Le bruit du rosaire

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Elle sèche, Élise se laisse sécher, le regard dans le vague. Elle ignore le froid qui lui gèle ses orteils nus. L’eau glisse sur ses cheveux pour former des gouttes à gouttes. De furtifs plof s’ajoutent aux murmures de la forêt à intervalle régulier. Elle s’est contentée de rabattre ses genoux contre sa poitrine, mais ça la réchauffe à peine. Élise ignore le froid, car ses pensées l’engourdissent plus que le froid. Tout se bouscule dans sa tête, mais c’est un brouhaha en sourdine qu’elle n’écoute plus, elle n’a plus l’énergie pour ça. Tout s’est passé tellement vite.

Elle aimait Gérald, c’était l’amour de sa vie. Il y a encore quelques heures, elle aurait été capable de donner sa vie pour lui. Ils avaient pour habitude de se retrouver ici dans ce coin de Brocéliande à l’abri des regards. Élise avait voulu parler cette fois, il fallait qu’elle lui dise à Gérald. Elle lui avait dit, et elle avait découvert un autre Gérald : un type qui devient méchant lorsqu’il est lâche. Un type qui retourne tout contre l’autre sans rien assumer de ses responsabilités. Un lâche. Gérald avait déjà une famille à lui, il n’en voulait pas d’autres. Alors ça lui a sauté à la figure à Élise, il était l’amour de sa vie, et elle n’était qu’une distraction. Un plaisir passager que l’on prend pour se distraire de sa vie pas heureuse. Gérald n’était pas heureux alors il s’était servi d’elle. Elle avait lu la peur dans ses yeux. Il avait eu peur pour lui, peur de perdre femme et enfants. Il ne s’était pas soucié d’elle, de ce qu’elle ferait avec l’enfant, du qu'en-dira-ton. Il ne s’était pas soucié d’elle, qui se soucierait d’une distraction ? Une distraction passée qui plus est. Usée, usagée, épuisée à la corde, enceinte.

Gérald devenait méchant quand il se sentait lâche. Il l’avait insultée, menacée. Elle ferait ce qu’elle voudrait, ça ne le regardait pas, mais si elle s’avisait de le mêler à ça, il la tuerait. C’est ce qu’il avait dit. « Si tu parles, je te tue ». Il avait pointé son index devant son nez et avait dit : « Si tu parles, je te tue », avant de partir.

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