36. La dernière séance ?

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Un soir d'automne, je suis dans la file d'attente du cinéma pour me faire ce film que ma copine Amélie voulait tant voir.

Nous nous étions retrouvées après une longue absence et surtout après les pérégrinations de ma vie sentimentale.
Ça m'avait fait plaisir de la voir, de repasser du temps en sa compagnie.
J'étais toujours avec Arnaud, à qui je n'avais rien dit sur ce qu'il s'était passé lors de mon voyage à Bordeaux. Ce fameux séjour passé chez mon ex.
J'étais revenue un peu échaudée par ma discussion avec lui, au sujet de ce que l'on va appeler mes écarts de conduite. Et bien sûr chamboulée, car il avait, malgré tout cela, quand même avoué, qu'il ressentait encore des sentiments amoureux envers moi.

Mais, le fait de retourner dans mon train-train avec mon doudou m'avait fait du bien. J'avais retrouvé un espèce d'équilibre, entre mon couple, sa petite routine, et un homme que je savais encore amoureux. Il y avait quelque chose de rassurant dans tout cela, mais je le dis avec le recul de la vingtaine d'années écoulées car à l'époque ce n'était qu'une espèce de ressenti physique, chimique, ou je ne sais trop quoi d'autre encore, mais en aucun cas, quelque chose de calculé.

J'insiste bien sur ce point.

Bref, voilà où j'en étais au retour de la Gironde. De l'eau a coulé sous les ponts, ma vie a repris le dessus, tout en gardant mes pensées pour Christophe dans un coin de ma tête.

Mais voilà que plus d'un an plus tard, c'est carrément un vent de fraîcheur qui vient de souffler sur ma vie avec le retour d'Amélie.
Et que de surprises ! Le beau black qu'elle avait rencontré le soir de notre examen était réapparu, et il était devenu son petit ami officiel depuis, et, à mon grand bonheur, tout roulait. Ils formaient un beau petit couple, qui avait l'air solide. De ce que j'avais vu, à mon sens, ils étaient bien partis pour nous faire un bon bout de chemin ensemble et... de magnifiques petits métis.

Nous nous sommes donc retrouvées comme si nous nous étions quittées la veille et, comme avant, nous avons organisé des sorties, des dîners. Pas seulement à deux, mais aussi à trois, et à quatre également.

Mais, bien évidemment, nous nous réservions quand même, régulièrement, de petits temps entre filles pour le shopping ou faire diverses sorties.
C'est ainsi, que nous sommes devant cette salle de cinéma pour aller voir ce film qu'elle ne voulait absolument pas rater, alors que moi je n'étais pas très enthousiaste... mais bon... devant son insistance, j'ai bien fini par céder.
Ce soir là, il fait très bon pour la saison. Je suis habillée simplement, en jupe et chemisier avec un manteau et des bottes.
Nous faisons partie des premiers, donc la chance de pouvoir choisir nos places, même s'il n'y avait pas grand monde. Effectivement, la météo incite plus à la déambulation en ville et aux discussions en terrasse.
Nous nous plaçons donc au plein milieu d'une rangée presque tout en haut de la salle.
Amélie s'assied à ma gauche. Je m'installe confortablement et place mon manteau sur mes genoux. La lumière s'éteint et les publicités et bandes-annonce commencent.
Des gens s'installent encore dans la salle, nous les voyons à contre-jour devant nous, ou les percevons sur les côtés. Notamment un homme vient s'installer sur le fauteuil juste à ma droite. Il peut, même s'il y a bien cinq six places de libres avant mes voisins les plus proches.
Les extraits défilent, un ou deux films attirent mon attention. Je jette un coup d'oeil à Amélie qui semble absorbée par l'écran. Elle tourne la tête vers moi, et me sourit.
Le film démarre, je sens bien qu'Amélie plonge direct dedans. Moi un peu moins, mais je me laisse transporter petit à petit. J'ai quand même toujours un peu de mal avec le besoin qu'ont les américains pour monter en épingle l'héroïsme de leurs protagonistes... Mais, bref.
Mon voisin apparemment a du mal à trouver sa position car il bouge beaucoup sur son fauteuil.
Ils sont quand même forts ces américains, car je me laisse embarquer dans l'histoire, je commence même à m'identifier à la petite amie du héros. Notamment dans cette scène d'amour, où forcément tout est réuni pour que cela fonctionne. Musique, lumière, léger clair obscur apporté par les clayettes des fenêtres. On ressent bien la chaleur étouffante de cette après-midi, la peau des protagonistes perlant de sueur. Oui je suis dedans, je me sens enveloppée, embrassée par le héros, j'aimerais bien-être à la place de ce personnage dans cette robe blanche entrouverte. Je sens bien les caresses de ce beau gosse à l'écran. Pourtant ce n'est pas mon genre de fantasmer sur un écran et, en plus, il n'est pas mon genre.

C'est fou je ressens vraiment cette ambiance dans mon corps, la chaleur, presque les baisers, et les caresses, ou plutôt cette caresse.

Cette caresse ?

Il lui caresse le dos alors que je sens un effleurement sur la cuisse droite. Mais non je ne rêve pas ! Ce n'est pas à l'écran que cela se passe mais bel et bien, ici et maintenant dans cette salle de cinéma.
Je suis tétanisée sur place, je ne sais que faire. Ce sont bien des doigts qui effleurent doucement ma peau. Je n'ose regarder ni à gauche, ni à droite. Ma respiration presque coupée, mon cœur commence à battre la chamade.
Je fais une espèce de petit état des lieux rapide, je suis là dans une salle de cinéma, dans le noir ou presque, avec une copine à ma gauche, un homme à ma droite. Et moi, Au milieu, figée avec mon manteau qui couvre mes jambes et que je serre fort.
A l'écran, les personnages sont partis dans une intense valse sensuelle, et cette caresse sur ma jambe agit comme un lien entre l'écran et moi, la sueur dans son décolleté à elle... perle aussi dans le mien.
Je ne sais plus si c'est elle ou moi qui ferme les yeux sous ces caresses et baisers.
Je n'ose pas dégager ma jambe, et... au contraire celle-ci reste bien en place, comme aimantée par cette main.
C'est une main chaude et enveloppante qui se pose maintenant sur mon genou et vient caresser l'intérieur de celui-ci.
La peur, bien vite envolée laisse place à un trouble certain.
Je jette un coup d'oeil à Amélie, elle est belle éclairée par la lumière de l'écran. Je ne lui dis rien, cette folle serait capable de l'encourager ou de m'encourager à faire plus.
Je tente de poser mon regard sur mon genou, mais je ne vois pas bien dans l'obscurité, et il est couvert par mon manteau, mais, effectivement, il y a bien une forme qui ressemble à un bras qui sort de cet endroit et qui rejoint mon voisin de droite.
J'ai de plus en plus de mal à respirer, et je me laisse faire.
Je déboutonne doucement deux boutons de mon chemisier pour me donner de l'air et je constate que la moiteur aussi est bien réelle.
Cette main s'aventure encore un peu plus haut sur ma cuisse.
Dans un premier temps, j'ai, enfin, un réflexe, mes cuisses se rejoignent et emprisonnent l'impertinente. Les caresses s'arrêtent. Je ne contrôle plus rien, je ne sais plus quoi faire. Portée par les événements, je laisse mon corps diriger et, comme une porte s'ouvrant sur l'interdit, mes cuisses s'écartent à nouveau. La main reste pourtant là posée à mi-cuisse, il n'y a guère que son pouce et son petit doigt qui glissent doucement sur ma peau.
Je mets ma main droite sur l'accoudoir, et bien innocemment je la laisse glisser sous son bras, pour venir la poser, fébrile, sur sa cuisse.
La sienne continue sa remontée, s'arrête à portée de petit doigt. Celui-ci qui vient jouer doucement avec le tissu rouge, du sous-vêtement faisant office de barrière. Tissu que je devine déjà bien humide de désir.
De mon côté, ma vue se trouble, l'écran laisse place à une grande forme lumineuse, tout est embrumé. Ma main sur son pantalon, comme commandée par un interrupteur empoigne et compresse le tissu à chaque fois que son petit doigt se rapproche de mon intimité...
Je dois être toute rouge, je me mords les lèvres pour ne pas faire plus de bruit que cette respiration saccadée.
Sa main se rapproche encore un peu. Effectivement, le plus chanceux de ses doigts, son auriculaire arrive d'abord à se poser sur le tissu à l'endroit fatidique. Il ne peut que deviner le désir qui me traverse. Ensuite, au prix d'une petite gymnastique pas si ardue que cela, il arrive bel et bien à se faufiler sous le tissu et à toucher le Mont de Vénus. Je glisse tout doucement en basculant mon bassin vers l'avant pour l'aider dans sa découverte. Il effleure mon petit bouton et s'immisce tout doucement entre mes lèvres.
Heureusement, qu'il y a de l'action à l'écran et que le son est fort car je n'ai pu réprimer un petit "oh" de plaisir gêné.

Une autre main vient envelopper la mienne qui, oubliée, était en train de littéralement froisser son pantalon.
Dès le contact établi, le message semble passer. Il est temps pour moi de passer aux choses sérieuses. Ma main se décrispe et se laisse attirer sur la bosse qui tend le tissu fin de son pantalon.
Bosse, je dis bosse, mais c'est plutôt une montagne que je rencontre.
Je sens quelque chose d'énorme palpiter sous cette fermeture.
Un instant ma vue se précise, je vois toutes ces têtes en contre-jour placées devant moi en contrebas et le héros qui sur l'écran qui apparemment tente de faire voler un avion vers de lointaines terres ennemies. En continuant mon tour d'horizon, je distingue les petites lumières brillantes de la sortie et des toilettes qui scintillent de part et d'autre de la première rangée de sièges inoccupée. D'un côté la fuite, l'extérieur, de l'autre un possible endroit de furtive rencontre entre deux inconnus plus absorbés par la découverte intime de son voisin que par les effets spéciaux de ce film hollywoodien.
J'imagine alors une autre scène que celle diffusée sur cet écran géant, une scène plus réelle dans laquelle je me penche pour glisser à Amélie un :" je reviens" pour me lever et descendre l'allée de gauche discrètement vers les toilettes, en entendant le bruit lointain d'un fauteuil se refermant en haut de la salle.
Je me vois franchir cette porte feutrée, sentir la fraîcheur de l'ambiance froide de ces sanitaires. Le son du film s'atténue, pour être assourdi lors de la fermeture de la porte derrière moi.
Je ne sais pourquoi, mais c'est bien vers la porte ayant un pictogramme désignant un homme que je me dirige. En la franchissant je suis un peu éblouie par la lumière blanche des néons qui reflète sur le carrelage de la pièce. La porte ne se referme pas car cet homme apparaît déjà derrière moi.
Il vient se plaquer dans mon dos et ses mains inquisitrices parcourent mon corps. Les miennes posées à plat sur le marbre froid des lavabos sont, elles, plus sages. Ma jupe relevée sans précaution et un bruit de fermeture éclair se fait entendre. Une main tire prestemment ma culotte vers le bas, celle-ci passe à peine mes genoux qu'un énorme serpent vient déjà se faufiler entre mes fesses pour tenter une percée entre mes lèvres brûlantes d'impatience.
Oui je l'imagine bien cette scène où prise rapidement et passionnément je crie mon plaisir sous les coups de boutoir cet inconnu.

Ce cri étouffé par la scène d'action du film qui me ramène à la réalité dans laquelle il a sorti son, effectivement, énorme membre qui vibre presque sous mes doigts. Quel contraste entre sa douceur, sa chaleur et sa taille qui me donne l'impression d'avoir de tous petits doigts. Réalité étrange et surréaliste dans laquelle, il n'y a qu'un ou deux doigts qui arrivent, à peine, à l'orée de mon corps humide et qui préfèrent venir caresser mon petit capuchon. .. non sans me donner du plaisir.
Je vous avouerai que de mon côté, c'est une main timide qui touche cet homme. Je le serre plus que je ne le caresse tellement je suis impressionnée, et sentir cette chose palpiter sous mes doigts, c'est de la folie pure. Sa turgescence douce et humide est si chaude.
Je ne sais pas où nous allons mais... nous y allons.
C'est si... lent mais si intense..
Lorsque je l'empoigne tel un levier de vitesse je sens l'humidité de cette verge au creux de ma main, comme un lubrifiant. Si doux.
Et ma jambe droite qui lutte, qui tente de pousser cet accoudoir qui l'empêche de s'ouvrir au maximum. Je sens sous ma main gauche, toujours accrochée à mon manteau, les mouvements de son poignet sous ma jupe.
Lorsque je sens, en un instant, une espèce de crispation dans ses gestes, je comprend qu'il est au bord de l'explosion. Effectivement sa main droite vient interrompre mes faibles mouvements. Je sens qu'il cherche quelque chose. Il vient poser un tissu sur ma main. Ah, oui, effectivement il vient de la coiffer avec un mouchoir. Je reprends alors mes petits mouvements en serrant comme je peux cette espèce de liane tendue vers le plafond. Je constate qu'il n'est pas si insensible vu les gestes désordonnés sous ma jupe et ma culotte.
Soudain, et sans que je ne le vois venir, il réussit à glisser annulaire et auriculaire en moi. Je ne sais comment j'arrive à réprimer ce cri de plaisir/surprise qui manque de m'échapper. Alors que ses doigts se tendent en moi, un liquide chaud vient me couler en grande quantité sur la main. Ses doigts me quittent alors et d'un geste pressé il tente d'essuyer, je m'en rends bien compte, tout ce liquide. Il frotte aussi un peu ma main que je ramène vers moi en l'essuyant contre le tissu du fauteuil de devant.
Le film n'est pas encore terminé, et, du coin de l'œil, je le vois porter sa main gauche à sa bouche, il... il me goûte, le cochon !
Avec tout ça, je m'étais laissée glisser pour faciliter ses caresses, je suis donc toute affalée. Je me redresse donc, j'ai la main qui colle encore un peu mais ce n'est pas grave.
Je regarde Amélie, elle ne s'est aperçue de rien.
Le film se termine, je suis plutôt dans mes sensations de plaisir et aussi de gêne d'avoir encore fait quelque chose d'incongru.
Le générique.
Mon voisin se lève rapidement et trace en direction de la sortie sans que je puisse voir son visage.
Amélie s'étire les bras, elle me sourit en me disant :
- J'ai bien aimé ! Et toi ?
Je devais être toute rouge. Elle me regarde puis :
- Ça va ?
- Oui ça va, c'est juste que...
Elle fait une drôle de tête puis :
- C'est quoi cette odeur ?
Effectivement, je me rends compte que ça sent fort : mélange de sueur, sans doute, les hormones et peut-être un peu du reste...
- Ah. Ben, justement c'est mon voisin, il dégageait une drôle d'odeur, ça, ça m'a un peu gênée...
- Fallait le dire, on se serait déplacées !
- Tu étais dans ton film...
Je fais mine d'abréger, ne voulant pas m'étendre sur le sujet.
Et nous nous levons pour quitter la salle.
- Attend Amel', je dois passer aux toilettes.
Je file aux sanitaires où je me regarde dans la glace, effectivement encore toute rouge, je reconnais ce maudit regard plein de plaisir interdit. Je souffle un bon coup en me reboutonnant le chemisier. Je m'enferme dans les toilettes. Ayant fait ce que j'avais à faire, je sens que je suis encore très sensible, je me contiens et retiens mes gestes.
Ressortie, je me lave les mains puis me rafraîchis le visage et je me dépêche de rejoindre Amélie.

Hors du cinéma, j'apprécie l'air frais de ce début de nuit, à marcher aux côtés de mon amie. En prenant son bras, je terre bien mon petit secret au creux de mon esprit, et je souris de cette nouvelle aventure, en me demandant si cela n'arrivait qu'à moi et pourquoi tout cela m'arrivait à moi.
C'est vrai, quoi, ce n'est pas possible autrement : je dois avoir un néon au dessus la tête, une grosse flèche clignotante qui me désigne comme une coquine et qui attire tous les gros cochons de la ville...


Ce n'est qu'une fois rentrée seule chez moi, au moment du coucher, que la raison est venue se rappeler à moi, ce que j'avais fait, accepté, ce n'était pas top.

Déjà pour moi, mon intégrité, car ce genre de comportement est proche de l'agression sexuelle... mais bon... j'étais consentante... ce qui me fait venir au deuxième point, il ne fallait pas l'être, ne serait-ce que par respect pour mon copain et pour ce couple que nous formions depuis presque un an et demi...

Je constatais que, même avec cet homme, mes vieux démons lubriques revenaient me hanter. Ce n'était pas uniquement dû à une éventuelle lassitude de mon couple, cela devait être en moi. À la différence près, que dorénavant j'avais décidé de lutter contre tout cela. Ce fut donc, en quelque sorte, pour moi, la dernière séance.

Je ne vous cache pas qu'une donnée importante flottait dans mon esprit comme une petite musique d'ambiance : je savais qu'à 600 kilomètres de là, un autre homme allait bientôt achever son CDD. J'ignorais s'il allait être prolongé ou passé en CDI, mais au fond de moi, quand je pensais à cet homme qui, plus d'un an auparavant, m'avait avoué être encore amoureux de moi, et avec qui on se donnait encore des nouvelles, ça me faisait du bien au moral et me mettait du baume au coeur : je crois qu'au fond de moi j'espérais bien qu'il revienne sur Lyon...

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