L’engueulade

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En fait, les sorties nocturnes m'épuisaient, j'avais abandonné le foot après avoir perdu ma place en équipe première, et la graisse commençait à sérieusement s'installer sur ma ceinture abdominale, et tout mon moral s'en ressentait.

Je retournais donc voir mon ami curé.

À ma grande surprise, au lieu de me recevoir, comme d'habitude avec un grand sourire, il m’accueillit avec une engueulade :

Il me dit : la dernière fois, je vous ai donné ce que vous cherchiez, et ce que cherche la grande majorité des hommes, à savoir une technique pour satisfaire leur ego et leur compagne.

- Vous vous doutez bien de ce que cela vous aurait coûté si vous aviez dû passer par des professionnelles.

Vous avez amélioré votre connaissances dans les boites de nuit, mais en fait, vous n'avez fait qu'ajouter de nouveaux savoir-faire et de nouveaux accoutrements.

En clair, nous vous avons fourni un clavier, vous avez appris à en utiliser les touches d'une façon efficace, mais vous ne faites rien de plus que ce qu'une machine pourrait faire.

Et tout cela dans l'espoir d'obtenir quelques applaudissements en fin de prestation.

À votre place, beaucoup d'hommes pourraient s'estimer très satisfaits de vos résultats, et passer à autre chose. Le problème, chez vous, c'est que vous n'aimez pas les femmes, et peu les gens en règle générale.

L'histoire que vous m'avez racontée lors de notre première rencontre montre que vous ne craignez pas d'humilier, de maltraiter et enfin d'abandonner une personne qui vous a fait une entière confiance.

Vous utilisez un motif futile que vous montez en épingle pour vous débarrasser de votre partenaire et vous donner bonne conscience. Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage. C'est nul.

Vous accusez votre mère qui vous loge, vous nourrit, vous subventionne, d'être responsable de vos comportements, ce qui traduit pour le moins chez vous, un manque total de maturité.

Maintenant, vous avez fait le tour du sujet, et vous tournez en rond. Vous êtes dans une impasse, et vous ne vous en sortirez pas en faisant plus ou mieux ce que vous faites déjà actuellement.

Il vous faut désapprendre, vous des-automatiser, en un mot, vous humaniser.

Vous voyagez sous une carapace. Une véritable armure.

Ce qui devrait provoquer chez vous un état émotionnel, se traduit en retour par une réponse sarcastique, humoristique, voire agressive.

Rien ne passe.


- Je lui dis que j'étais en cours de psychanalyse, et que j'en espérais de gros progrès.


- Je souhaite beaucoup de courage à votre psy, car avec un client comme vous, qui m'a avoué avoir menti à Dieu lors de toutes ses confessions, il a peu de chances d'obtenir autre chose que des inventions de votre part.


Je lui demandais, par quel miracle, il pouvait prétendre avoir des connaissances en psychologie, et prédire l'échec d'un traitement. Et j'en profitais lâchement pour lui demander s'il était le mieux placé pour traiter de l'égalité homme femme.


- Mon fils, vous ne comprenez pas l'outil fabuleux que représente le confessionnal.

Il n'est pas le lieu unique ou le pécheur peut effacer ses péchés en communiquant avec Dieu.

C'est le lieu ou il se confie volontairement et sans entrave. Il est inconnu, et ses paroles ne lui seront jamais attribuées.

L'officiant ne connaît pas la personne qui lui fait face, mais rapidement il reconnaît sa voix et son histoire.

Certains viennent ici uniquement pour effacer quelques péchés, mais nombreux sont ceux qui sont dans l'attente d'une aide, d'un conseil, leur permettant de changer leur vie. Ils ont certainement préparé une partie de leur intervention, mais il suffit de les inciter à en dire plus pour qu'ils se lancent.

Pour ma part, continua le curé, cela fait quarante ans que j'écoute mes paroissiens, c'est à dire des hommes et des femmes qui ont des besoins non liés directement à leurs péchés.

Cela fait quarante ans que les curés travaillent entre eux sur ces sujets lors des fameuses réunions Bêtisier du Confessionnal.

Et, qui va gagner dans la confrontation ? Un psy qui nous connaît, devant qui vous allez hésiter à vous confier, ou un homme qui ne vous connaît pas, qui est le représentant de Dieu, et que l'on est venu consulter librement, sans rendez-vous préalable ?

Maintenant, en ce qui concerne l'égalité homme femme, nous la respectons à notre niveau.

Notre aide matérielle est limitée à ce que nous pouvons réellement apporter : la semaine prochaine nous avons une réunion « Le bêtisier du confessionnal », et j'en profiterai pour exposer votre cas.

Avec un peu de chances, on me fournira une solution que vous pourrez tester.


Je luis demandais pourquoi il avait accepté de m'aider, alors qu'il me jugeait incapable d'agir dignement.

Il me répondit que l'église aidait les personnes sans discrimination, en prenant en compte seulement les besoins qu'elle se jugeait capable de combler.

Une histoire d'amour avec les gens dans le besoin.

Il me dit aussi que je me trompais si je considérais le clergé comme un groupe de personnes agissant dans son propre intérêt, bravant les interdits religieux les plus graves en utilisant la confession pour évacuer les problèmes.

L'église, dans notre pays, est dans une position intenable. Les églises sont vides, elles sont plus des musées à visiter que des centres de culte. Les curés et les fidèles disparaissent avec le vieillissement de la population. Les vocations sont en berne.

Dans les pays d’Amérique du Sud, les églises sont pauvres, mais pleines. On y chante, on y danse , on y est jeune, et les fidèles sont naturellement incités à y entrer et à y participer.

J'espère, me dit-il, que vous comprenez les raisons qui amènent les curés à se rassembler, à faire cause commune, pour éviter le délabrement local de notre institution.

Avant de le quitter, je lui demandais s'il souhaitait que je me confesse, sur quoi il me répondit qu'il n'avait pas le temps d'entendre une deuxième fois raconter toute mon histoire, et que dans l'état d'indignation qu'il éprouvait, Dieu pourrait m'infliger une punition que je ne serai pas capable de subir.





FIN 1ERE PARTIE

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