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« L’ambiance est différente de ce que je pensais. reconnut Konatsu.

- À quoi t’attendais-tu ? répondit Hyūga. La majorité des habitués vit certes du crime, mais ces gens viennent ici pour se détendre et oublier leurs soucis. Ils ne vont pas tirer des têtes d’enterrement. »

Les deux espions venaient d’entrer dans la taverne et cherchaient une table libre. L’atmosphère était chaleureuse, malgré la mine patibulaire de certains convives. La salle, plutôt grande, avait un plafond bas et un comptoir se trouvait au fond. Ils repérèrent des places sur le côté droit et allèrent s’y assoir. Immédiatement, une serveuse vint prendre leur commande.

« Deux verres de vin rouge. » demanda Hyūga.

Elle alla leur chercher. Quand elle les leur apporta, le Major lui posa une autre question :

« Dites-moi, connaîtriez-vous un dénommé Anaideias ? »

Une expression incertaine passa sur ses traits puis elle lui indiqua un individu de l’autre côté de la salle.

« C’est cet homme, là-bas. Pourquoi voulez-vous savoir ?

- On m’a parlé de lui, il paraît qu’il connaît Aïsto.

- C’est vrai. Mais à votre place, j’éviterais de lui parler de ça maintenant. Il ne mélange pas affaires et loisir.

- Pouvez-vous quand même lui dire que j’aimerais le rencontrer ?

- Si vous voulez. » dit-elle d’une voix hésitante.

Elle traversa la salle et arriva à la table de l’autre. Il sembla légèrement contrarié d’être interrompu dans sa discussion avec ses compagnons, mais eut l’air intrigué en apprenant le motif de cette intervention. Il quitta sa place et rejoignit les deux espions d’une démarche assurée. Il portait des vêtements sombres sous lesquels se dessinait une musculature bien entretenue. Ses cheveux bruns lui arrivaient à la moitié du dos, et ses yeux acier associés à son visage anguleux lui conféraient une expression teintée de morgue. Il tira une chaise et s’assit avec eux.

« Alors, commença-t-il, vous vouliez me voir ?

- Je souhaiterais rencontrer Aïsto. » déclara directement le Major.

Le sourire de l’homme se figea.

« Quel est votre nom, déjà ? s’enquit-il.

- Iulius Chrysodicée, et mon compagnon s’appelle Liam Snowhaven. »

Ce dernier fit un signe de tête, et lança un drôle de regard à son supérieur. Il en avait encore trop fait, avec son nom.

« Et pourquoi recherchez-vous Eïrênaios ? poursuivit Anaideias.

- Je suis passionné par l’alchimie, mentit Hyūga, et on m’a dit qu’il possédait un solide niveau en la matière.

- C’est le moins qu’on puisse dire, confirma l’homme, mais il n’est pas ici en ce moment.

- Vous pourriez me mettre en contact avec lui ?

- Je pourrais. Mais je vous trouve trop désinvolte pour être sincère.

- Je me disais que parler d’un ton neutre en gardant l’air impassible m’aurait fait passer pour un espion, plaisanta le militaire, mais je constate que la franchise attise elle aussi la méfiance apparemment. »

L’autre médita ses paroles, puis parut avoir une idée.

« Vous aimez les paris ? demanda-t-il.

- Oui, pourquoi ?

- Si vous me battez au bras de fer, je vous le présente.

- Et si je perds ?

- Je me réserve le droit d’enquêter sur vous.

- Ça marche. »

Konatsu hésita à lever les yeux au ciel. Il se contenta de soupirer discrètement. Entre un supérieur tête-brûlée et un interlocuteur impulsif, il n’était pas tiré d’affaire. Les deux futurs adversaires remontèrent leur manche et se donnèrent la main. Plusieurs habitués de la taverne comprirent ce signe annonciateur, et bientôt un attroupement se forma autour de la table. La confrontation commença. Le soldat savait qu’il n’avait pas grand-chose à craindre, car sans en avoir l’air il était doté d’une certaine vigueur. Cependant il ne dépensait pas toute son énergie car il savait qu’il fallait rester prudent au cas où le duel se prolongerait. De son côté le pirate était surpris par la résistance de son opposant. Il s’attendait à triompher en quelques instants mais l’autre paraissait convertir sa détermination en force physique. L’épreuve de force durait, dans un silence admiratif. La tension se lisait sur les visages des participants. Finalement, le second céda. Son poing heurta la table avec bruit. Un murmure étonné parcourut le public. Le Major lâcha la main du pirate, puis agita ses doigts pour les détendre. Anaideias le considéra un instant d’un air songeur, puis sourit et le félicita :

« Cela faisait longtemps que je n’avais pas été vaincu, tu as du mérite. Reviens dans deux jours ici, à la même heure. Je te ferai rencontrer Eïrênaios. »

Il salua les deux hommes puis s’en alla. L’attroupement se dispersa.

« Vous devriez être plus prudent, Major… lui reprocha son Begleiter.

- Arrête de te faire du souci. Tu vois bien que tout va pour le mieux. Fais-moi confiance, Liam. »

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