S’INTERDIRE

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LEY

Je fuis aussi loin que possible de Lucas Lambert, avec une assurance que je suis très éloignée de ressentir. Un frisson me parcourt, c’est comme un automate que je longe les couloirs de l'Aurora. En vérité, mon esprit se trouve encore dans ses bras fermes.,Inhale son odeur virile, s'enivre de son souffle, souhaite son étreinte et les pulsations de sa queue sur mon intimité.

Irritée par ce comportement irrationnel, je frappe du pied au sol, telle une gamine faisant un caprice. Putain, je sais très bien que je divague complètement, car auparavant, je n'ai jamais pensé pouvoir ou vouloir l'étreinte d'un homme comme lui. Mais cet individu, pour une raison que j'ignore, est sur le point de mettre un beau bordel dans ma vie ! Je le sais ! Je le sens !

En toute logique, j'aurais dû repousser ce salopard, et pour un motif plutôt obscure, je suis attirée par lui. Mon cerveau, embrouillé par une multitude d’émotions, s'est mit sur pause, et je me suis abandonnée dans ses bras. Pour la première fois depuis des années, j'ai ressenti du désir. Un bouleversement qui me fiche une peur de tous les diables !

Il n'est plus question de me retrouver dans les bras de ce type. Peu m'importe le prétexte, je dois absolument tenir ce connard à distance ! Cet enfoiré est tout simplement dangereux pour mon équilibre émotionnel. Je franchis la porte de mon appartement, l'esprit embrumé par une incertitude si vivace. Tourmentée , je suis transie de froid alors que la température est plus qu'agréable.

Je me dirige vers une des fenêtres de mon salon, m'assois sur le rebord de celle-ci, et dans la pénombre, j'observe la majestueuse Tour Eiffel. Cette vue, qui d'habitude me console, n'a plus aucun effet sur moi. L'étreinte de cet homme m'a démolie. Je me sens oppressée, perdue, mon cœur bat à cent à l'heure. Et pour être honnête, je ne comprends rien de cette attitude, que je qualifie d'emblée de stupide. Me croyant seule, je me mets à jurer à haute voix. C'est alors que V sort de l'ombre.

- Ley !

De surprise, je sursaute, mets la main sur ma poitrine et l'interroge.

- Bordel V, tu veux que je fasse une attaque ! Qu'est-ce que tu fous là d'ailleurs ?

Elle me regarde incrédule et rétorque.

- Je peux également te poser la même question, Ley. Tu n'es pas censée t'occuper du fils d'Amonville ?

- Tout est prêt pour lui. D'ailleurs, Sorel a fait du très bon travail avec la réalisation de cet autel. On n'imagine même pas qu'il s'agit en réalité d’un banc de fessés. C'est une très belle mise en scène. J'ai chargé Helena d'accueillir tout le monde.

- Tu as fait quoi ?

- J'ai chargé Helena d'accueillir Matthew Amonville et les élus qui ont payé pour assister à la séance.

- Tu vas me dire ce qui ne tourne pas rond chez toi ?

- Et toi, tu vas m'expliquer ce que tu fais chez moi, tapis dans l'ombre telle une voleuse ?

- Ne change pas de sujet.

- Ce n’est pas le cas . D'ailleurs, tu peux me dire en quoi confier l'accueil de Matthew Amonville à Helena est une mauvaise idée ?

- Tu ne ferais jamais cela si la venue de Lucas Lambert et son étreinte dans ce couloir sombre ne t'avait pas perturbée. Tu peux te mentir et me mentir, mais au vu de ta réaction, j'ai la certitude qu'il se passe entre vous beaucoup plus qu'une simple alchimie. Je suis quand même très étonnée de constater que tu laisses un homme comme lui te prendre dans ses bras, surtout qu'il était dans ceux de Séréna quelques minute plus tôt. Mais qu'est-ce que je raconte, le simple fait que tu le laisses t'approcher ou encore te toucher est un putain de miracle !

- Ne parle pas de ce que tu ne sais pas V, il m'a simplement prise par surprise.

- Ah oui ! Alors je dois sûrement être borgne. Sur l'écran de contrôle, Isaac et moi-même avons cru pendant un instant à une hallucination.

- Parce que vous m'espionnez maintenant ?

- N'importe quoi ! Nous étions choqués de constater à quel point, tu l’as tout de suite repoussé, Ley ! s'exclame-t-elle sur un ton des plus ironiques.

Elle me scrute d'un regard inquisiteur et je décide à cet instant, que le meilleur moyen de me défaire d'une explication est d'attaquer ou plutôt d'esquiver ce sujet brûlant.

- Je crois savoir qu'il y a une multitude d'écrans dans cette salle de surveillance ! Alors, peux-tu m'expliquer pourquoi vous regardiez précisément celui-ci ?

- Nous n'étions pas en train de t'espionner, Ley. Je devais faire une vérification et nous sommes tombés sur Lambert et toi enlacés contre le mur.

- Nous n'étions pas enlacés ! Pourquoi suis-je obligée de m'expliquer sur quelque chose qui n'a aucune importance ?

- Franchement, Ley, ce n'était sans doute pas important, mais c'était sexy. Tu penses vraiment ignorer cet épisode ?

- Je ne vois pas pourquoi je lui donnerais une quelconque importance.

- Peut-être parce que c'est le premier mec que tu laisses approcher depuis tellement longtemps, que je me suis même demandée si tu étais encore une femme.

- Je le suis V, et ce n'est pas parce que je ne baise pas avec tout ce qui passe que je n'en suis plus une !

Nous, nous affrontons du regard quelques minutes, mais ne pouvant se contenir, V contre-attaque.

- Je ne te dis pas de coucher avec tous les types que tu rencontres, Ley ! Je te demande seulement de vivre, de rêver, de profiter, d'aimer !

- C'est impossible V ! Tout cela est complètement hors de question !

- Et peux-tu, s'il te plaît, m'expliquer pourquoi ?

Des larmes d'épuisement roulent sur mes joues, ma respiration est tout à coup difficile. V se rapproche de moi, me prend dans ses bras afin que je me calme. Mais rien n'y fait, je pleure de plus belle.

Au vu de la situation, je n'arrive pas à lui dire à quel point mon passé semble être un obstacle à l'entrée d'un homme dans ma vie. Et pour cause, la dernière fois que j'ai laissé l’un d’eux franchir ce cap, je me suis retrouvée dans une situation inextricable qui est encore valable aujourd'hui.

Je fuis Damian …

Damian, que je hais tellement.

Flash Back

Du sang frais coule sur le carrelage blanc. Mais je ne réagis pas, comme statufiée, je regarde dans le miroir les gouttes de liquide qui coule sur mon menton avant d'atterrir sur la faïence. Mon visage n'est pas beau à voir.

Damian ne m'a jamais frappée la figure au point de m'infliger de blessures. Aujourd'hui, c'est la première fois. Cette fois, sa colère était telle que rien de ce que j'ai pu dire n'a pu calmer sa fureur.

Ai-je peur ? Peut-être. En réalité, je suis complètement épouvantée par ce qu'il me fait et ce qu'il m'a déjà fait. Je ne sais plus vraiment quoi ressentir. Il me frappe et me terrorise depuis deux ans, alors dire que je suis surprise est un vilain mensonge. Cependant, il a toujours pris grand soin d'éviter mon faciès. Selon ses dires, je suis beaucoup trop belle pour gâcher une beauté si naturellement acquise.

Sauf que cette fois, il ne m'a pas épargnée. Douloureuse et lasse, je lève les yeux sur la glace pour faire l'inventaire des dégâts.

En l'état actuel, je n'ai rien de beau. J'ai une entaille à la tempe gauche, un œil au beurre noir, ainsi qu'une lèvre fendue qui continue de saigner. Mes côtes me font un mal de chien, dû aux coups de pied que j'ai reçus . Des marques de strangulation maculent mon cou et j'ai beaucoup de mal à respirer. Contrecoup sans doute de la scène de ce que je viens de vivre.

Dire que j'ai pensé que ce monstre m'aimait. J'ai bêtement cru que toutes les douleurs que je vivais étaient des épreuves pour que je sois enfin heureuse avec lui. J'ai tout perdu une fois. Mais là, c'est bien pire, puisque je ne suis rien de plus qu'un être privé de dignité.

L'éclairage me renvoie l'image d'une femme éteinte, brisée, humiliée et mal aimée. Comme je voudrais pouvoir pleurer, mais les larmes ne viennent plus. Elles sont prisonnières, comme je le suis de cet homme. Dieu merci, Ely n'est pas là.

Alors que je m'apprête à me blinder, pour affronter la honte que je ressens, un frisson d'horreur me parcourt l'échine. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir que Damian vient de pénétrer dans la salle de bain. Instinctivement, je baisse le regard, de peur d'apercevoir ses prunelles indigo dans la dans le miroir.

Il s'approche de moi et je me mets à frissonner d'horreur. Sans que je le veuille, des paroles se précipitent dans ma bouche.

- Arrête, ) Damian ! Arrête, je t'en supplie ! Tu m'avais promis de prendre soin de nous !

Il ricane méchamment.

- Et tu as pensé que je disais vrai ? Tu m'as vraiment cru, Ley ?

Son expression froide et démoniaque me prouve à quel point je me suis fourvoyée .

- Je sais à quoi tu penses, Ley. Je sais que tu veux me quitter, mais je ne te le permettrai pas ! Je suis ton maître ! Je suis surtout ton mari ! Alors, ( ma chérie, dis-moi comment tu comptes me fuir ?

- Damian, s'il te plaît ...

- Continue de me supplier, j'aime quand tu m'implore ! Tu seras toujours à moi, Ley. Quoi que tu fasses et où que tu ailles, je sais que tu m'appartiendras toujours !

Il me scrute quelques minutes et reprend.

- Quand, je t'ai vue dans cet hôtel la première fois, j'ai su que je te voulais. J'avais déjà décidé de te ligoter à moi. Mais savoir que tu étais une petite orpheline, obligée de travailler comme une dingue pour offrir le mieux à ta sœur chérie n'a fait que faciliter mes plans. Je t'ai tout donné et maintenant, il est temps d'être reconnaissante ! D'ailleurs, Ely devient belle, pas autant que toi, chérie, mais jolie tout de même ! Il faut dire qu'avec tes magnifiques iris violets, aucun homme, même le plus saint d'esprit, ne saurait te résister ! En attendant, il serait vraiment dommage que quelque chose arrive à ton innocente petite sœur, pas vrai ?

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