Entourée par trente canards, Josette était assise en tailleur sur son lit. Ses enfants avaient grandi, elle était fier. En prononçant leur prénom à voix basse, elle les regarda un à un et, sereine, elle ferma les yeux.

 Mains posées sur les genoux, immobile, la veille dame méditait. Elle songeait à sa petite fille qui s’était éloignée des réalités de la vie, à cause des dix millions d’euros qu’avait gagné Nicolas au Loto.

 Quant à son fils, absorbé par son travail, ça faisait plusieurs mois qu’il ne lui avait pas donné de ses nouvelles.

 Elle eut également une pensée pour Monique, sa merveilleuse voisine.

 Sa respiration devint plus calme. Elle était en conversation avec le Grand-Canard. Silencieux, ses enfants la contemplèrent.

 Trois heures passèrent.

 Normalement ses séances de méditation n’étaient pas aussi longues. Inquiet, Pero avança, puis doucement, il plaqua sa tête contre la poitrine de sa mère : son corps était froid et son cœur ne battait plus.

 Josette était morte.

 Triste, il poussa plusieurs cris. Ses frères et sœurs l’imitèrent, et tous sur le même rythme, se mirent à claquer du bec.

 D’un coup, en entendant une voix familière, ils se figèrent et comprirent.

 Josette avait abandonné son corps, pour demeurer à leurs côtés. L’Impensable venait de commencer, et ils se rappelèrent des Consignes.

 Les canards se jetèrent sur le corps de leur mère. À coup de bec, et avec leurs dents aiguisées, en quelques secondes, ils la dévorèrent. Lorsqu’il ne resta que le squelette, ils quittèrent la chambre pour s’envoler dans le ciel.