Bon appétit !

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— Je vous souhaite un agréable repas, messieurs dames.

Le serveur repart après avoir déposé nos plats devant nous. Je regarde les aiguillettes de poulet à la sauce forestière que j'ai commandé. Puis, je jette un coup d'œil aux personnes assises à la table. Chacun se tait, entièrement plongé dans leur plat. Nous n'osons pas prendre la parole, nous ne nous connaissons pas. D'après ce que je sais, nous avons tous été réunis ce soir dans ce restaurant par un ami commun qui voulait qu'on fasse connaissance. Mais j'ai clairement pas envie d'apprendre à les connaître, surtout la vieille devant moi. Elle a la tête de la mégère dans Cendrillon. D'après ses manières, elle vient de la haute bourgeoisie. Elle doit clairement être raciste et homophobe. Je prends une bouchée de mon plat. Je ne sais pas ce que Nicolas fout. Il aurait dû être là depuis déjà vingt bonnes minutes ! Je vais lui dire deux mots quand il arrivera, il va m'entendre ! Je n'ai qu'une hâte : que ce dîner à la con passa le plus vite possible.

Ils sont chelous. Vraiment chelous. Surtout le vieux, là. Avec sa barbe de cinq jours et ses cheveux gras, il n'a pas dû voir une salle de bain depuis plusieurs jours. Il me dégoûte. Et après, on dit que ce sont les jeunes qui sont crades !

Le ficello aussi est bizarre. Pas même un bonjour, ni un sourire. « Les jeunes de nos jours ne connaissent plus la politesse », mon cul oui !

Je me bascule sur ma chaise. Quoi ? Il a un problème lui ? C'est ça, baisse les yeux et bouffe ton poulet.

Je prends alors une bouchée de mon plat. J'ai la dalle, n'empêche ! Il faut que je remercie Stanislas quand il sera là.

Je les regarde manger leur plat. L'étonnement et un soupçon de méfiance s'emparent d'eux. Ne vous inquiétez pas, mes mignons, d'ici demain, vous ne ressentirez plus rien. Et dire qu'ils ne savent pas ce qui les attend. Vous auriez dû profiter de vos derniers jours . Regardez, j'ai claqué tout mon pognon et j'ai passé la semaine à baiser des putes et à me bourrer la gueule.

Ça sert à rien de me fusiller du regard, le petiot. T'as pas fini de m'endurer. Nous nous retrouverons tous dans l'au-delà d'ici quelques heures. Ou peut-être en bas. Je souris, fier de ma blague.

Je louche sur mon plat et bois une gorgée de mon vin. Allez, haut les cœurs ! Je prends une bouchée de mon plat, et m'applique à le mastiquer longuement.

Que me veulent donc ces personnes ? Je leur serais gré de cesser de me regarder ainsi. Ils me mettent mal à l'aise. Tout comme ce minable restaurant dans lequel nous sommes. Ceci est bien louche, je ne saisi toujours pas pourquoi ma chère Elizabeth m'a prié de dîner ici, ce soir. Qui plus est, elle n'est point arrivée ! Si je ne la connaissais pas depuis toutes ces années, je dirais qu'elle m'a joué une farce. Mais ce n'est pas son genre. Elle doit avoir une bonne raison en tête pour nous avoir réunis avec ces... gueux. Regardez donc ! Ils ne savent pas manger proprement. Ce jeune homme n'a décidément aucune manière, on ne tient pas sa fourchette ainsi ! Et celui-ci empeste l'alcool à plein nez. Son hygiène corporelle est désastreuse. Heureusement qu'il n'est pas assis à côté de moi.

Il est temps de manger ces cuisses de grenouilles. J'espère qu'elles sont cuites à point, sinon je vais être ballonnée toute la soirée. Je prends une bouchée de mon plat et essuie mes lèvres avec le coin de ma serviette.

Tout se passe comme prévu. D'ici quelques heures, nous serons tous morts. Ils me dégoûtent, avec leurs têtes innocentes, comme s'ils étaient de parfaits petits citoyens parisiens. À vomir. Ils ne se rendent même pas compte du mal qu'ils ont fait autour d'eux. Moi, je le sais. Et depuis ce jour fatidique, je m'en veux. J'ai attendu ce soir depuis si longtemps que je suis heureux. Je vais enfin pouvoir me faire pardonner. Je les regarde tous piocher dans leur assiette, satisfait. Puis, à mon tour, je prends une bouchée de mon plat. J'avale, un sourire aux lèvres. Ça y est, la machine de la mort est lancée.

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