3 - Parti

4 minutes de lecture

 Partir sans donner de motif n'était pas dans les habitudes de Naeden. Surtout sans me prévenir moi. Nous ne faisions jamais rien sans que l'autre soit au courant, et ce depuis toujours. Je me raisonnais en me disant qu'il avait peut-être eu une course urgente à faire au village ou chez un voisin. Après tout, c'était un homme serviable, et sa force était souvent sollocitée sur des chantiers ou aux champs. Mais je ne parvenais pas à me convaincre que c'était normal. Pour moi, il y avait une raison bien différente que tout cela. Mon coeur se serra lorsque la nuit tomba et que je me retrouvais seule dans le lit, qui me parraissait immense sans mon amour à mes côtés.

Le lendemain, je passais la journée à tourner en rond, à regarder au loin si je l'apercevais, mais non, rien. Les jours se succédèrent ainsi, laissant place aux semaines.

Une semaine plus tard, je craquais. J'allais voir nos mères et leur dit que je comptais me lancer à sa recherche. J'eus beaucoup de mal à ne pas pleurer devant leurs visages trempés de larmes. Je les embrassais et me mis en route.

Je commençais par aller au village voir si quelqu'un avait pu l'apercevoir ou s'il avait demandé son chemin à des gens. Le chasseur m'indiqua qu'il s'était acheté un arc et un poignard. Je ne compris pas pourquoi, car la chasse n'était pas son point fort. Il devait y avoir une autre raison, et je craignais de savoir laquelle. Le vieil homme me dit aussi que Naeden était parti en direction de la capitale, laquelle était depuis une décénnie occupée par l'ennemi. Mon corps se figea à cette nouvelle. J'empruntais un cheval et parti au galop en direction du front.

Il me fallu deux semaines entières pour y arriver. Je tombais sur un champ de ruines. La capitale avait pratiquement été rasée. Rassemblant mon courage, je demandais à tout ceux que je croisais s'ils avaient aperçus Naeden, en vain. Personne ne l'avait vu.

Je décidais d'aller camper dans un bois avoisinant. Alors que j'installais mon campement de fortune, une petite voix se fit entendre :

  • Madame ?

Levant la tête, je vis un petit garçon en guenilles tout maigrelet, ses cheveux noirs lui tombant sur le visage.

  • Approche, lui dis-je, viens près du feu.
  • Est-ce que vous auriez quelque chose à manger, dites ? demanda-t-il d'un ton plaintif
  • Je n'ai pas grand chose, mais assez pour partager avec toi ! Viens t'asseoir à côté de moi, je n'ai encore jamais dévoré d'enfant ! dis-je en riant
  • Vous faites quoi ici ? C'est dangereux avec l'ennemi qui traîne dans le coin !
  • Voilà un brave jeune homme ! m'exclamais-je, je suis à la recherche de quelqu'un, mais toi, que fais-tu seul par ici ?

Le petit se mit à pleurer, il essayait de retenir ses larmes pour paraître courageux, mais je voyais bien ses épaules se soulever en soubresauts.

  • Tu sais, ajoutais-je, même les hommes ont le droit de pleurer, ce n'est pas une faiblesse, au contraire.
  • Je ne pleure pas d'abord ! me répondit-il en se mouchant dans sa chemise, c'est la fumée qui me pique les yeux ! Et je suis là parce que je cherche des trucs que je peux vendre, histoire de gagner assez d'argent pour me nourrir.

Le garçon ne devait pas avoir plus de dix ans. Ses parents avaient dûs être tués lors de la guerre, le pauvre petit devait se sentir bien seul et vulnérable. Il devait dépouiller les cadavres pour se faire un peu d'argent, comme beaucoup d'autres...

  • Au fait, comment t'appelles-tu ? Moi c'est Lialana, lui dis-je en lui tendant un gros morceaux de pain
  • Archie. Merci pour le pain, répondit-il la bouche pleine.
  • Dis moi, Archie, n'aurais-tu pas vu un homme de mon âge, très grand, avec de longs cheveux blonds ?
  • Non ça me dit rien, puis vous savez je vois passer tellement de gens que je ne retiens même plus les visages !

Après cela, nous avons parlé de banalités, de nos vies futures après la guerre, puis Archie s'est endormi près du feu.

Le matin suivant, je rangeais mes affaires et me préparais à repartir. Archie vint me voir avant que je ne me remette en selle :

  • Tenez, prenez ça, pour vous remercier de m'avoir donné à manger hier, ça doit valoir de l'argent, mais vous êtes vraiment gentille alors je vous le donne !

Je pris ce qu'il me tendait, et mon sang se glaça à la vue de l'objet. C'était un médaillon en cuivre sur lequel était gravé un L runique. Ce médaillon, je l'avais offert à Naeden lorsque nous avions huit ans. Il le portait toujours sur lui.

J'attrapais le garçon par les épaules, les yeux remplis de larmes.

  • Où as-tu eu ça ? On te l'a donné ou tu l'as pris sur un cadavre ?! Réponds moi !!
  • Ben, je sais plus trop...
  • Réfléchis ! Ce médaillon appartient à la personne que je cherche, c'est moi qui lui avait offert !
  • Ah...Mmmmh...Je crois que je l'ai ramassé hier, dans la main d'un type à la capitale, enfin ce qu'il en reste. Il était pas beau à voir...

N'attendant pas la fin de son histoire, je sautais sur mon cheval et parti à la ville.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire A.R Pinta ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0