Augustin ne s’y habituait pas vraiment. À chaque fois qu’un message d’Anna arrivait, il ressentait une vive douleur dans son dos. Sa tache de naissance en forme de canard le faisait souffrir. Machinalement, pour toucher son omoplate, il glissa sa main droite sous ses vêtements. Avec son majeur et son index, en faisant pince, il retira de sa chair un petit bout de papier ensanglanté.

— Mon amour, Lars, Björn et Kaia ont éclos. Ils sont beaux et gourmands. Heureusement que Mère-grand est là. Elle assure pour une vieille. J’aimerais te revoir. Tendrement. Anna.

Au sommet de la roche de Solutré, Augustin était seul. Heureux, il rangea le message dans la poche de son jean, puis il contempla le paysage. Les vignes qui s’étendaient à perte de vue l’apaisaient.

 Depuis qu’il avait rencontré Anna, il se sentait en marge de ce monde pourri.

 De sa veste, il sortit un calepin et avec un crayon, en s’appliquant, il écrivit :

— Je viendrais la semaine prochaine. J’ai réservé un billet de train. J’ai hâte de voir nos canetons.

 Augustin, froissa le morceau de papier pour former une petite boulette, puis dans sa tête, il formula une phrase : « Oh, Grand Canard, cette missive est pour Anna. »

 Doucement, il porta le morceau de papier à sa bouche et d'un coup, il le goba.