Chapitre 6

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- Réveillez-vous, dit Ivan en ouvrant les rideaux.

- Sortez, geignis-je. Il est encore trop tôt !

- Non, justement, nous sommes en retard !

Mécontente, je grognai et sortai de mon lit.

- Que voulez-vous ? demandai-je en croisant les bras sur ma poitrine.

- Lavez-vous, j'ai demandé à Nébula de vous porter votre déjeuner ainsi que votre tenue du jour.

- Qui est Nébula ?

- Votre femme de chambre. Maintenant, dépêchez-vous, elle ne devrait pas tarder.

Groggy, je m'exécutai. La fête d'hier m'avait exténuée. Aussitôt m'avait-on remis ma cape que tous les convives s'étaient éclipsés, me laissant seule en compagnie de mon cercle que je devais à présent appeler Adélaïde. Il s'avérait que cette dernière, étant la propriétaire de ce domaine, avait l'obligation d'héberger plusieurs étoiles qui selon elles pourraient occuper une place importante dans la société.

Ivan, moi, et un autre jeune homme que je n'avais pas encore eu l'occasion de rencontrer faisions donc partie de la maison de la rose.

J'étais perplexe face à l'avenir qui se dessinait devant moi. La prêtresse m'avait accordé une place importante alors que je venais à peine d'arriver. Je n'avais pas d'aptitude particulière. Rien ne me destinait à être adulée de tous, au contraire... Tout était en trop chez moi : j'étais trop maladroite, trop honnête, trop introvertie. Mon nez était trop gros, j'étais trop maigre. Toutes ces choses accumulées faisaient que presque personne ne m'appréciait. A l'inverse d'Ivan, je n'avais pas la carrure d'un leader.

Revenant à la réalité, quand mon bain fut prêt, je me dépêchais de faire ma toilette. En moins de quinze minutes, j'étais propre comme un sou neuf. J'enfilais le douillet peignoir mis à ma disposition, et sortais de la salle de bain.

- Parfait, vous êtes pile dans les temps, Nébula viens d'arriver. Je reviens vous chercher dans une demi-heure, la prêtresse m'a chargé de vous conduire à votre première réunion du cercle. Il reste quelques détails à régler avant que vous puissiez pleinement débuter votre quête.

Il parlait beaucoup trop, je n'avais jamais le temps de tout retenir, et en plus, il s'enfuit au pas de course me laissant seule avec ma « femme de chambre »

- Milady, fit-elle d'une voix aigre qui sous-entendait qu'elle n'avait nul envie de se trouver ici.

Elle était petite, et pourvue de longs cheveux auburn et avait des très d'une finesse époustouflante. Cependant, son visage était comme figé dans une éternelle expression hautaine, ce qui lui enlevait tout charme. Elle ne me plaisait décidément pas...

Ravalant mes aprioris, je me présentais :

- Ashley Wensley. Enchantée de faire votre connaissance.

- Nous n'avons pas le temps pour ces banalités mademoiselle, répliqua-t-elle en saisissant une de mes couvertures. Il faut vous préparer.

- Eh bien, je vous laisse faire.

- Tenez, enfilez cela pendant que je fais votre lit.

C'était une longue jupe plissée noir, et un chemisier blanc. En soit, rien de très extravaguant...

Revenant vers Nébula, pour poursuivre ma préparation, elle se contenta de me désigner une table où était disposée une tasse de café, et un croissant. C'était un déjeuné très français...

Quinze minutes plus tard, ma femme de chambre me jugea présentable pour sortir. Elle m'avait ajouté une lourde ceinture en cuire noir, assortie à des bottes à talons taillé dans la même matière et mes cheveux étaient emprisonnés dans un chignon un peut trop élaborer à mon goût.

- Parfait, s'écria Ivan qui venait d'arriver. Enfilez votre cape et nous pourrons enfin y aller.

Sans plus attendre, je fus une fois de plus bringuebalée dans ces innombrables couloirs.

- Je vous ai fait coudre quelques vêtements, m'informa Ivan au détour d'une alcôve. Notre réunion a lieu dans plus d'une heure ce qui nous laisse le temps d'aller voir la couturière. Plusieurs tenues sont déjà prêtes.

- D'accord, ça ne me pose aucun problème.

- Excellent, allons-y.

Nous entrâmes dans une immense pièce remplies d'étoffes en tous genres, où se trouvait une femme concentrée dans les broderies qu'elle terminait sur un chapeau blanc.

- Milord, Milady, fit elle en se relevant précipitamment. Je terminais justement votre commande.

- Ne vous en faite pas, nous sommes légèrement en avance.

Sans se précipiter, elle se leva en faisant bruisser sa longue robe corail et se dirigea vers une gigantesque armoire où étaient entreposés d'innombrables paquets. Il y en avait jusqu'au plafond !

En à peine quelques seconde, la couturière avait déployait de longues ailes translucide, et s'élevait dans les airs à la recherche de notre commande. J'étais abasourdie. Ivan ne se souciait même pas de ce qui se produisait sous ses yeux. Tirant sur sa manche pour attirer son attention, je bégayais :

- Vous...vous avez vu ?!

- Quoi ?

- Elle a des ailes...

- Oh, s'exclama-t-il. Désolé, j'ai oublié de vous en parler.

Toujours perplexe, j'attendais ses explications :

- Elle a des ailes grâce à son μυστικιστικό κόσμημα, prononça-t-il difficilement.

- Un bijou mystique ?

- Oui, c'est ça, quand un assassiné accomplit sa quête, il obtient un bijou de la forme de son animal mystique, fait à partir du sang de son meurtrier. Ce dernier lui confère certains pouvoirs... Dans le cas de cette femme, son animal mystique est la libellule, il lui permet donc de voler.

- Impressionnant, m'extasiais-je. Et vous alors ? Quel est votre animal mystique ?

- Encore une fois, ce n'est pas une question qui se pose et vous le découvrirez bien assez tôt...

J'étais déçu qu'il ne veuille pas partager la nature de ses dons avec moi. Au moins, je venais d'en apprendre d'avantage sur la nouvelle nature. J'allais avoir des pouvoirs ! C'était inespéré. Moi qui avant de mourir pensais que la magie n'existait pas, j'étais servie.

- Voulez-vous voir ce que j'ai déjà cousu pour vous, Milady ? me questionna la couturière.

- Oui, bien sûr !

Sans plus tarder, la jeune femme étala ses créations sur la table :

- Pour le moment, je n'ai pas eu le temps de vous coudre plus d'une tenue de jour.

Elle m’avait fait un pantalon en cuir, ainsi qu’une ceinture assortie. Une blouse mordorée. Enfin, elle leur avait combiné un manteau, des gants, et un chapeau brodé de quelques fleurs bleues. C’était un style particulier mêlant modernité et élégance des toilettes du dix-neuvième siècle.

- C'est magnifique, m'extasiais-je en touchant le tissu soyeux de mes nouveaux vêtements. Votre travail est remarquable.

- Heureuse que cela vous plaise Milady. Je terminerai vos autres tenus de jours au plus vite.

- Impeccable, entonna Ivan. Je ne me suis pas trompé sur vos goûts. J’avais peur que cela ne vous plaise pas. J’étais tenue de respecter les règles qu’impose la bienséance. Malgré tout, vous verrez, certains les jugerons comme étant irrespectueuses.

- Ma fois, j’ai atterri dans un couvent, plaisantais-je.

Ce code vestimentaire ne me dérangeait pas vraiment. Je n’aimais pas porter d’habits aguicheurs, exagérément courts, ou bien encore trop moulants. On pouvait être remarquable en restant distingué. Ca me changeait de la mode terrienne. Là-bas, moins on portait de tissu et mieux c’était !

- Pourrez-vous les faire porter dans la chambre de lady Ashley ? demanda Ivan, en scrutant désespérément sa montre.

Dés que la modéliste ait hoché la tête, une fois n’était pas coutume, mon « protecteur» me guida vers notre prochain rendez-vous.

- La réunion qui va suivre risque de durer assez longtemps. Quand vous entrerez dans la salle, personne ne doit voir votre visage. Vous rabattrez donc votre cape.

- Pourquoi ? La plupart des adeptes du cercle de l’étoile pourpre m’ont aperçu hier.

- C’est une tradition, on doit avoir le visage couvert lorsque l’on pénètre dans le sanctuaire du sang.

- C’est un peu glauque comme nom…

- C’est là que tout a commencé, là où le premier assassiné est arrivé… Chaque réunion de chaque cercle se déroule dans ce lieu sacré.

- Où se trouve-t-il ? questionnais-je, alors que nous nous engouffrions dans les jardins.

- Il est dans la forêt où je suis venu vous chercher hier. D’ailleurs, j’ai fait préparer une dilivapeur.

- Qu’est-ce que c’est ?

- C’est une diligence volante conçue par Rudolf Diesel.

- L’inventeur du moteur Diesel ?

- En personne ! Il a été assassiné le 30 septembre 1913. Vous pouvez même le rencontrer !

- Impressionnant !

- Vous allez vous y faire rapidement. De nombreuses personnalités historiques font à présent partit des cercles extérieurs. Ce sont de simples citoyens…

- Est-ce que Marie Stuart vie ici ?

- Non, elle a décidé de ne pas se venger.

- J’aurais tellement voulu la rencontrer, rêvassais-je.

- Ce n’est pas tout, mais nous risquons d’être en retard si nous continuons à bavarder. Vous montez ?

J’étais tellement absorbée par notre discussion que je n’avais pas vu arriver notre moyen de locomotion. C’était un cube en métal qui pouvait à peine accueillir deux personnes. Il était pourvu de deux minuscules fenêtres, et le toit était recouvert d’innombrables cheminés où s’échappait un flot continue de vapeur qui permettait à l’engin de s’élever à quelques centimètres du sol. Sans plus attendre, je saisis la main d’Ivan et montais. Une fois installé, mon compagnon de route frappa trois coups sur le plafond, et comme par magie, l’engin se mit en route.

- Il… Il n’y a pas de chauffeur ? balbutiais-je.

- Et non ! Ne vous en faite pas, vous vous y habituerais rapidement.

J’avais tellement de choses à assimiler en si peu de temps. Voulant m’accorder un instant de calme dans toute cette cohue, je fermais les yeux et pour la première fois depuis ma sortie de l’hôpital, je lâchais prise…


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