Chapitre 3

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 Dan se réveilla dans un lit qu’il ne connaissait pas. En regardant autour de lui, il commençait à reconnaitre cette pièce dans laquelle il était déjà venu quelques fois auparavant. C’était la chambre de la famille de Lewis, une petite pièce meublée d’un lit, d’une armoire et d’une table de chevet. A en juger depuis la lumière qui traversait la fenêtre, il devait être dix ou onze heures du matin.

 Bien qu’il n’ait pas récupéré toutes ses forces, Dan se leva tout de même et se dirigea vers le salon. Il devait avoir des réponses sur ce qu’il s’était passé. Il y trouva Lewis assis sur le canapé aux côtés de sa femme, tous deux semblant fatigués. En voyant arriver Dan, les deux regards se levèrent vers lui. Dan se sentit rassuré de ne pas y discerner le sentiment de tristesse et de douleur que l’on ressent après avoir perdu un être cher, ses parents devaient donc être vivants.

 « Tes parents ont été internés dans un hôpital de la ville. » commença Lewis après un long moment de silence. « Ils sont vivant, ont survécu aux blessures, mais les grosses pertes de sang les ont gravement affectés… Ils ont été placés sous perfusion, mais sont toujours inconscients… »

 Lewis n’avait pas fini sa phrase, mais le silence qui en suivit était fortement explicite : on ne sait pas s’ils pourront se réveiller. Dan était déchiré entre un soulagement profond de savoir ses parents vivants et la douleur de savoir qu’il ne pourrait peut-être jamais les revoir. Après avoir remercié ses deux sauveurs, il mangea un repas que ces-derniers lui avait préparé avant de sortir dans la rue.

 Dan devait aller en cours ce jour-ci, mais ce n’était pas envisageable au vu des récents évènements. Il erra quelques minutes en pensant à ses parents, à la façon dont il allait devoir vivre, au manque d’argent qui se ferait sentir assez rapidement… Lewis et sa femme lui avaient proposé de l’héberger cependant la situation était bien trop compliquée pour qu’il puisse accepter.

 Les groupes de quartier réclamaient tous les jours une « taxe de protection » c’est-à-dire une somme d’argent que chaque foyer devait verser. En échange de cela, le groupe assurait la sécurité, c’est-à-dire de ne pas exercer de violence sur les membres du foyer et les protéger d’éventuels problèmes avec d’autres groupes. C’était une sorte de guerre de clans au sein du quartier, à celui qui aurait le plus grand territoire, fonctionnant par la menace pour conquérir les foyers. En effet, tout refus de payer cette taxe signifiait se mettre à dos ce groupe et se terminait souvent par un vandalisme de la propriété et une violence sur les membres.

 Dan savait qu’il ne pourrait payer la taxe indéfiniment. Même s’il trouvait un endroit où travailler, il ne pourrait pas gagner assez à dix-sept ans pour à la fois payer cette dette permanente et survenir à ses besoins.

 Lewis été « affilié » à un autre clan, qui gardait surtout la frontière du quartier, donc même si Dan quittait sa maison pour vivre chez ce-dernier, son clan, qui s’occupait surtout du centre du quartier le chercherait pour récupérer l’argent. Cela pourrait créer un énorme conflit entre les deux groupes, chose que Dan voulait éviter à tout prix. Il ne voulait pas revoir de victimes dues à ces confrontations, et surtout pas en être la cause. Qui plus est, il mettrait Lewis et sa femme en danger car ils seraient considérés comme des traitres de leur camps, et des ennemis du camps de Dan.

 Dan arriva chez lui et constata qu’il avait laissé la porte ouverte. Cependant après une brève inspection de celle-ci, rien n’avait été volé, il ne semblait pas y avoir eu d’intrusion chez lui. Il s’assit quelques minutes à la table à manger, se remémorant les souvenirs qu’il avait eu avec sa famille à cette endroit, moments qu’il ne revivrait peut-être jamais avec eux. Il ne ressentait plus de douleur, c’était à présent de la tristesse uniquement. Il avait été habitué par ses parents que ce genre d’évènement pouvaient arriver, vu la nature du quartier dans lequel ils vivaient. Il savait qu’il devait passer au-delà de cet évènement et se tourner vers le futur à partir du passé que les parents lui avaient bâti. Leurs routes s’étaient séparées et qui sait si elles se rencontreraient à nouveau…

 Après quelques moments de morosité et de nostalgie, Dan se releva et commença à préparer des affaires. Il comptait rester dans cette maison quelques jours encore, trouvant des excuses pour expliquer l’absences de ses parents lors du prélèvement des taxes, qu’il payerait à partir des économies de la maison. Pendant ce temps, il tenterait de trouver un autre endroit où s’enfuir, un lieu où il pourrait vivre caché sans devoir payer les taxes. Face à la puissance des groupes qui régnaient dans le quartier, le seul moyen envisageable était la fuite. Il devait donc réunir le nécessaire pour survivre, pour démarrer une nouvelle vie, tout ce qui pourrait être utile et qu’il pourrait transporter sur lui.

 Il commença à ranger ses affaires dans un sac, puis l’apporta dans le salon pour réfléchir à ce qu’il devrait prendre d’autre avec lui, sans qu’il ne soit trop lourd. Il balayait la pièce d’un regard nostalgique en pensant qu’il allait abandonner ce lieu dans lequel il avait vécu toute son enfance. Les souvenirs reparaissaient et l’inondaient, mais ce n’était pas le moment de s’abandonner aux réflexions, il devait rester concentré. Dan se remit à remplir son sac quand tout à coup, on sonna à la porte.

 « Si tôt », pensa-t-il. C’étaient sûrement les membres du groupe qui venaient récupérer l’argent quotidien. En lançant un coup d’œil rapide à une d’horloge, Dan se rendit compte qu’il était 21h passées. Il avait passé beaucoup de temps à errer dans la maison sans se rendre compte du temps.

 Il se dirigea vers la porte et quand il l’ouvrit, une pulsion de terreur s’empara de lui. Il voyait le sang, les corps, les peaux livides, les regards perdus, ses parents morts gisant dans la rue, la scène monstrueuse qu’il avait aperçue un jour auparavant se trouvait devant lui. Il referma brusquement la porte, le cœur battant à toute vitesse. Il s’assit de l’autre côté de la porte tentant de reprendre ses esprits après cette vision horrible. Il fut sorti de son absence par des coups violents portés contre la porte, accompagnés d’exclamation.

 Dan se releva tant bien que mal, reprit son courage, et la main tremblante, il ouvrit la porte. Trois hommes était présents, tous membres de son groupe. Le premier était Kévin, un jeune homme de 25 ans environ, assez charismatique, qui s’exprimait très bien malgré son origine populaire, lui permettant ainsi de se faire écouter plus facilement. Il avait rapidement été apprécié par les personnes importantes du clan et dirigeait à présent le prélèvement des taxes, se rendant souvent lui-même dans les foyers. Les deux autres étaient deux gardes du corps que Dan ne connaissait pas.

 On distinguait à la fois de l’incompréhension et de l’énervement sur le visage de Kévin en voyant Dan, mais il se contrôlait parfaitement pour ne pas nuire à son image.

 « Est-ce que tu vas bien ? Tu nous as claqué la porte au nez et tu ne répondais plus. »

 Dan se rendant compte de ses actes et bégaya en répondant :

 « C’est avec la confrontation de hier… Je ne m’en suis pas totalement remis… J’ai peur à chaque fois que j’ouvre la porte… »

 Les deux gardes du corps ricanèrent, ce qui fit sourire Kévin qui se retenait tant bien que mal.

 « Tu es une petite nature, ce sont des choses qui arrivent. » dit l’un d’entre eux.

 Dan savait qu’ils allaient régir de cette façon, cependant il préférait être humilié que de leur apprendre la vérité sur ses parents.

 « Bon revenons à nos affaires », dit Kévin après un bref instant.

 « Mes parents sont partis fêter l’anniversaire d’un de leurs amis ls reviendront sûrement assez tard. » répondit Dan en essayent d’être aussi convainquant que possible.

 « Mais aucun de problème, ils m’ont laissé de l’argent pour payer la taxe. »

 Kévin le regarda avec une pointe de soupçon. Ce n’étaient pas des choses qui arrivaient souvent. Dan se dirigea vers une petite commode ou il avait préparé au préalable la somme d’argent exacte afin de gagner en crédibilité. Il la tendit à Kévin qui la saisit sans dire un mot. Ce-dernier l’inspecta avec plus d’attention que d’habitude, l’esprit ailleurs, comme s’il pensait à autre chose.

 « C’est bon le compte y est dit-il. Merci beaucoup et passe le bonjour à tes parents. »

 Dan eut un serrement au cœur en entendant Kévin évoquer son père et sa mère. Son visage s’était assombri, quand il croisa soudain le regard de Kévin, le fixant, encore plus suspicieux qu’au paravent. Le visage de Dan repris sa fausse expression joyeuse et il accompagna Kévin vers la sortie. Ce-dernier était pensif, marchait doucement. Lorsque Dan lui souhaita une bonne soirée et s’apprêta à fermer la porte, Kévin l’interrompit brusquement en prononçant ces mots, glaçant le sang de Dan :

 « Tu ne comptes quand même pas t’enfuir, ou je me trompes ? »

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