Chapitre 3

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Gwenn lâcha un soupir et bâilla derrière son poing. Elle se frotta les yeux et se pencha de nouveau sur la petite sphère métallique qu’elle était en train de fabriquer. Un ressort sauta et projeta un peu d’huile sur son tablier, formant une tache brunâtre sur le tissu blanc.

- Un tablier blanc, quelle idée brillante... murmura-t-elle en levant les yeux au ciel, agacée.

La jeune fille se pencha de nouveau sur l’amas de pièces métalliques et plongea sa clef à molette entre deux engrenages en marmonnant. Elle devait incorporer un micro dans le mécanisme, sans endommager les pièces qu’elle avait déjà disposées. Elle était seule dans l’atelier ; les autres étaient déjà partis depuis longtemps, remettant la suite du travail au lendemain. Gwenn avait préféré finir tout de suite, continuant sur sa lancée. Elle espérait terminer son travail au plus vite. Par la fenêtre, les étoiles resplendissaient, lui rappelant qu’elle devrait déjà être dans son lit. Gwenn soupira de nouveau et referma le clapet de la sphère, en espérant ne pas s’être trompée. Sinon elle devrait tout recommencer. La jeune fille scruta sa création sous tous les angles, et ne trouvant rien d’anormal, approcha son doigt d’un bouton dissimulé sous la seule décoration qu’elle avait daigné mettre : une fleur légèrement en relief.

- Cette manie de tout décorer, grogna-t-elle entre ses dents, et en plus il faut que ce soit obligatoire !

Gwenn se reprit et appuya sur le bouton, qui s’enfonça avec un léger déclic. Elle observa la sphère, attentive : normalement, ça devrait bouger... Rien ne se passa.

- Zut, et zut, et encore zut ! Pourquoi il faut toujours que je m’y reprenne à trois fois pour que ça fonctionne ?!

Gwenn se saisit une énième fois de son tournevis en soupirant et se prépara à tout refaire, exaspérée. Soudain, un gargouillement incertain sortit de la sphère métallique. La jeune fille leva un sourcil surpris.

- La locomotive disparaît lourdement dans une cérémonie ! s’écria une voix stridente et robotisée.

Gwenn se frappa le front de désespoir. En plus de ça, cette mécanique racontait des âneries ! Elle avait pourtant prévu de lui faire dire des proverbes... Elle ne comprenait pas ce qui avait pu aller de travers, cette fois !

- Le foin brûle en sautant avec délicatesse !

Gwenn était à bout. Elle avait passé des heures à perfectionner le robot qu’elle allait présenter à l’examen du deuxième trimestre, et tout ce qu’il arrivait à dire, c’était des phrases sans queue ni tête ! La jeune fille frappa la table de son poing et empoigna la sphère avec colère :

- Mais tu vas te taire, oui ?! En plus il fait nuit, tu vas réveiller tout le monde, en hurlant comme ça !

- L’urne éclos en glaçant comme une vieille chouette ! hurla de nouveau la voix du robot.

- Mais c’est pas possible, je crois bien que je vais tout abandonner, cette fois, j’en ai assez de tout rater à chaque fois !

- Tout réussit à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais !

Gwenn fronça les sourcils : la sphère venait de dire un proverbe. Mais celui-ci était loin de l’avantager. La jeune fille poussa un soupir consterné, croisa les bras et se mit à réfléchir. Si le robot ne disait qu’une phrase sensée sur quatre, il risquait de proférer des stupidités au nez de son professeur de mécanique. Elle devait donc corriger au mieux le problème, mais elle n’avait aucune idée d’où il venait. Elle avait entré dans la mémoire artificielle un bon nombre de mots afin de permettre à la base de données de les agencer en proverbes, mais apparemment, cette base de données avait quelques défauts...

- Et c’est reparti pour un tour, marmonna Gwenn en éteignant le robot.

Elle se saisit de la clef à molette et jeta un coup d’œil à la pendule placée dans un coin de l’atelier : il était vingt-trois heures. Dans une heure, elle devrait rejoindre Clena. Elle ne dormirait quasiment pas de la nuit. La jeune fille haussa les épaules et fixa d’un œil endormi la petite sphère mécanisée. Tant pis, elle continuerait demain, elle avait déjà bien avancé. Elle reposa ses outils sur la table de travail, les essuya avec un chiffon déjà noir de crasse, fourra le tout dans son sac et prit son robot dans ses mains. En silence, elle sortit de l’atelier et déboucha sur le couloir principal du deuxième étage.

Gwenn descendit les escaliers sur la pointe des pieds et rejoignit la tour Est, qui servait d’internat aux filles. Tandis qu’elle longeait les couloirs plongés dans le noir, des pas précipités se firent entendre. Elle tendit l’oreille. Madame Ly apparut, emmitouflée dans sa robe de chambre grisâtre, une lanterne à la main, et tourna à l’angle du couloir pour rejoindre la bibliothèque. La jeune fille retint son souffle : on ne devait pas la surprendre à une heure pareille de la nuit, tout le monde était censé s’être couché une heure plus tôt. Elle se cacha dans un renfoncemement sombre du mur, derrière l’une des rares statues qui décoraient l’Académie. La concierge se rapprochait. Gwenn serra son robot contre elle et retint son souffle. Madame Ly lui passa sous le nez sans même la remarquer. A force de serrer la sphère mécanisée contre elle, la jeune fille oublia que celle-ci avait un bouton marche-arrêt. Un petit « clic » résonna soudain dans le couloir. Alertée, la concierge de l’Académie se retourna et scruta l’obscurité.

- Il y a quelqu’un ?

Gwenn se fit toute petite derrière la statue et se traita d’imbécile en pensée. Comment avait-elle pu faire une gaffe pareille ?

- Eh, ho ? Il y a quelqu’un ? appelait madame Ly tout en se rapprochant de la cachette de Gwenn.

- La machine à laver sautille en larmoyant pour son chat ! hurla soudain la sphère.

Eberluée, Gwenn faillit la jeter le plus loin possible dans le couloir. Elle était découverte, c’était trop tard. Madame Ly sursauta et poussa un cri.

- Qui... Qui êtes-vous ? Répondez ! hurla-t-elle en empoignant sa lanterne comme une arme.

Gwenn se mordit les lèvres et pria pour qu’il ne vienne pas à l’idée de la concierge de regarder derrière la statue. Madame Ly tourna la tête de tout les côtés, à l’écoute du moindre bruit qui aurait pu trahir une présence. Gwenn retint son souffle. Quelques minutes passèrent, dans un silence angoissant, interrrompu par les grincements du plancher que provoquait la concierge en déambulant dans le couloir. Soudain, Madame Ly poussa un soupir consterné et frappa du poing contre le mur.

- Satanés comprimés de somnifère ! Les hallucinations m’arrivent de plus en plus souvent ! Je vais me plaindre à la pharmacie !

Gwenn souffla de soulagement. La concierge pensait qu’elle avait tout imaginé. Elle l’avait échappé belle, cette fois.

- Oui, et faire un procès ! Ces effets secondaires ne sont pas indiqués sur l’emballage ! s’emporta madame Ly en s’éloignant vers la bibliothèque.

La jeune fille se mordit les lèvres pour ne pas rire. Elle espéra que la pharmacie du coin n’aurait pas trop de problèmes à cause d’elle...

************

Il était déjà minuit vingt. Plantée devant la chambre de son amie, Gwenn s’inquiétait. Ce n’était pas dans les habitudes de Clena d’oublier leurs rendez-vous, d’habitude c’était toujours elle qui se levait en premier ! Mais elle avait beau toquer à la porte, elle n’entendait aucun bruit de l’autre côté. Soucieuse, Gwenn tenta d’entrer. A sa grande surprise la porte était ouverte, et tourna sur ses gonds silencieusement. La jeune fille tâtonna dans l’obscurité et finit par trouver la lampe de chevet, posée sur le bureau. Une lueur pâle se répandit dans la pièce.

- Mmm ? grogna Clena, ensevelie sous sa couverture.

- Clena ? Réveille-toi, on va au passage secret, aujourd’hui !

Clena se retourna sur son matelas et pressa son oreiller sur sa tête. Visiblement, elle n’avait aucune envie de se lever ; on ne voyait d’elle que des mèches de cheveux roux qui dépassaient de l’oreiller.

- Clena, qu’est-ce qu’il y a ? Si tu es trop fatiguée, tu n’avais qu’à me le dire, on aurait annulé et reporté à la nuit prochaine !

- Mmm… Gwenn, j’ai soif. fit la voix de Clena, cependant très enrouée.

- Tu as une drôle de voix. Tu es malade ?

Gwenn fronça les sourcils. Il était vrai que son amie avait un léger rhume depuis quelques jours.

- J’ai mal à la tête. De l’eau, s’il te plaît, marmonna Clena.

- Tu as de la fièvre ?

Gwenn souleva la couverture et s’empara de l’oreiller. Elle posa sa main sur le front de son amie. Oui, elle avait de la fièvre. Et pas qu’un peu.

- Ne bouge pas, je vais te chercher de l’eau. J’arrive.

Sur ce, Gwenn se précipita vers la petite salle de bain qui jouxtait la chambre. Elle ouvrit le robinet, attrappa un verre, le remplit. Alors qu’elle allait sortir, elle se cogna contre quelque chose.

- Zut, cette salle de bains n’est pas dans le même sens que la mienne ! grommela la jeune fille en faisant demi-tour.

Elle déboucha sur la chambre, éclairée par la lumière de la lampe. Clena s’était assise et plissait les yeux, l’air complètement désorientée.

- Gwenn ? Je suis désolée, je ne me suis pas réveillée.

- Ce n’est pas grave, tu es malade et tu as de la fièvre. Tu devais être trop fatiguée. Tiens, ton verre d’eau.

Clena attrappa le récipient et le vida d’une traite. Elle poussa un soupir avant de fermer les yeux.

- Tu penses que ça ira, pour cette nuit ? demanda Gwenn en reprenant le verre.

- Oui, oui. Je vais dormir.

- D’accord. Si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis dans la chambre en face, n’hésite pas.

Clena acquiesça et ramena ses longs cheveux sur sa nuque. Elle s’étira, puis se roula en boule. Le silence revint dans la chambre. Gwenn remplit de nouveau le verre, le plaça sur la table de nuit, puis s’en alla en faisant le moins de bruit possible.

La jeune fille atteignit rapidement sa chambre. Epuisée, elle posa sa sphère sur son bureau, enleva ses chaussures et les balança négligemment au fond la pièce. Elle se changea, puis s’écroula sur son lit. Le visage tourné vers la fenêtre, où des rideaux blancs masquaient le parc en contrebas, elle repensa à sa journée. Clena était malade. Finies, les petites escapades la nuit. Son amie allait devoir se reposer pour guérir. Avec seulement quelques heures de sommeil par nuit, l’une comme l’autre étaient très fatiguées. Et il y avait l’examen du deuxième trimestre. Il était porté sur la mécanique. Pour cela elle avait fini son robot, mais il était détraqué.

- Comme d’habitude, murmura-t-elle avec une grimace.

************

Le soleil filtrait à travers les rideaux. Gwenn soupira et ouvrit les yeux. Des taches lumineuses apparurent devant elle. Sa vue s’habitua à la luminosité, et elles se transformèrent petit à petit en bureau. La jeune fille sourit et s’étira : elle s’était bien reposée. Et puisqu’on était jour de Samdu, il n’y avait pas cours aujourd’hui. Gwenn s’étira, bâilla et se leva sans se presser. Elle prit le temps de prendre une douche, et choisit de porter une robe vert clair. Les jours de congé, l’horrible uniforme gris et bleu de l’Académie n’était pas obligatoire. Soudain, Gwenn repensa à Clena. « Il faut que j’aille la voir ! » s’exclama-t-elle en pensée en mettant ses chaussures.

Dans sa chambre, Clena dormait à poings fermés. Soudain, un bruit la réveilla, et la porte de la chambre s’ouvrit en grand. La jeune fille sursauta.

- Bonjour Clena ! Alors, ça va mieux qu’hier ?

C’était Gwenn. Elle aurait dû s’en douter. Qui d’autre qu’elle était assez folle pour réveiller les gens de cette façon ?

- Mouais, j’ai très mal à la tête. Pourquoi tu me réveilles ? Tu n’as même pas toqué !

- Oups… Désolée, mais j’étais vraiment pressée de te voir ! J’étais inquiète pour toi hier !

Clena grogna et repoussa sa couverture. Elle dévisagea son amie : elle avait l’air bien en forme. Pas elle. Elle sentait que sa migraine revenait déjà.

- Aujourd’hui on a le droit de sortir en ville ! Viens là que je te coiffe, on va faire du shopping ! déclara Gwenn avec un grand sourire.

- Ah bon ? Mais je suis encore dans mon lit, moi !

- On s’en fiche, on a encore toute la journée devant nous ! Assieds-toi, tu vas voir ce sera rapide !

Clena acquiesça. Après tout, elle n’allait pas manquer une opportunité de sortir dehors ! La jeune fille passa une main distraite dans ses cheveux pendant que Gwenn s’emparait d’une brosse. Elle esquissa une grimace : ses cheveux étaient tout simplement horribles. Ce n’étaient d’ailleurs plus des cheveux ; c’était un paquet de nœuds. La brosse passa une première fois.

- Aïe ! Mais fais attention, Gwenn ! Tu me fais mal !

- Mais ce n’est pas ma faute ! Tes cheveux sont vraiment très emmêlés !

- Je sais, ils l’ont toujours été.

Gwenn laissa échapper un rire et continua sa tâche de coiffeuse. Une demie-heure plus tard, Clena avait une belle natte rousse qui tombait sur son épaule.

- On y va à quelle heure ? demanda Gwenn.

- Après le repas, je pense que ce sera bien.

- Oui, tu as raison. J’espère que le valet qui sera en charge de nous surveiller sera plus gentil que la dernière fois !

En effet, Clena et Gwenn avait gardé un souvenir assez agaçant de leur dernière sortie en ville. Puisqu’il était obligatoire pour les élèves de se faire accompagner par un valet, elles avaient été contraintes de sortir dans la rue avec l’un d’eux. Malheureusement, il s’était avéré très sévère.

- Mesdemoiselles, singea Clena avec une grosse voix, on ne sort pas du chemin ! Vous n’irez pas au parc, c’est trop dangereux ! Pareil pour le magasin de vêtements ! Et la grande rue !

- Vous pouvez allez chez vos parents, à la limite, mais pas dans un lieu public ! C’est beaucoup trop dangereux ! cria Gwenn avec la même voix.

Clena se laissa tomber sur une chaise et sourit à son amie.

- Pff ! la ville est un lieu public ! Franchement !

- Exact. J’espère de tout mon cœur de ne pas tomber sur ce valet.

Dès que Clena fut prête, toutes deux s’éloignèrent vers le réfectoire.

************

Il faisait beau. La rue était bondée. Gwenn et Clena marchaient au même rythme, à grands pas, rendant la tâche difficile au valet qui les suivait. Gwenn leva la tête vers le ciel et inspira un bon coup, suivant des yeux les colonies d’oiseaux qui volaient au loin. Sortir après tant de jours enfermée à l’Académie lui faisait énormément de bien.

- On va où, maintenant, demanda Clena, il nous reste une demie heure avant la fin de notre permission, tu penses qu’on peut s’acheter une glace ?

- Bien sûr, s’exclama Gwenn, que la gourmandise guidait déjà vers un stand de crèmes glacées.

- Mesdemoiselles, ralentissez je vous prie ! s’écria soudain le valet, à bout de souffle.

Les deux amies s’entreregardèrent, amusées.

- Ne vous inquiétez pas Monsieur, on va juste acheter des glaces ! lui lança Gwenn sans ralentir l’allure.

A grands éclats de rires, les deux jeunes filles continuèrent leur route vers le stand, d’où s’échappaient des odeurs sucrées. Le vendeur, un jeune homme blond, était déjà en train de servir trois personnes à la fois.

- On va devoir faire la queue, conclut Gwenn en tirant son amie vers la file qui attendait pour les glaces.

- Attends, mais tu as vu le vendeur ? Il est trop beau ! s’exclama soudain Clena.

Gwenn s’arrêta et tourna la tête vers l’intéressé. Elle n’y avait pas prêté attention, mais elle devait reconnaître qu’il avait un certain charme. Cependant, elle ne l’aurait pas qualifié de « beau ». Ses grands yeux bleus et son air timide ne collait pas avec cet adjectif.

- Moi, j’aurais plutôt dit mignon, corrigea-t-elle.

- Mais c’est pareil beau et mignon !

- Bon, on n’a pas beaucoup de temps, alors on va prendre des glaces, Clena ! On verra ça plus tard pour le plan drague, d’accord ?

Son amie acquiesça avec un grand sourire, puis prit un air scandalisé, écarquillant les yeux.

- Moi, draguer quelqu’un ! Mais pour qui me prends-tu ?

Le valet les rejoignit, rouge et tout transpirant, la respiration sifflante. Gwenn secoua la tête d’un air désespéré et entraîna Clena vers la queue. La file était très longue, et les deux amies discutèrent de l’examen du trimestre pour passer le temps.

- Moi j’ai fait une danseuse mécanique, tu sais, comme les boîtes à musique, mais en plus gros !

- Et elle fonctionne bien ?

- Oui, elle peut faire trois musiques différentes et sa robe change de couleur selon la chaleur.

Gwenn en resta bouche bée. Elle savait que Clena était douée en mécanique, mais elle n’avait encore jamais eu l’occasion de se rendre compte qu’elle était vraiment capable de concevoir une chose pareille. Elle passait pour une minable à côté d’elle, avec sa sphère détraquée.

- Et toi, qu’est-ce que tu as fait ?

- Heu… Une sphère mécanique qui dit des proverbes. Elle est censée pouvoir voler mais je n’ai pas encore conçu les ailes.

- C’est original comme idée ! Ça a l’air super chouette !

Gwenn leva les yeux au ciel mais n’eut pas le temps de révéler à son amie que son robot ne fonctionnait pas correctement ; c’était leur tour. Elle commanda une glace à la framboise, et Clena une glace au subwol. Bientôt, toutes deux repartaient en direction de la rue principale, pour retourner à l’Académie, leur valet sur les talons. Celui-ci portait d’ailleurs deux sacs en papier bien remplis : elles avaient acheté bon nombre de livres.

- Dis, Gwenn, demanda Clena tout en engloutissant sa glace, je me sens fatiguée.

- Tu dois être encore malade, on va rentrer. Je propose de reporter notre escapade de nuit à demain soir, plutôt.

- Merci, j’ai vraiment besoin de me reposer.

Les deux amies finirent rapidement leur cornet de glace, et indiquèrent au valet qu’elles allaient rentrer. Ils traversèrent tous trois la grande rue, et continuèrent sur un chemin gravillonné qui s’éloignait un peu du centre ville. Au bout se dressait un imposant château, entouré d’écuries et de quelques bâtiments blancs : l’Académie des sciences. Gwenn soupira. Il lui faudrait attendre plusieurs jours pour pouvoir sortir de nouveau. L’examen serait passé, et elle devrait avoir terminé son robot. La jeune fille secoua la tête pour se débarasser de ces pensées. Elle devait profiter un maximum des quelques minutes qu’il lui restait avant de rentrer dans l’enceinte de l’Académie.

- Gwenn, ça te dit faire la course ? lança Clena avec un grand sourire.

- Bien sûr, ne compte pas sûr moi pour te laisser gagner !

Sans attendre son amie, Gwenn s’élança sur le chemin en riant aux éclats. Cette journée était la meilleure de la semaine éprouvante qu’elle venait de traverser.

- Eh ! Ce n’est pas juste, attends-moi ! s’écria Clena avant de s’élancer à sa poursuite.

Les deux amies s’éloignèrent en courant, plantant là le pauvre valet essoufflé. Malgré son avance, Gwenn réalisa que Clena était sur le point de la rattrapper. Elle accéléra l’allure, le souffle court. Sous ses yeux, les graviers se changeaient petit à petit en dalles de pierre. Elles allaient bientôt arriver devant la porte d’entrée. Plus que quelques dalles…

- J’ai gagné, hurla Gwenn en levant les bras en signe de triomphe, cette fois c’est moi qui suis arrivée en première !

- Pff… Tu as triché ! C’est injuste ! protesta Clena en reprenant son souffle.

Les deux jeunes filles échangèrent des sourires amusés.

- Mesdemoiselles !

Clena et Gwenn se retournèrent. Le valet courait en leur direction, tout transpirant et rouge comme une écrevisse. Il s’arrêta un peu pour souffler et leur tendit les sacs qu’il portait au bras.

- Voilà pour vous. Je dois aller faire mon rapport, bonne journée ! conclut-il avec un sourire timide.

Sur ce, il s’éloigna rapidement pour emprunter la porte de service. Les deux jeunes filles poussèrent la porte d’entrée entrouverte et montèrent les escaliers pour se rendre dans leurs chambres. Elle croisèrent Madame Ly qui ne manqua pas de les questionner sur tout ce qu’elles avaient fait durant leur permission d’une heure et demie. Heureusement, elle fut appelée par un élève qui avait besoin d’informations, et les deux amies purent s’éclipser discrètement avant d’avoir à subir un interrogatoire extrêmement poussé.

- Tu penses qu’on recroisera le vendeur de glaces, la prochaine fois ? demanda Clena en ouvrant la porte de sa chambre.

- Tu penses encore à ça, toi ? Oh là là, tu deviens un cas désespéré ! s’écria Gwenn en se frappant le front.

- Mais non, je me demandais juste ça comme ça…

Gwenn se racla la gorge en fixant son amie avec amusement. Elle tombait facilement amoureuse, et à chacune de leurs sorties, elle ne manquait pas de trouver un nouveau garçon à admirer. Clena surprit son regard et lui adressa une grimace.

- Tu restes un peu avec moi ? demanda-t-elle en l’invitant à entrer d’un geste.

- Oui, tu as beau être en forme, j’ai peur que ta fièvre ne revienne.

- Merci ! sourit Clena en entrant dans sa chambre, son amie sur les talons.

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