Chapitre 4 : Leivors

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Kean observa une fois de plus son arme, sans oser regarder les nouvelles informations collectées. Depuis les derniers affrontements, ils n'avaient rencontré personne et rapidement seul le bruit de leurs pas venait rompre le silence qui s'était installé. Du point de vue du jeune homme, chaque embranchement ressemblait au précédent et le trajet lui paraissait interminable, lui laissant tout le temps de réfléchir sur sa situation.

— Vous ne m’avez toujours pas dit ce qu’on ferait une fois sorti de la ville, si on parvient à en sortir.

— On tâchera de sauver l’espèce humaine.

— Ça c’est peine perdue.

Le regard que lui renvoya l'antiquaire le troubla. Il ne parvenait pas à identifier cette sensation, mais elle lui déplut.

— Vous ... vous êtes sérieux ? Mais que voulez-vous sauver ? Ils se condamnent tous seuls ! Ils nous condamnent !

— Ils ont peur et je les comprends. Les choses ne sont pas ainsi sans raisons.

— Et quelles sont ces raisons ?

— Nous sommes des Leivors.

— Me regardez pas dans l'attente que je vous interroge. Dites-moi directement ce que ça signifie, on gagnera notre temps.

— Des violeurs. Aux yeux des autres peuples, nous sommes des violeurs. Nous avons été condamnés pour profanation de la vie.

— Et donc on nous a dépourvu de nos émotions, sensations, … ?

— On nous a imposé une conduite stricte pour nous maintenir en vie, rien de plus.

— Ça n’a pas de sens, … je comprends pas. Dans ce cas, pourquoi on échappe à cette punition ?

— On nous laisse une seconde chance.

— Qui ça « on » ? Qui nous a punis ? Qui décide de notre conduite ?

— Les peuples du nouveau monde.

— Ca vous amuse de me balancer des termes sans les développer ? C'est quoi cette histoire de nouveau monde ?

— Il s'agit du monde que nous avons créé avec les quatre autres anciens peuples en nous entretuant. Ce monde résulte de nos crimes.

— Vous parlez d'anciens et de nouveaux peuples, mais de qui s'agit-il ? Je n'ai rien vu de tout ça.

— Patience, tu le découvriras en sortant du dôme.

— Vous le faîte exprès ?

— Pardon, il y a bien longtemps que je n'ai pas discuté de ça avec quelqu'un. Ca me parait tellement évident. Il existait par le passé, cinq peuples : les humains, les métamorphes, les élémentaires, les cybertecks, des êtres robotiques et les symbiozs. Ces cinq peuples partageaient des avis divergents sur la gestion des ressources naturelles ce qui a conduit à de nombreuses guerres. Des espèces plus jeunes apparurent et lassées des querelles incessantes et de la destruction de la planète, elles maudirent les cinq clans et les enfermèrent chacune dans un dôme. La suite, tu la connais.

— Donc toutes ces règles sur la nocivité des émotions mais leur importance dans la civilisation, c'est du vent ?

— Il s'y cache tout de même une part de vérité.

— Et en quoi consiste cette seconde chance dont vous parliez tout à l'heure ?

— Une fois par siècle, un candidat de chaque peuple déchu est sélectionné pour redonner aux siens leur essence vitale.

— Nos émotions et sensations ... Mais si je suis ce candidat, qui êtes-vous ?

— Je suis un gardien. Pour chaque peuple déchu, il existe deux gardiens, un homme et une femme. Nous ... Nous sommes des survivants de la dernière grande guerre, maintenus en vie par la malédiction pour transmettre aux nôtres nos connaissances.

— Vous voulez me faire croire que temps qu'on sera maudit, vous serez immortel.

—C'est ça, bien que je préfère ne pas penser à une telle éventualité.

— Je ne peux pas croire une telle chose.

— Tu y croiras, à ça et à bien d'autres choses qui te paraissent inconcevables.

— Admettons, que suis-je sensé faire pour rendre à l'humanité ce qui lui manque ?

— Dans un premier temps, nous t'apprendrons à survivre. Lorsque tu seras suffisamment prêts, nous te présenterons aux autres races. Ca ne sera pas facile, plus le temps passe, plus elles s'opposent au retour des anciens clans et des votes ont souvent lieu pour débattre de l'utilité de nous laisser une seconde chance, ça pourrait bien être la dernière. Quoiqu'il en soit, tu devras comme eux passer le Sacrement, c'est une épreuve cruciale. En tant que déchu, si tu échoues, tu meurts.

— Et que se passe-t-il si, je réussis ?

— Je l'ignore. Aucun des clans déchus n'a encore réussi à ce jour.

— Donc, pour résumer : si je reste, on me veut mort et si je pars, aussi.

— Tu regrettes ton ancienne vie ?

— Pas vraiment, à vrai dire, je suis curieux. J'ai envie de voir ce nouveau monde et ses habitants ainsi que les autres anciens peuples.

— Bien nous sommes arrivés.

— Je ne vois rien.

— Effectivement, c'est la raison pour laquelle j'ai choisi ce lieu. Il est reculé et plus important, la roche qui se trouve ici bloque les détecteurs des Traqueurs.

— Donc, depuis tout à l'heure, on ne recherche pas une sortie. Mais vous êtes en moyen d'en créer une ?

— C'est exact. Grâce à ce téléporteur.

— Je ne vois rien d'autre qu'un pendentif circulaire avec des inscriptions.

— Une dernière question avant d'y aller : as-tu peur ?

— Comme si je savais ce que c'était.

— Lorsque nous serons hors du dôme, tu retrouveras progressivement ton intégrité, tu devras apprendre à vivre avec tes émotions, sentiment et sensations. Et crois-moi, être humain, c'est pas chose aisée. 

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