« C’est vous, les nouveaux ? »

La question avait été posée par un pirate d’assez haute stature. Ses traits anguleux étaient marqués de quelques cicatrices, et sa peau hâlée s’accordait à ses cheveux bruns et ses yeux brillants. Il était vêtu d’un débardeur gris foncé ne dissimulant rien de son impressionnante musculature, et d’un pantalon déformé de la même teinte que ses bottes sombres. Il s’agissait du capitaine du navire volant, l’un des hommes directement sous les ordres de l’Alchimiste. Il répondait au nom d’Étienne, et se chargeait personnellement du recrutement des membres du clan. Il considéra les trois individus face à lui avec circonspection. Le premier, un homme aux cheveux bleu clair, lui paraissait assez effacé. Il devait être le frère du second, un enfant aux longs cheveux roses tressés, dont l’œil droit était couvert par un bandeau. Le troisième, en revanche, ne lui inspirait que de la méfiance. Il semblait trop avenant pour être sincère.

« Vous avez de la chance, reprit Étienne, Aïsto est là exceptionnellement. Vous allez pouvoir le rencontrer dès le premier jour. Il a demandé à vous voir. »

Il les invita à le suivre et ils traversèrent un certain nombre de couloirs métalliques. Ils arrivèrent à une porte peinte en rouge. Après en avoir reçu l’autorisation, le capitaine les fit entrer et se retira. Les trois nouveaux membres d’équipage observèrent ce qui les entourait. Ils se trouvaient dans un petit bureau dont les murs comportaient des étagères remplies de livres. Par une fenêtre au fond défilaient les nuages. Et en face d’eux, un homme était assis à une table encombrée d’objets divers. Ses cheveux blonds lui arrivaient aux épaules, et son regard bleu était perçant. Il portait des vêtements élégants et un anneau d’or scintillait à son index gauche. De fines lunettes elliptiques lui donnaient un air sévère. Il les regarda tour à tour, gardant une expression parfaitement neutre.

« Bienvenue à bord, commença-t-il, ainsi que dans votre nouveau clan. Vous savez qui je suis, et pour ma part j’ai un peu entendu parler de vous. Pourriez-vous me décliner vos identités à nouveau ? »

Les trois Black Hawks échangèrent un bref regard. Ils avaient convenu de changer de noms et de s’inventer un passé pour ne pas éveiller la méfiance de leur cible.

« Je me nomme Hayao Kamiki, se présenta Haruse, et je suis le demi-frère de cet enfant.

- Je m’appelle Iphis. » précisa Kuroyuri.

Aïsto le considéra avec attention et demanda :

« Ton nom vient de la même langue que le mien, comment cela se peut-il ?

- C’est ma mère qui l’a choisi, mais elle est morte en me donnant naissance. Elle était originaire d’une communauté de nomades, c’est tout ce que je sais d’elle. »

L’Alchimiste hocha la tête, puis s’adressa à Katsuragi :

« Et toi, qui es-tu ?

- J’ai pour nom Isao Yonebayashi, et je connais Hayao et Iphis depuis l’enfance.

- Pourquoi vous êtes-vous engagés chez les pirates de l’air ? s’enquit Aïsto.

- Lorsque le dernier membre de notre village s’est éteint, au moment de la précédente famine, nous nous sommes retrouvés tous les trois livrés à nous-mêmes. raconta Katsuragi. Conscients qu’il fallait assurer notre subsistance, nous avons cherché une source de revenus stable. Notre rancœur à l’égard de l’Empire, dont nous nous sentions abandonnés, nous a menés à cette organisation, indépendante et opposée à l’état, qui de plus pouvait nous offrir une protection et une existence.

- Un choix assez pragmatique, parut plaisanter l’Alchimiste, bien que non dénué de sentiments. »

Il se leva, prit un livre sur son bureau, et le rangea dans la bibliothèque de droite.

« Bien, conclut-il, j’espère que vous vous plairez au sein de votre nouvelle famille. »

Et il les congédia.