Mise au point.

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Après avoir retrouvé ses esprits, Yanz reprit son chemin tout en cherchant un abri pour la nuit. Cependant, il ne pouvait s'empêcher de trembler à chacun de ses pas. Ce n'était pas son comportement vis-à-vis de Marianna qui le terrifiait, mais les causes. Conscient de devenir un véritable monstre et ne plus pouvoir refréner sa métamorphose grâce à la succube, le temps qu'il pensait encore avoir lui semblait définitivement révolu. Cela occupa tant son esprit qu'il ne remarqua même pas la ferme abandonnée que lui indiqua Marianna. S'ils venaient de se trouver un bâtiment désert, Yanz craignait désormais la nuit à venir.



Devant la couche unique que contenait la maison, il appréhendait l'instant fatidique. Puis, il vit la succube lui passer sous le nez et s'affaler sur le lit. Scénario des plus étranges et des plus improbables, puisque non seulement Marianna venait de l'ignorer, mais en plus, elle continuait ne réclamant pas le moindre câlin. Yanz commença par penser qu'il était mort et au paradis. Heu, non ! Ça, ce n’était pas possible. Il devait aller en enfer en raison de son pacte et de sa nouvelle nature.



Ou alors il rêvait ? C'était ça ! Et il finirait par se réveiller de ce cauchemar ! Il se frappa le front à plusieurs reprises, sans résultat, la démone était toujours là. Il aurait dû s'en douter, les rares douleurs ressenties depuis le début de cette apocalypse étaient bien trop réelles. Marianna le regarda l'air déconcerté, comme s'il était devenu fou, louche, déconnecté de l'instant présent.

  • T'es trop bizarre, aujourd'hui. D'abord tu fais plein de cochonneries à ta Marianna, et maintenant tu te tapes tout seul.

  • Je croyais avoir imaginé tout ça, vu que tu ne me sautes pas dessus, alors qu'il y a un lit ici.

  • Non, tout ça est bien réel. Mais tu as tellement bien comblé ta Marianna, qu'elle va t'offrir une nuit de repos bien mérité.

Une nuit de repos bien mérité ? En effet. Yanz n'avait pas si bien dormi depuis si longtemps. Si bien, qu'il en avait oublié ce qu'il avait fait avec Marianna la veille. Il retrouva bien vite la mémoire en la contemplant. Non, il devait chasser ces pensées de sa tête. Il essaya de se rendormir, se prélassant autant qu'il le pouvait dans le confort d'un lit. Mais là encore, il se comportait comme elle. Il était complètement perdu, restant allongé comme une épave.

Marianna le regardait faire avec joie. S'imaginait-elle qu'il avait déjà renoncé à son enquête ? Yanz l'ignorait, mais il savait qu'elle était en position de force à cet instant. Elle avait ce qu'elle voulait, un lit, lui et rien d'autre. Elle se sentait tellement confiante qu'elle se permit de se lever la première, exposant sa silhouette aux yeux de son partenaire. C'est là qu'il remarqua. Il n'y avait pas prêté attention tant il était plongé dans sa déprime, et pourtant...



Les ailes dans son dos avaient triplé de taille, ses cornes étaient bien plus visibles et allongées qu'avant. Et surtout, il la trouvait plus belle, plus attirante alors qu'elle devenait plus bestiale que féminine dans son apparence. Non ! Il ne devait plus penser ainsi ! Il ne devait plus la regarder avec envie ! C'était justement à cause de ce genre de chose qu'il en était arrivé là. Parce qu'il la laissait occuper son esprit et qu'il ne parvenait à la repousser.

S'il n'éprouvait pas de remords, il savait qu'il ne devait plus aller aussi loin avec elle, même s'il en avait déjà trop fait. C'était bien ça qui l'inquiétait en réalité. Il était attiré naturellement vers elle, et vers sa propre condition de futur démon, il n'arrivait plus à résister, et inconsciemment il n'en éprouvait même plus le désir malgré sa détermination initiale. Mais il ne devait surtout pas renoncer à son objectif. S'il était désormais trop tard pour lui, ce n'était pas le cas pour les autres. Il pouvait encore sauver des vies, en trouvant la cause des zombies, et même s'il devenait démon, il lui restait assez de conscience humaine pour faire ça. Puis, sa condition actuelle lui offrait finalement un avantage pour faire ce qu'il voulait.



L'esprit à nouveau clair et déterminé, il se leva en trombe, se permit même de claqué les fesses de la succube qui croisait son chemin pour la provoquer. Elle le regarda avec amusement, ne cachant pas qu'elle aimait le voir ainsi. Il rassembla ses affaires, et attendit peu de temps une Marianna pouvant aisément deviner ses intentions, déjà prête pour reprendre la route. La diablesse, ne voulant pas lui accorder le dernier mot, essaya de le faire râler. Elle lui agrippa le bras et le colla pour l'embêter, mais se mit rapidement à bouder quand il la laissa faire. Ils marchèrent comme deux amoureux en apparence, bien à l'opposé de leur relation plus que malsaine.



Après une demi-journée, Marianna finit par s'énerver du calme régnant et parti faire une pause à l'ombre d'un arbre. Lui, n'en faisant qu'à sa tête, continua sa route sans elle. De toute façon, il savait bien qu'elle finirait par le rattraper, mais fut étonné de la distance autorisée entre eux. Il avança encore de quelques mètres, curieux de voir jusqu’où il pourrait aller avant de se faire rejoindre par une Marianna énervée. Mais ce fut lui qui en souffrit, brûlé par la marque du pacte. Il comprit que leur lien marché dans les deux sens. Si elle devait le suivre, lui aussi, et il devait à tout prix le lui cacher, sinon elle en profiterait sans hésiter.



Il resta tout de même sur place, obligé de l'attendre. Mais comment justifier son geste sans éveiller ses soupçons ? Sa chance, il la trouva dans une apparition angélique. La chose la plus belle qu'il n'ait jamais vue. Merveille aux cheveux blonds, iris aux couleurs des cieux et courbes généreuses que seules une tunique blanche et une armure nacrée en cachaient tout le charme aux yeux de Yanz. Un glaive à la main, elle le dévisagea sans l'attaquer, même s'il avait dégainé son épée par réflexe. L'ange sourit, comme s'il l'amusait.

  • Mais quelle vision parfaite pour moi. Voilà une rencontre à laquelle je ne m’attendais pas, mais qui m'arrange bien. Je vais m'occuper rapidement de votre cas, avant que vous n'en deveniez trop... Gênant.

  • Cela ne sera pas nécessaire. Je n'ai rien contre les anges, et aucune raison de m'en prendre à vous.

  • Vous êtes ce que vous êtes. L'engeance infernale que je dois punir de mon divin courroux. Rien ne saurer changer ça.

  • Mais je n'ai pas choisi ! Si vous connaissez un moyen de me libérer de mon sort, j'en serai redevable aux cieux à jamais.

  • Ô, mais je vais vous aider. Je vais le faire par la mort. Vous n'avez d'autre choix, mais ma lame libérera votre âme. La suite dépendra de vos actes passés.

Yanz la contempla sans dire un mot. L'offre était alléchante. Il aurait y songeait sincèrement. La rédemption qu'il cherchait tant se trouvait-elle réellement chez cette ange ? De toute façon, il n'était presque plus maître de son destin depuis son pacte avec la diablesse. S'il conservait une chance que son âme soit sauvée, était-ce par elle ? Plus y réfléchissait, plus il était tenté de dire oui. Pourtant, il ne put s'empêcher de penser au sort de Marianna. Bien qu'il soit gagnant dans l'affaire, il était conscient du rôle qu'elle jouait dans son existence. Elle l'avait guidé, réconforté, soutenu dans son périple.Il comprit alors qu'il lui restait finalement une part d'humanité, en se refusant à sacrifier celle qui l'avait plus d'une fois épaulé. Mais ça ne l'aidait pas. Au contraire, cela rendait son choix plus difficile. Il se savait encore assez lui-même pour être sauvé, mais aussi pour ne pas condamner Marianna.

Il ne pouvait certes pas trancher la question, mais quelqu'un d'autre vint le faire à sa place. Une succube désormais en capacité de volée fonça droit sur l'ange. Le fouet à la main, elle surprit tellement la femme aux cheveux d'or, que celle-ci se recula sans réfléchir. Le visage aussi dur que le roc, le regard marqué par la fureur de l'enfer, sa colère n'était cependant pas dirigée contre Yanz, bien que cela aurait pu être justifié. Non, c'était une autre personne qui avait déclenché le courroux de la succube.

  • Comment oses-tu approcher de mon Yanz ? Il est moi ! Il est ma proie ! Ma chose à moi ! Je vais te tuer ici et maintenant pour ça !

  • Je ne fais qu'essayer de sauver cette âme perdue. Restez à votre place, catin de l'enfer, et veuillez ne pas interférer.

  • Je ne permettrais pas à la coincé des cieux d'approcher de mon jouet à moi ! J'ai encore beaucoup à faire avec lui !

L'ange ne répondit pas, tandis que Marianna ponctuait ses propos d'un crachat au pied de son interlocutrice. Jamais Yanz n'avait vu la diablesse ainsi. Le plus surprenant restait son langage. Il est totalement opposé de celui qu'elle avait avec lui. Si différent qu'il ne la reconnaissait pas. C'était bien Marianna qu'il avait devant les yeux, mais ce n'était pas sa Marianna à lui. Celle qu'il connaissait, plutôt, qu'il pensait connaître.



La discussion n'aurait pas duré longtemps. Les deux créatures mythologiques face à face, prêtent à se rentrer dedans. Yanz restait immobile. Il ne doutait pas du parti qu'il devait prendre. Il ignorait seulement s'il devait s'en mêler ou pas. La colère de la démone était telle qu'il n'osait pas faire plus que regarder. Pourtant, il avait des intérêts des deux côtés. Mais défier la succube, ce n’était pas comparable à l'affronter dans un lit.



Devant ses yeux, le fouet de la diablesse fila droit vers l'ange. Son glaive dévia. La lainière de cuir fendit l'air, et fit un virage vers le visage de l'être céleste. Celle-ci para. Elle fonça sur Marianna. La succube fit de nouveau claquer son arme, et reculer sa cible. La tension était à son comble. Les deux adversaires se chargèrent une fois de plus, mais furent stopper dans leur élan. Une femme aux ailes gracieuses de plumes nacrées, et une démone s'étaient interposées. Yanz reconnut aussitôt la mentore de la diablesse, ainsi que celle qu'elle affrontait quelques jours plus tôt. Pourtant, Marianna ne se calma pas devant elle. Au contraire, sa fureur s'en voyait décuplée, frustrer d'être interrompu.

  • Maîtresse Syleen laisser Marianna défendre son Yanz !

  • Pas maintenant morveuse. Les combats entre anges et démons sont suspendus. C'est non négociable. L'ordre vient des patrons d'en bas et d'en haut.

  • Mais elle vouloir voler mon Yanz ! Je peux pas la laisser faire sans rien dire !

  • Elle n'en a ni le droit ni le pouvoir. Et tu vas devoir la tolérait, que ça te plaise ou pas.

  • Pourquoi ? Moi et Yanz on est très bien tous les deux. Qu'est-ce qu'elle à voir avec nous ?

  • Comme tu le sais ou tu as déjà tu t'en douter, cette vague de mort-vivant ne vient ni du ciel ni des enfers. Cela pose problème aux deux camps. Il a donc été décidé d'une trêve pour y remédier. Ce qui veut dire qu'elle va faire équipe avec vous.

  • Pas moyen ! Elle avoir seins et jolies fesses ! Elle être danger naturel pour Marianna. Pas possible que j'accepte ça !

  • Et pourtant tu vas la supporter que cela te plaise ou pas. C'est un ordre donc c'est non négociable.

  • Ça va, Marianna savoir c'est quoi un ordre. Mais pourquoi la blondasse fait pas équipe avec sa chef, et Maîtresse Syleen avec nous ?

  • Parce que c'est moi qui ferais équipe avec Maylise. Si tu n'as rien d'autre à ajouter, fais ce que je te dis et ferme là.

  • Marianna avoir juste dernière question à se permettre. Vous avez réussi votre objectif, ou c'est la vraie raison pour laquelle vous tenez à enquêter avec la madame-chef ange ?

Cette curiosité, Yanz la trouvait déplacée. Il s'attendait même à voir Syleen passer un savon à sa subordonnée. Mais le visage de celle-ci se fendit d'un sourire pervers, le même qu'avait Marianna envers lui quand elle voulait se payer du bon temps au lit. Là, il comprit aisément, bien avant le regard baissé et le rougissement honteux de Maylise le confirment. Oui, il semblait bien que la succube en chef ait eu ce qu'elle désirait. C'était donc bien par obligation que les deux se mélangeraient pour enquêter, même s'il soupçonnait que Syleen cherche à réitérer son exploit. Après tout, Marianna l'avait plus qu'habitué à ça.


Du côté de Yanz, ce n'était pas la même ambiance. Si les deux mentores semblaient aptes à se supporter et travailler en équipe, le visage de Marianna indiquait bien qu'elle aurait du mal à le faire, même si elle obéissait aux ordres de Syleen. Lui, ça l'arrangeait. Il n'avait plus besoin de choisir entre les deux voies devant lui, et son objectif était devenu celui de tous. Mais il craignait tout de même de devoir s'interposer entre ses deux partenaires. L'une dont il ne connaissait rien et qu'il acceptait, car elle lui redonnait l'espoir d'une rédemption. L'autre, celle à qui il s'était habitué et dont la jalousie lui avait rappelé qu'elle savait faire preuve de force et d'autorité, et qui avait aussi révélé un aspect de sa personnalité qu'il ne lui connaissait pas. Une chose demeurait sûre pour l'avenir : il était embarqué dans un cocktail des plus explosifs.

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