Chapitre 26 : Enfreindre les règles

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Des bruits de verres qui s’entrechoquent me tirent de mon sommeil. Les yeux clos, je tends ma main droite qui part à l’aventure, là où Gabin s’était endormi. Sans surprise, je tripote une place vide et froide, mais une délicieuse odeur de café emplit mes narines et me met l’eau à la bouche. J’ouvre un œil, puis le second et découvre mon « sexfriend » qui s’affaire, en caleçon, à préparer une table pour le déjeuner.

— Bien dormi, ma belle au bois dormant ?

Pour toute réponse, je m’assieds sur le bord du lit en souriant puis prends bien le temps de détendre mes membres endoloris, le tout, en bâillant comme ce n’est pas permis. Le matin, je ne suis vraiment pas du genre glamour, mais tant pis…

— Tiens, enfile ça avant d’attraper froid, dit-il en me désignant du doigt, l’un des deux peignoirs qui trônent sur le dossier du canapé.

Puisque je suis entièrement nue, je m’exécute et le rejoins à table en secouant mes cheveux désordonnés. Des nœuds immenses emmêlent mes mèches, je crois que me nuit a été agitée. Un bon bain bouillant et des soins s’imposent dans ma liste de choses à faire du matin.

— Mets ton peignoir s’il te plaît, tu me perturbes comme ça, lui dis-je en faisant des yeux doux, mon regard lorgnant sur la forme de son sexe sous son caleçon noir.

Gabin éclate de rire et fait mine de mettre ses mains pour cacher ses formes, mais enfile quand même son vêtement avant de me tendre un croissant. Je le prends avec plaisir et croque une bouchée avant de laper une gorgée de café. Je ne sais pas si je dois le remercier pour tout ce qu’il fait pour moi depuis que je le connais ou si je dois juste me taire, apprécier ses gestes et lui rendre la pareille dès que l’occasion se présente.

— Je travaille cet après-midi, mais si tu veux, tu peux venir manger chez moi ce soir et même rester pour la nuit ? Je n’ai pas envie que tu sois seule…

— Je crois que tu en as assez fait pour moi, mon chou. Il faut que tu penses à toi aussi. Tu sais, je me sens mal que tu sois obligé de t’occuper de moi, j’ai l’impression d’être un fardeau, dis-je en rougissant, même si l’idée de découvrir où il habite m’enchante aussi.

— Ne dis pas de conneries, Alicia, si je suis là et si je te propose ça, c’est parce que je le veux bien ! Ce n’est pas une obligation, j’aime vraiment beaucoup ta compagnie…

— Moi aussi, j’aime beaucoup passer du temps avec toi, réponds-je sans plus d’informations.

Le problème est que, plus je passe du temps avec lui, plus cette chose dans mon coeur grandit. Je ne sais pas du tout s’il s’agit d’amour, mais des papillons s’envolent lorsque je pense à lui, lorsqu’il est à mes côtés. Et puis, il faut dire qu’il est vraiment très mignon, très attentionné et c’est un coup en or au plumard ! Mais ma fièvre est bien plus forte lorsque je pense à Daegan. Mon coeur se met à battre la chamade, mes jambes peinent à me tenir debout, mes mains transpirent et je pars dans un monde où lui et moi, nous sommes en couple, mariés, heureux et épanouis. Pourtant, je n’ai jamais passé aucun moment de détente avec lui, si ce n’est la soirée strip-tease, la seule fois où je daignais lui parler, la seule fois où il fît attention à moi…

Je suis totalement perdue, incapable de démêler mes sentiments pour l’un ou l’autre. Tout ça me dépasse, c’est tellement difficile !

Et puis, que sais-je sur l’amour ? Je n’ai vécu qu’une histoire qui, pour être honnête, ma déçue dès le début et surtout, a détruit tout ce que je pensais connaître, tout ce que je croyais savoir sur les sentiments amoureux. Je suis vide, indécise, incomprise, mais aussi, incorrigible puisque malgré le mal que ça fait, je m’attache, non pas à un homme, mais deux !

Mon coeur balance depuis toujours pour Daegan et pourtant, Gabin trouve lui aussi son chemin dans cet organe de malheur. Je crois que je suis dans la merde. Dans une énorme merde, jusqu’au cou. Je suis en train d’enfreindre la seule règle que je m’impose et doublement pour couronner le tout ! Pourquoi est-ce que ces deux hommes font chavirer mon coeur ? Comment est-ce seulement possible ? Je suis habituellement le genre de femme qui n’aime personne, qui prend du plaisir et qui range au tiroir un nombre incalculable d’hommes afin de ne pas céder à la tentation. Mais cette fois, c’est plus fort que moi. Je ne peux faire autrement…

Ce qui me mène à penser à ce rêve que j’ai fait cette nuit. Ce rêve ou Gabin me disait qu’il m’aimait. Ce rêve dans lequel je lui répondais que mes sentiments envers lui sont très forts et que je l’aime plus que tout, plus que Daegan, plus que moi-même.

Mais… était-ce seulement un rêve ?

Mes prunelles se posent sur celles de Gabin. Sans ciller, j’essaie de lire en lui, tentant de voir si une étincelle méconnue brille dans son regard énigmatique. Il me scrute à son tour en buvant son café. Quelque chose d’étrange se propage entre nous, comme une conversation silencieuse de pensées à pensées. Puis Gabin se mord la lèvre inférieure et, déstabilisée, je me cache derrière ma tasse. Les papillons se réveillent dans mon bas ventre et une fois de plus, mon coeur tambourine. Je suis même certaine qu’il peut l’entendre cogner dans ce silence perturbant.

— Tout va bien ? me demande-t-il, un rictus charmeur sur les lèvres.

— Oui… Oui, super bien ! je réponds en tentant d’être convaincante.

Mais la vérité est que je suis perturbée. J’ai envie de me jeter sur lui et de l’embrasser jusqu’à ce que mon souffle s’épuise. J’ai envie de le rendre fou de désir jusqu’à ce qu’il me prenne violemment sur cette fichue table et rassasie ma soif éternelle de sexe, mais j’ai aussi envie de fuir à toutes jambes. De laisser derrière moi ces deux hommes qui embrouillent mes pensées, mon coeur et ternissent mon âme que j’ai eu tant de mal à reconstruire.

— Je te trouve étrange, Alicia, si quelque chose ne va pas, tu peux me le dire, d’accord ? J’espère juste que ça n’a rien à voir avec notre égarement d’hier soir…

— Non, Gabin, ça n’a rien à voir avec ça, au contraire, je te remercie pour tout ce que tu as fait pour moi, même pour ce moment de détente particulier et plus que plaisant. Mais... si tu veux savoir, je me sens tiraillée, prise entre deux feux et je déteste ça.

— Que veux-tu dire par là ? me demande-t-il en posant ses deux mains sous son menton.

— Je… Je ne suis pas encore certaine de ce que je ressens. Je vais mettre mes idées et mes émotions en ordre aujourd’hui et si j’y parviens, je te parlerai de mon dilemme ce soir, si tu veux toujours que je vienne chez toi, évidemment.

— Ah ! Là, je suis content ! Tu dors chez moi aussi ?

— C’est préférable pour ce que j’ai en tête, dis-je malicieuse.

— Tu es vraiment une diablesse, tu sais ?! c’est sans doute pour ça que je t’aime…

Mes yeux s’agrandissent de stupeur en entendant cette phrase. Gabin le remarque et se reprend aussitôt :

— Que je t’aime comme amie, hein. Ne va pas croire que je t’aime en amour, je ne sais même pas ce que ça veut dire, enfin, tu comprends hein ?

Attends, pourquoi il bégaye ?

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