai mal et je sens que je vais m’évanouir dans peu de temps.

-Assis toi là.

Il me fait montrer le lit.

-Tu veux qu’on regarde un film ?

Personnellement, je ne veux rien faire. Je veux juste dormir. Dormir et c’est tout. Pour me réveiller de meilleure humeur et en meilleure forme surtout. Je lui dis que oui. Comme ça, je pourrais dormir pendant le film et il ne le remarquera pas.

Je m’installe dans son lit comme à sa demande, sous la couverture et je plonge ma tête dans son oreiller. Il pue mais j’ai la flemme de relever la tête. Il a au moins la qualité d’être bien frais, ça soulage mon mal de crâne.

-Je mets 28 jours plus tard. Tu ne l’as jamais vu et comme c’est un film à voir absolument … m’explique-t-il

Il vient à côté de moi alors que la bande d’annonce laisse place au film. Au départ, j’entends des singes hurler. Je n’y prête aucune attention. J’ai les yeux fermés, je ne vois que du noir, j’entends Alexandre rire.

-Tu sais ce que j’ai envie faire ?

Je ne réponds que par un vague « Mmmmh » qui ressemble plus au bruit d’une baleine échouée sur la plage qu’à un son humain.

-J’ai envie de te faire hurler comme ces singes.

Mes yeux se rouvrent subitement. J’ai compris ce qu’il veut faire, mais je n’en ai aucune envie moi. Pas maintenant, pas tout de suite. Je me sens trop mal.

-Ecoute Alex … Je ne me sens pas bien aujourd’hui. Je dois couver quelque chose. Si ça ne te dérange pas, je vais me reposer un petit peu pendant que tu regardes ton film, d’accord ? Je te laisserais tranquille, tu n’auras même pas à te soucier de moi.

Il ne me répond que quelques minutes plus tard :

-Pourquoi c’est toujours toi qui doit décider de ce qu’on doit faire ou non ? Pourquoi on ne peut pas faire un peu ce qu’il me plait à moi aussi ? Je ne suis pas d’accord, tu vas ouvrir grands tes yeux et arrêter de faire semblant d’être malade. Aujourd’hui, tu fais ce que je te dis.

C’est la première fois qu’il me parle de cette façon, aussi méchamment. J’ai envie de lui demander de se calmer pour qu’il reprenne ses esprits, mais en faites, il semble très sérieux en me hurlant dessus. Il me fait même peur.

Les cris ne cessent pas à la télé. Pas étonnant vu l’invasion de zombie qui se prépare.

-Alors ?

-Alors quoi ?

-Bah déshabille-toi.

-Non je n’ai pas envie, je ne me sens pas bien, je lui répète comme si je m’adressais à ma sœur qui ne comprend jamais rien la première fois qu’on lui dit les choses.

Je ferme les yeux, et lui tourne le dos pour bien lui faire comprendre que je ne veux pas et que la discussion est terminée. Mais je l’entends s’assoir sur son lit. Son visage se rapproche du mien. Il me remet allongé sur le dos comme si j’étais une simple poupée de chiffon. J’ouvre les yeux, j’ai encore plus la nausée qu’avant. Je crois que je vais vomir.

-Laisse-moi tranquille.

Je crie presque en le suppliant d’arrêter, mais il me met sa bouche contre la mienne pour m’empêcher d’appeler sa mère. Je ne peux plus faire semblant d’avoir envie. J’ai l’impression que ses lèvres s’appuient tellement sur ma bouche que je ne peux plus respirer. J’ai envie de pleurer, mais je ne veux pas lui donner ce plaisir là. Je retiens mes larmes comme je le peux, mais sans doute quelques unes sortent sans y être invitées.

-On va faire un jeu, d’accord ?

Je n’ai pas le loisir de lui répondre, je n’ai même pas le loisir de prendre mes jambes à mon cou pour me sauver. Il déboutonne ma jupe écossaise et me la retire. Il enlève mon shorty avec sa bouche. Ses manières me révoltent, j’ai envie de partir, mais je suis comme pétrifier et je n’ose plus bouger.

-Arrête, je t’en prie. Laisse-moi partir, murmurai-je d’une voix faible.

-C’est moi qui décide aujourd’hui.

Il s’allonge sur moi et me colle de nouveau sa bouche contre la mienne. J’ai envie de crier après sa mère, après sa sœur, après n’importe qui pourvu qu’on vienne l’arrêter, mais sa bouche me gêne. Je ne peux appeler personne, personne ne m’entendrait. Il m’embrasse avec une envie telle qu’il m’arrache presque la bouche. J’essaie de me défendre, mais je perds toutes mes forces quand je sens un doigt me rentrer dedans. La douleur affreuse est revenue en moi alors que la fois précédente elle avait disparu complètement. Je ne comprends pas, je pensais que c’était terminé. Il entre en moi encore et encore avec ses doigts, on dirait qu’il appuis sur une sonnette. Si seulement il savait à quel point il me fait mal, il cesserait surement. Je ne sais combien de doigts sont en moi, j’ai l’impression qu’il a mis toute sa main entière, j’ai l’impression qu’il m’arrache une partie de moi, une partie de mon cœur. Mais s’il fait ça, c’est parce qu’il m’aime et que j’ai des devoirs envers lui. Pourquoi d’autre sinon ?

Puis quand il s’arrête, il se met sur le côté. Il s’allonge, j’ai la respiration courte, comme si je venais de courir. J’ai peur, j’ai mal, j’ai envie de pleurer. Je regarde vers Alexandre, il semble qu’il regarde le ciel. Que peut-il bien lui dire au ciel ?

-Tu n’as pas envie de moi, c’est ça ?

-Pas ce soir. Je réponds d’une voix qui tremble.

Il enlève sa ceinture, je le vois enfiler un préservatif.

-Qu’est-ce que tu fais ?

Il ne me répond pas. Il revient s’assoir à moitié nu à califourchon sur moi.

-Tu n’as pas envie, moi si. Alors tu te laisse faire et tout ira bien.

Je ne l’ai pas connu comme ça. Je l’ai connu comme étant mal à l’aise dans sa peau, comme étant timide et sympathique avec un peu tout le monde. Alors qu’est-il advenu du garçon compréhensif qu’était mon copain ?

Comme à ce qu’il m’a demandé de faire, je ne l’empêche pas. Il met mes jambes d’une drôle de manière pour qu’il ait accès à toutes les parties de mon corps. Je ne peux plus bouger, je ne peux plus me débattre et je ne peux toujours pas appeler de l’aide. Je ferme les yeux alors que son dard entre en moi, et je m’imagine à la plage, au fond de l’eau, je m’imagine qu’il y a des litres au dessus de ma tête et que je coule tout au fond. Je me noie. Alexandre n’existe plus. Il n’est plus là. Il est loin de moi. Il n’existe plus dans ma vie, moi non plus je n’existe plus.

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