Chapitre 7 - La Flasque

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25 Avril 2020, Londres, cinq jours plus tard, un mois avant la mort de Philippe Mercier

L'ascenseur monte dans un ronronnement cotonneux. Le standing du One Canada Square est impressionnant. Quand l'appareil s'immobilise délicatement, une voix britannique synthétique annonce "Trente septième étage, ouverture des portes". Frédéric sort de la cabine métallique et observe les alentours. Deux gorilles en costume trois pièces font le pied de grue devant une porte à double battant de bois sculpté. L'ambiance art déco de cet étage contraste avec la froideur contemporaine du rez-de-chaussée.

Hel, pourtant l'un des plus dangereux tueurs à gages qu'ait connu le dernier demi-siècle, marche avec indécision vers son prochain contrat. Aura-t-il la force de l'exécuter? En a-t-il seulement envie ?

"Johana Brown, 1970, Londres, 5.000.000$"

Johana, Jo, son amour de jeunesse est derrière cette porte. Et quelqu'un veut sa tête. Il dégaine Faucheuse et tire par deux fois. Les gardes du corps s'effondrent sans avoir eu l'opportunité de réagir. Frédéric empoigne fébrilement la poignée dorée, et pousse le lourd vantail de chêne. Le battant s'ouvre sur un loft magnifique, cintré de baies panoramiques donnant sur le quartier d'affaires de Londres. Le jour est déjà bas et les innombrables scintillements artificiels de la fourmillante city illuminent le crépuscule. Face à lui trône majestueusement un bureau aux allures d'autel. Lui tournant le dos, un thé fumant à la main, une femme observe le ballet des phares dans la nuit.

  • Je ne pensais pas qu'il irait jusqu'à te payer toi pour me tuer, dit-elle sans se retourner.

Faucheuse à la main, Frédéric avance en silence. Johana porte une superbe robe de soie pourpre qui épouse ses formes de femme mûre soigneusement entretenues. Les anciens amants ne se sont pas revus depuis cette nuit tragique. Il sait que Johana n'est plus la jeune étudiante fragile qui cherchait refuge dans ses épaules carrées. Peut-être même s'est-il jeté dans la gueule du loup et des tueurs n'attendent-ils qu'un signe de la reine de la pègre pour le faire disparaître. Frédéric porte encore les stigmates du jour où ses actions avaient contrarié la Duchess. Un contrat anonyme qui déstabilisa un deal d'héroïne important du Syndicate. Vingt-quatre heures de souffrances dans une cave, deux dents et plusieurs côtes cassées. D'un simple appel, elle pouvait décider de sa vie ou de sa mort. Ce jour-là, il n'avait dû sa clémence qu'à leur passé commun. Qu'en serait-il ce soir ?

  • Pourquoi m'as tu abandonnée, Fred ? demande-t-elle en tournant sa tête.

À son cou brille le pendentif, au coin de ses yeux luisent de minuscules perles prêtes à fuir le long de ses joues.

  • Je ne t'ai pas abandonnée, Johana, c'est toi qui m'as trompé, réagit Frédéric en pointant Faucheuse vers elle.
  • Tu n'as toujours rien compris ?
  • Compris quoi ?

Elle ouvre le pendentif, et regarde la photo jaunie de son seul amour sincère. Son poing se ferme sur le bijou.

  • M'aurais-tu aimée sans le pouvoir du pendentif ?
  • Je n'ai jamais cessé de t'aimer Johana, et tu as piétiné cette affection.
  • Fais ce que tu as à faire, ça n'a plus d'importance, dit-elle en fixant à nouveau à travers la fenêtre.

Deux larmes auréolent la robe de soie tandis que Johana attend le dernier battement de son cœur.

  • Qui veut ta mort ? Pourquoi m'envoyer moi ?
  • Il me tient, Fred, je n'ai plus le choix. Je suis censée l'appeler maintenant, lui dire que tu es là. Il nous veut tous les deux, mais ne savait pas comment te trouver. Il a tout sous la main pour me faire tomber. Apparemment mes hommes de main les plus proches ont été très loquaces. En venant ici, tu lui as servi ce qu'il voulait sur un plateau.
  • Mais qui bon sang ? demande Frédéric en perdant patience
  • Polyphème
  • Qu'est-ce qu'il nous veut ?
  • Qu'avons-nous en commun ?

Frédéric regarde Faucheuse, puis ses yeux se posent sur le pendentif de Johana. Les sceaux, c'étaient forcément les sceaux.

  • Qu'est-ce qu'il a contre toi ?

Johana désigne un dossier gisant sur le bureau.

  • C'est arrivé hier par courrier anonyme.

Frédéric saisit les feuillets, et son visage se décompose à mesure qu'il les parcourt. Il referme le dossier et le remet à sa place. Un lourd silence s'installe. Frédéric tourne subitement les talons et s'en va vers l’ascenseur. Alors que les portes s'ouvrent, il se tourne vers elle.

  • Je ne le laisserai pas te détruire.

Johana s'élance vers Frédéric et, détournant son attention par un langoureux baiser, glisse secrètement le pendentif dans la poche de sa veste. Le plus sincère baiser qu'elle ait donné depuis trente ans. La porte de l’ascenseur s'ouvre, Frédéric s'y engouffre. Il fixe Johana pendant que les volets de métal se referment sur son ancien amour, comme une monstrueuse mâchoire métallique. Johana soupire, son destin est scellé. À cet instant, un peu partout dans le monde, les hommes et femmes lésés par le pendentif perdent des morceaux de mémoire, et en retrouvent d'autres. La supercherie de la Duchess est tombée, rages et colères donneront bientôt naissance à de terribles vengeances.

Johana ouvre le tiroir de son bureau, dans lequel gît le Beretta de son mari défunt. Elle défait le cran de sécurité, et fait feu sur la baie vitrée. La détonation, assourdissante, résonne dans l'espace ouvert du trente-septième étage. L'impact du projectile à bout portant fait exploser la vitre securit de la baie. Johana s'approche du rebord. L'humiliation ou la mort. Elle ferme les yeux, puis se laisse tomber dans le vide.

Lorsque Frédéric sort de l'ascenseur, de nombreux badauds sont agglutinés à la sortie de l'immeuble. Une clameur indistincte transcrit l'horreur et l'impuissance face au spectacle du corps disloqué de Johana sur le trottoir. Frédéric retient un cri de douleur en serrant les dents puis s'éloigne au plus vite en forçant une démarche naturelle. À une distance suffisante, il se précipite dans une allée d'immeuble en alcôve, et laisse enfin sortir le hurlement de désespoir et de regret qu'il a contenu. Pour la première fois depuis bien longtemps, Hel pleure.

***

15 Juin 2020, Saint Petersbourg, deux mois plus tard

  • Voilà grosso modo où j'en suis, conclut Frédéric. Ce Polyphème cherche les sceaux. Francesca et Johana l'ont payé de leurs vies. Votre incursion involontaire a perturbé son plan, mais il ne reculera devant rien pour les obtenir. Dimitri et Thomas sont en danger, nous devons les prévenir.

Nous restons silencieux. La situation est plus compliquée que prévue. À nous trois, nous portons quatre sceaux. Or quelqu'un les veut à tous prix, quelqu'un de peu recommandable, si on en croit Frédéric. Nous sommes donc une cible idéale. J'en viens à me demander pourquoi nous nous sommes embarqués là dedans.

  • D'après la lettre de Philippe, Dimitri doit habiter juste à côté, commence Helena. Nous avons suivi cette piste car nous ignorions presque tout de cette histoire. J'espérais qu'il pourrait nous en dire plus, mais je crois que vous venez de nous apprendre tout ce que nous espérions découvrir.

Nous nous dirigeons vers l'adresse supposée de Dimitri. En sortant de l'hôtel, nous longeons un canal aux abords huppés. Nous traversons un pont magnifique duquel on aperçoit un autre bâtiment aux imposants bulbes dorés, apparemment une cathédrale orthodoxe. Saint Petersbourg est décidément une ville qui mérite le détour, mais nous ne sommes malheureusement pas venus pour faire du tourisme. Nous longeons un quai ombragé et désert, avant d'arriver enfin à l'adresse indiquée. Le bâtiment détone par sa morosité. Rectangulaire, trois étages de murs couleur saumon délavé, une simple porte blindée marron à l'angle arrondi de la bâtisse. Pas d'interphone, pas de sonnette. Si près du but, nous voilà impuissants face à une simple porte.

Frédéric cogne contre le blindage qui résonne d'un sourd bruit métallique. Une femme corpulente se penche à la fenêtre du premier étage et nous hurle quelque chose d'incompréhensible. Helena bafouille une réponse en russe.

  • Nous, heu..., cherche Dimitri Aksionov.

Décidément cette fille est pleine de surprises. La fenêtre se ferme, des cliquetis suivis de pas traînants se font entendre derrière la porte de métal. Le grésillement caractéristique des verrous magnétiques crépite, puis le battant s'ouvre. Une femme âgée en net surpoids retient la lourde porte blindée en nous barrant le passage, et nous toise avec suspicion. Son visage est marqué et son nez gonflé, probablement par de longues années d'alcoolisme. Elle penche la tête par l'ouverture comme pour vérifier la présence d'hypothétiques espions, puis tend à Helena une carte de visite bien trop propre pour le standing de cet immeuble.

La vieille femme nous fait signe de partir, sans aucune sympathie. Elle claque la porte blindée, nous laissant sur le trottoir un bout de bristol à la main, guère plus avancés que tout à l'heure. Helena déchiffre avec difficulté le texte en cyrillique imprimé sur le carton, juste sous le logo de l'entreprise "All XSS".

  • Nous devons envoyer un mail à cette adresse, si j’ai bien compris. Une adresse et une heure nous seront transmises. Ce Dimitri ne nous facilite pas la tâche.

***

26 mai 1990, Nancy, il y a trente ans, le soir du pacte

Les sept membres du groupe sont encore un peu déstabilisés par la scène surnaturelle qu'ils viennent de vivre. Chacun a pris sa décision, accepté le pacte ou non, sans le partager avec les autres. Frédéric et Johana ont immédiatement pris le chemin du retour, Philippe et Marina sont en train de se saluer. Francesca fait un signe de la main à Dimitri et Thomas, avant de prendre la route à son tour. Le jeune Russe trébuche, se faisant rappeler à l'ordre par son genou. Lors de leur escapade à l'île de Ré, il s'était blessé peu avant le retour. Un plongeon de trop, un rocher trop près, l'eau n'avait pas suffi à amortir la vitesse de la descente. Depuis près d'un an maintenant, le solide Russe boîte.

  • Je te raccompagne ? demande Thomas
  • Oui merci, si ça ne t'embête pas.

Ils marchent silencieusement vers la 205 de Thomas. Une fois installés dans l'habitacle qui sent la poussière et le tabac froid, le jeune conducteur ouvre la conversation.

  • Quelle soirée, pas vrai ?
  • Ma mère me tuerait si elle savait ce qu'on a fait ce soir, répond Dimitri. Enfin, si elle était encore de ce monde.
  • J'ai trouvé ça plutôt amusant, moi, et puis il faut bien pimenter un peu la vie dans ce bled.

Dimitri n'a pas tellement d'avis sur la question. Balotté entre la Russie et les Etats-Unis lorsque son père Vassili a été déchu de ses droits par le parti soviétique, sa vie a toujours été un peu chaotique. Il est arrivé ici deux ans plus tôt, car la France représentait pour son père l'idéal du monde occidental. Même cette région moins ensoleillée lui paraît infiniment belle à côté des blockhaus des banlieues soviétiques. Bercé par le ronronnement de la petite Peugeot, il regarde défiler les pavillons individuels. Chaque propriétaire a ici apporté une touche personnelle à son bâtiment.

  • J'aime bien la vie en France. Je suis vraiment content de vous avoir rencontrés, et que tu sois mon ami.

Thomas se tourne vers Dimitri, sourit, et d'un hochement de tête lui fait comprendre que lui aussi. La 205 s'arrête devant une petite résidence, Dimitri descend, puis fait signe à Thomas de baisser la fenêtre.

  • Est-ce que tu crois que les autres ont accepté le marché ?
  • Je ne sais pas Dim', et même si je le savais, je ne pourrais pas te le dire.

Dimitri lui adresse un salut timide et, dépité, glisse ses mains dans les poches de sa veste en jean, et remonte l'allée en direction de son bâtiment. Thomas attend quelques secondes en fixant son ami, puis démarre en trombe avant de disparaître dans la nuit.

Lorsque Dimitri entre dans sa chambre, il retire ses grosses bottes en cuir, puis sort son paquet de cigarettes pour aller fumer sur le balcon. Le jeune Russe s'adosse, pensif, à la rambarde de son garde-corps. À chaque bouffée, il se demande quelles seront les conséquences de son choix. Quand cet objet mystérieux lui sera-t-il donné ? À quoi ressemblera-t-il ? A-t-il bien fait ? Il ne manque de rien, ses amis sont super, sa famille n'est pas à plaindre... Quel besoin avait-il de s'embourber dans cette affaire ? Le dernier millimètre de papier blanc se consume lorsqu'une brise attise la braise qui rougit au bout de son vice combustible. Il jette d'une pichenette le mégot dans la rue. La gerbe d'étincelles s'éteint peu à peu pendant la chute, puis le mégot rebondit enfin sur le bitume dans un bouquet final d'étincelles.

Songeur, Dimitri se décide à rentrer. Lorsqu'il se jette sur son lit aux draps en pagaille, quelque chose lui rentre dans l'omoplate gauche. Il grogne d'inconfort et fouille dans les plis désordonnés de sa literie. Ses mains identifient une sorte de bouteille, une flasque de poche. Que fait-elle ici ? Probablement un reste de l'une des soirées qui ont débuté dans sa chambre, oublié par un convive. L'étudiant n'a pas envie de s'encombrer de questions. Il dévisse le bouchon et en hume le contenu. Des effluves d'une vodka très aromatique s'en échappent. Dimitri en avale une lichée. Les arômes sont superbes et parfaitement équilibrés. Cette vodka est digne des meilleures que lui a fait goûter son père. Il en reprend une gorgée immédiatement. Puis une autre.

Depuis son accident et sa jambe boiteuse, Dimitri a commencé à consommer toute sorte de produits. Il cherche dans ces paradis artificiels une évasion à son mal être récent. Lui, sportif, casse-cou et aventurier, se trouve maintenant limité par son corps. De consommation récréative, de fumette sympathique entre amis, Dimitri a petit à petit basculé vers des produits plus forts, plus sombres, plus illégaux. Sa nature excessive l'a entraîné dans un cercle vicieux d'exagérations. Ses placards regorgent maintenant de petits sachets pleins de feuilles, de poudres et de cachets multicolores. Ses amis n'en savent rien bien sûr. Qu'en dirait Philippe le boyscout ? Francesca se lancerait sûrement dans un monologue sur les effets délétères des psychotropes sur l'organisme. D'ailleurs, elle aurait raison. Les mains de Dimitri tremblent parfois, et il peine à trouver le sommeil. Mais le déni l'emporte encore sur la réalité. Le liquide glisse dans sa gorge avec facilité, et sans aucune modération.

Allongé tout habillé sur son lit d'étudiant, la flasque de métal sertie de cuir posée sur le sternum, le jeune Russe rêvasse et s'interroge sur la soirée qu'ils viennent de passer. Lorsque Frédéric leur a annoncé qu'il avait découvert un vieux livre, il s'est joint au groupe autant par curiosité que par habitude. La maison abandonnée, leur QG, est un lieu dans lequel il a beaucoup de bons souvenirs. Les bâches de chantier blanches qui pendent de-ci de-là donnent au bâtiment un aspect fantomatique. Petit à petit, ils y ont amené mois après mois des bougies et des vieux coussins de récupération. C'est dans cette maison qu'ils sont passés de camarades de classe à amis, partageant au fil des soirs leurs histoires, leurs doutes, leurs douleurs. Le parquet usé y a connu nombre de parties de cartes endiablées entre les quatre garçons. C'est aussi là qu'un soir il avait vu Philippe voler un baiser à Marina. Et encore là que Francesca essayait tant bien que mal de faire rentrer le contenu des cours dans la tête butée de Frédéric.

Enivré par la liqueur de la flasque, Dimitri s'endort. Dans son rêve se mêlent les souvenirs de la maison, et les événements de ce soir. Le livre, la perte de conscience, Monsieur B., les regards coupables de ses amis, et l'offre qui leur a été faite. Lorsqu'il se réveille le lendemain, la douleur de sa jambe s'est tue. Il retire promptement son pantalon, et constate avec stupéfaction que la cicatrice de l'opération a également disparu. Sa vue s'est imperceptiblement améliorée, il ignorait même qu'il était légèrement myope. L'envie le brûle de saisir son téléphone et appeler son ami Thomas, mais les règles sont strictes et claires :

Ne pas évoquer le sceau ou le marché.

***

1992, Moscou, deux ans plus tard

Lorsqu'il sort de la zone internationale de l'aéroport de Moscou, Dimitri cherche son père des yeux. Il a à peine le temps de se retourner qu'il se trouve immobilisé par une étreinte digne d'un ours. Une voix enjouée doublée d'un rire rauque lui hurle dans l'oreille.

  • Comme tu es beau mon fils !

Sur le chemin entre l'aéroport et l'appartement de location de son père, c'est un long échange autour de l'éducation en France, du succès du roman Une saga moscovite, et le retour au pays de Vassili après neuf ans d'exil. Puis l'annonce, soudaine, cruelle et implacable, de son cancer du poumon. L'enjouement laisse place au mutisme.

Enfin arrivés dans le petit appartement, les deux hommes se font face autour d'une minuscule table en formica. Le silence est pesant sous la lumière jaune et blafarde de l'ampoule qui montre des signes de fatigue. Ni l'un ni l'autre ne sait vraiment comment briser la glace. Dimitri finit par ouvrir la conversation dans la langue des tsars.

  • Est-ce qu'on t'a dit si c'était grave ?
  • Les docteurs ne me donnent que quelques années, mais avec un peu de chance, la vodka m'aura tué avant ! ironise Vassili en forçant un rire qui se termine en une une toux grasse et inquiétante. Et tes études alors, tu vas être un vrai homme d'affaire de l'ouest ? Ta mère serait fière de toi.
  • Oui, la remise des diplômes est dans quelques mois, je ne sais pas encore ce que je vais en faire.

Dimitri marque une pause. Il se lève pour chercher la flasque dans son sac à dos.

  • Je te propose de porter un toast à mon diplôme ! dit-il en fouillant dans les placards de la cuisine pour chercher de quoi servir.

Il trouve deux petits verres couverts de calcaire, les pose sur la table, et verse un peu du contenu de la flasque dedans. Le choix n'est pas innocent. Depuis deux ans, Dimitri a eu le temps de constater que ce n'est pas une flasque ordinaire. Elle aurait dû être vide depuis bien longtemps. Pourtant, par un étonnant mystère, elle ne se tarit jamais. Plus étonnant encore, le goût de son contenu change selon les jours. Mais le plus inexplicable reste l'effet qu'elle produit sur celui qui consomme sa liqueur inconnue. Au cours de ces deux années, il a eu le temps de dépasser plusieurs fois des doses de stupéfiants qui auraient dû le réduire à l'état de légume. Pourtant chaque fois la flasque l'a sauvé. Comme elle le protège encore de tous ses excès, alimentaires ou sexuels. Plus accro que jamais à ses psychotropes, Dimitri n'en est pas moins dans une forme olympique, qui pourrait rendre jaloux un nutritioniste extrémiste.

  • Grands dieux, cette vodka est superbe ! s'exclame Vassili en admirant son verre partiellement vidé. Où as-tu acheté cette merveille ?
  • C'est un cadeau d'un ami, je la sors pour les grandes occasions. Et il m'a semblé que c'en était une, non ? répond Dimitri en souriant.

Vassili sourit, pensif, il lève à nouveau son verre en fixant son fils dans les yeux, fier comme un père peut l'être, puis avale d'une traite le restant de liqueur.

  • Za vashé zdorovié !

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