autibio_WIFI / Carte graphique non prise en charge

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Ouais, j'ai grandi avec Facebook. Génération du like. Je sais plus comment réagir, quand les gens me parlent. C'est plus compliqué que de balancer un cœur ou un sourire. L'expression faciale, je ne la maîtrise pas. C'est comme si je n'en avais pas. Simuler pour de vrai, c'est beaucoup plus compliqué.

D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu du mal avec les émotions. Je suis un mur d'où rien ne transparaît. Les gens me parlent et je m'en cogne. J'adore les gens, j'adore les écouter. Mais quand je suis dans ma tête, y a rien à faire : tout m'indiffère. Parfois, j'éprouve intensément ce petit surplus de joie ou ce profond dégoût. Mais impossible de le montrer. Je pousse sur les muscles de mon visage. Non, l'émotion ne sort pas. Je ferais une très bonne actrice, genre Effet Koulechov.

Pourtant, aux instants où ça me paraît crucial de sortir la poker face, mon visage se délite. Trop d'émotions d'un coup, et voilà que je perds le maintien. Je me décoince, malgré moi. Je déraille grave.

Des exemples, j'en ai à la pelle. Tenez, quand je tombe amoureuse, tout mon entourage est au courant avant moi. Évidemment, je ne me vois pas de l'extérieur. Autant que possible, j'évite les miroirs, alors...

Quand j'étais petite, j'avais peur des poupées. Rien à voir avec des délires à la Chucky ou Annabelle. J'avais 5 ou 6 ans, et je détestais déjà les bébés. Je vais pas vous mentir, je ne les supporte toujours pas. Je les trouve laids, bruyants, poisseux... Bref, c'est pas l'instinct maternel qui risque de m'étouffer ! Mais en plus, à l'époque, quand il y avait un bébé dans le coin, ça mettait en péril les formidables constructions de Duplo que j'avais mis des plombes à bâtir. Alors les poupons en plastique... Non seulement ils ne m'attendrissaient pas. Non seulement je ne voyais aucun fun à jouer à la maman (moi, je préférais faire le chef avec ma dînette ou inventer des love stories entre des dinosaures). Mais en plus, putain, je trouvais ça malsain ! Moi du haut de mes 5 ans, j'étais encore un bébé. D'où j'allais pouponer ?

Bref, les poupées, je les avais en horreur. Et voilà pas qu'un jour mon parrain a la bonne idée de m'en offrir une pour Noël ! Et s'il vous plaît, pas une simple poupée que j'aurais pu vite fait cacher au fond d'un coffre. Non ! Une putain de poupée à trottinette motorisée qui me fixait comme une morte avec ses yeux luisants ! Quand j'ai ouvert mon paquet et que j'ai découvert ce monstrueux présent, instantanément, je me suis mise à pleurer. Je savais bien qu'il fallait faire bonne figure et dire merci. Même moi, j'étais gênée de mon comportement. Mais c'était trop dur à encaisser. Je ne pouvais pas prétendre que ça me faisait plaisir ; je ne pouvais même pas contenir mon aversion.

La joie m'envahit : je suis un mur. La colère ou la peur me gagne : je déborde, perte de contrôle totale. Tâchez d'avoir des rapports sociaux normaux, avec un visage émotionnellement défectueux !

Internet, c'était le pied ! On balançait un smiley et notre interlocuteur savait tout de suite s'il fallait rire ou se renfrogner. Quand j'écrivais un pavé par message, on pouvait être sûre que je m'étais mise en rogne. Je déversais ma colère dans un torrent de mots. Maintenant, quand je m'énerve, je suis contrainte de déclamer oralement mes furieuses tirades. Je n'en viens jamais à bout, je dois constamment m'interrompre pour avaler ma salive. Alors, évidemment, on ne me prend pas au sérieux. Tout au plus, quand je m'emporte, les autres trouvent ça risible ou même mignon. Faut croire qu'au bon vieux temps de l'Internet mondial, j'aurais dû m'énerver plus souvent en public, j'aurais sûrement fait de l'ombre à pas mal de lol cats !

Réponse au défi : https://www.atelierdesauteurs.com/defis/defi/1694338629/2051--internet-down

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