- Fabien !

Je me suis retourné, essuyant mes mains sur mon tablier, mes yeux se posant sur Kyllian qui s'avançait vers moi, un léger sourire posé sur ses lèvres. Je le lui ai rendu, m'approchant de lui.

 - Un problème Kyllian ? demandais-je en m'arrêtant à sa hauteur. Par contre il faut que tu te dépêches, je dois y aller, j'ai finis.

 - Justement à propos de ça. J'ai un problème avec mon frère et il faut que je le rejoigne impérativement. Tu veux bien me remplacer pour cette fois ?

 - Oui. J'espère que ça s'arrangera.

 - Merci Fabien. J'ai prévenu le patron, il est ok. Bon, merci et à demain.

 - Oui, à demain.

Je l'ai regardé s'éloigner avant de soupirer et de retourner vers le comptoir. Et me revoilà reparti pour au moins trois heures de travail supplémentaires. Ce n'est pas que je n'aime pas travailler ici, c'est juste que ces derniers temps je remplaçais beaucoup mon collègue et pour multiples raisons. Mais bon, si je peux rendre service, je le fais.

J'ai adressé un sourire chaleureux au client devant moi, ce dernier me le rendant avant de commander sa boisson chaude. Je l'ai mémorisé avant de me tourner vers la machine et de faire couler le liquide brûlant dans un verre en carton, respectant les critères donnés par le client. Une fois le café coulé et prêt, je l'ai pris en main avant de le tendre au monsieur et d'encaisser la monnaie. En relevant ma tête, j'aperçus Névaé, une excellente amie, avant de lui adresser un grand sourire et de faire un geste de la main. Elle me le rendit et me fit signe d'attendre quelques minutes pour me parler.

J'ai continué de servir mes clients, mes yeux se posant sur ma montre de temps à autre. J'ai retenu de justesse un baillement avant de remarquer qu'il n'y avait plus personne devant mon comptoir. J'ai esquissé un sourire avant de m'essuyer les mains et de m'approcher de la brune qui patientait avec son thé matcha dans sa main. En me voyant arriver, elle releva la tête et souria, me faisant signe de m'asseoir.

 - Salut Fabien. Tu as vérifié si tu n'avais pas d'encre noir dans les cheveux ?

 - Ahah, très drôle jolie coeur.

 - Tu ne vas pas lâcher ? demanda moqueusement la femme en esquissant un rictus.

 - Non, avouais-je en souriant à mon tour. Et puis, c'est très vilain de se moquer de ma couleur de cheveux.

 - Ahah, je te taquine. Tes cheveux noirs corbeaux sont si beaux. Et qu'est-ce qu'ils sont doux !

 - Merci ? Mais tu sais très bien que je ne compte pas les laisser pousser de trop.

 - Je sais chéri. Cette coupe te va à merveille. Et puis, je viens de repenser qu'il faudrait que tu passes à la maison. Ça doit bien faire deux mois que tu n'es plus venu, je me trompe ?

 - Si longtemps ? Tu sais que ça ne me dérange pas mais ça ne dérangera pas ta soeur ? Kelly je crois.

 - Oui. Et non, ne t'en fais pas. Elle arrive à cohabiter avec Dimitry, alors pourquoi pas avec toi pendant une soirée ?

 - Dimitry.. Ah, je vois. Il s'est enfin décidé à vivre avec toi.. répondis-je en grognant.

 - Fabien.. Je sais bien que t'arrives pas à te remettre du fait que j'ai préféré être avec Dimitry qu'avec toi mais ce n'est pas une raison pour le détester.

 - Dois-je te rappeler que nous ne nous apprécions pas mutuellement ? Ou joue-t-il si bien son rôle de gentil petit-ami parfaitement qu'il donne l'impression qu'il n'y a que moi qui ne l'apprécie pas ?

 - J'ai compris ! Tu préfères qu'on aille chez toi ?

 - Non, il va encore m'engueuler.. Je préfère qu'on ne fasse rien du tout. Comme ça je ne verrais pas sa sale tête.

 - Fabien..

 - Ok ! J'ai rien dit.

J'ai tourné ma tête sur le côté, retenant un soupir ainsi qu'un roulement d'yeux. Sérieusement, pourquoi elle voit pas que son copain ne m'aime pas et que c'est réciproque ? Oh et puis zut alors. J'ai jeté mes yeux à mon comptoir avant de me lever et d'y retourner, abandonnant Névaé avec son thé matcha. Je devrais éviter de traîner, je dois ça à Kyllian, après tout j'ai accepté de le remplacer.

J'ai adressé un sourire à un client qui arrivait avant de prendre sa commande et de reprendre mes activités. Je commençais à avoir beaucoup de clients et mes anciennes heures commençaient sérieusement à me faire prendre conscience de mon épuisement. J'allais pas tenir très longtemps comme ça..

 - Fabien !? Mais, ça ne devrait pas être Kyllian à ta place ?

 - Patron !

J'ai écarquillé mes yeux en voyant Julien, mon patron, qui me fixait sévèrement, essayant de comprendre pourquoi je me retrouvais à faire le service de Kyllian. J'ai avalé timidement ma salive avant de soupirer et de planter mes yeux dans ceux de Julien. Il me fit un mouvement de tête, partant dans la salle de repos des employés. J'ai soupiré une nouvelle fois, fermant mon comptoir et d'essuyer mes mains, me dépêchant de rejoindre le blond.

Je l'ai retrouvé assis sur le petit fauteuil, sa tête entre ses mains tout en gromelant. Il releva sa tête et me fixa sans rien dire alors que je m'asseyais en face de lui.

 - Fabien... Je peux savoir pourquoi tu prends presque tout le temps les heures de travail de Kyllian ? Ça doit faire cinq jours qu ec'est comme ça ! Explique moi.

 - Ben.. C'est qu'il a des problèmes en ce moment.. Et du coup je le remplace, parce qu'il me le demande..

 - Dis-moi, es-tu vraiment sûr qu'il a des " problèmes " au point de te faire prendre ses horaires et de ne pas bosser ?

 - N-non.. Mais il n'est pas comme ça..

 - Fabien, là n'est pas la question. Bon, dernière fois que je te revois à sa place. Va te changer et rentre chez toi, je vais finir ce service et enchaîner le mien. Tu dois être épuisé à force. Sors et prends l'air. Tu le mérites. Et crois moi, j'aurais une bonne discussion avec notre collègue.

 - M-monsieur..

 - Julien.

 - Julien... Tu n'es pas obligé.. Je peux continuer...

 - Non. Tu sors d'ici. Je n'hésiterais pas à t'empêcher venir travailler pendant une semaine si tu fais les heures de Kyllian. Allez, va-t-en.

 - Oui..

 - Au revoir Fabien, passe une bonne fin de journée, déclara finalement le blond en m'attrapant la main, m'adressant un large sourire, ses yeux auburn ce plantant dans les miens.

 - Merci, à toi aussi Ju'.

Je suis sorti de la salle, partant vers les vestiaires alors que j'entendais Julien grogner contre Kyllian. Bon, maintenant je me rends compte qu'il m'avait menti. Ju' n'était pas au courant. Mais pourquoi... J'ai expiré un bon coup, commençant à me changer, troquant ma chemise blanche, mon tablier et mon pantalon noir contre une chemise à motif tartan rouge avec en-dessous un T-shirt noir, un jean avec des ouvertures vers les genoux et des Doc Marteens pour souligner le tout. En quelques mots, je peux vous affirmer que oui, je finis à peine mes études. J'ai attrapé mon sac avant de partir, terminant enfin mon service.

En sortant du café, l'air frais se répercuta sur mon visage tandis que je prenais une grande boufée d'air. Bon sang, ça fait du bien ! J'ai commencé à marcher, les feuilles orangées de l'automne craquant sous mes pas. Bon.. Voyons voir si je n'ai pas des messages..

J'ai sortis mon téléphone et j'ai souris en voyant la notification. J'ai cliqué dessus et en lisant le message mon sourire s'est étendu. Parfait, je vais enfin revoir Alana. Ma chère soeur m'avait tellement manqué. Je crois que ça doit faire au moins un an que l'on ne s'est pas revu. Je lui ai répondu, retenant l'heure de quand elle sera chez moi. Mais bon.. Je dois quand même attendre vingts-deux heure. Seigneur.. Deux putain d'heures à attendre. Autant aller manger un bout et patienter un peu pour y aller.

J'ai rangé mon portable dans une poche de mon jean, commençant à me balader dans la petite ville que j'habitais. Mes yeux se sont posés sur toutes les personnes que je croisais et comme à chaque fois, mon estomac se serrait quand je voyais un jeune couple heureux. J'ai juré intèrieurement, continuant d'avancer. Mes pas m'ont conduit jusqu'à un petit restaurant alors j'y suis entré, mon estomac commençant à protester. Je me suis assis à une table proche, attendant de pouvoir prendre ma commande. Mes yeux ont dérivé sur les personnes présentes et encore une fois, ce sentiment de solitude me rattrapa en voyant toutes ces personnes accompagnées.

J'ai soupiré d'épuisement, m'afalant un peu plus sur ma chaise. Le serveur arriva un peu plus tard, prit ma commande et repartit aussitôt. Je pense avoir attendu une bonne vingtaine de minutes avant que mon plat arrive. J'ai remercié le serveur en souriant timidement également avant de commencer à manger. J'ai passé mon temps à observer les moindres faits et gestes des personnes, par simple habitude et curiosité.

Une fois fini, je suis allé payer puis je suis sorti du restaurant, retrouvant le vent glacé des soirées d'automne. J'ai regardé l'heure et j'avais remarqué qu'il était bientôt l'heure d'aller rentrer chez moi et retrouver Alana. J'ai soupiré légèrement, la petite fumée qui m'amusait quand j'étais petit s'évaporant dans l'air, avant de commencer à m'aventurer jusqu'au parc. Comme il faisait sombre et que j'avais encore du temps, je me suis baladé à la lumière des lampadaires, le crissement des petits cailloux se répercutant. À cette heure là, il n'y avait presque personne, voir personne tout court. C'était calme. Paisible.

Alors que je m'aventurais sur le petit pont en bois qui passait au-dessus du lac, j'entendis un hurlement à glacer le sang, me figeant sur place. Je n'osais plus bouger, ni même respirer. Dès que je crus que je pouvais enfin bouger, j'entendis des bruits de pas, comme si la personne courait, avant de voir une silhouette animale foncer sur moi. J'ai retenu un cri, me collant à la rembarde du pont, tandis qu'un gros chien passa rapidement à côté de moi, son pelage blanc tacheté par une couleur rougeâtre. Il disparut dans l'obscurité, me laissant enfin seul sur le pont.

J'ai repis difficilement ma respiration, mon coeur tambourinant dans ma poitrine. J'ai fixé dans la direction d'où était venu le chien blanc, hésitant à aller voir. Je pensais à Alana, mais je m'en voudrai si je laissais mourir ce qu ele chien avait attaqué. Au pire, j'appelerai un vétérinaire si la bête est blessée.

J'ai commencé à avancer timidement, contrôlant ma respiration. J'entendais mon coeur et il s'emballa encore plus quand j'entendis la respiration haletante et les gémissements de l'animal non loin. Je me suis orienté vers cette direction et j'ai failli faire demi-tour en me rendant compte que les bruits provenaient du seul endroit où il n'y avait pas de lampadaires. J'ai sorti d'une main tremblante mon téléphone, mettant le flash avant de m'aventurer là-bas, éclairant le chemin qui se déroulait devant moi.

Plus je me rapprochais, plus les gémissements de cette pauvre bête s'amplifiaient. En éclairant le sol, je vis des taches de sang, me serrant l'estomac. J'ai pris une grande respiration, continuant ma route tandis que les taches grossisait à vue d'oeil à chaque fois que j'avançais.

Mon coeur faillit me lâcher quand je vis le corps. Contrairement à ce que je pensais, ce n'était pas un animal qui gisait devant moi mais un homme gravement blessé. Il tenait entre ses mains sa blessure, ses yeux fermés et son visage tordu par la douleur.

 - Monsieur, est-ce que vous m'entendez ? demandai-je alors, m'accroupissant à ses côtés afin de pouvoir mieux l'aider.

Pour seule réponse il posa difficilement ses yeux sur moi, des mèches blondes presques blanches tombant sur son front. Pendant une fraction de seconde, je me suis noyé dans ses yeux, leur couleur m'absorbant totalement avant qu'une main ensanglantée attrapa la mienne, me ramenant à la réalité.

 - P-pas.. Pas l'hôpital...

 - Quoi ? Monsieur, vous êtes gravement blessé, je ne peux pas vous laisser dans cet état. Laisser moi appeler une ambulance. Vous devez aller aux urgences, tentais-je.

 - N-non... Par pitié.. Ramenez-moi chez vous, où vous voulez.. Mais pas à l'hôpital..

Avant même que je ne réponde il perdit connaissance, la pression de sa main diminuant grandement. J'ai mordu mes lèvres, ne sachant pas quoi faire. Soit je l'emmenait à l'hôpital et il m'en voudra, peut-être pas, mais sera sauf, soit je l'emmène chez-moi et il pourrait peut-être mourir. Oh et puis merde ! Attends.. Suis-je bête. Alana est médecin urgentiste. Donc elle pourra le soigner, enfin à priori. Bon, prions pour qu'elle soit déjà chez moi.