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Gabriel retrouva de l'autre côté Nihyr et Ellohira, discutant avec un homme de haute taille portant une épaisse armure de métal, blanche et dorée. Derrière se trouvaient d'autres hommes, portant également des armures, noires celle-là, sans ornement. Ils portaient également des casques noirs. L'homme à l'armure blanche s'inclina devant Nihyr et les laissa passer. Après avoir traversé les murailles et franchi une autre immense porte, Gabriel put tout à loisir examiner une ville magnifique.

La plupart des bâtiments, construits en pierre blanche, comptaient au moins dix ou douze étages. D'autres, à l'aspect un peu inquiétant parfois, en comptaient bien plus et ressemblaient à des gratte-ciel. Mais aucun immeuble n'égalait la fantastique hauteur des murailles. Elles étaient si hautes qu'elles disparaissaient à certains endroits, dissimulées par un gros nuage. Nuage qui semblait si insignifiant, à côté de ces fantastiques monuments.

Une avenue singulièrement rectiligne partait des portes de la ville pour se diriger vers le centre en pente douce. Elle disparaissait au loin dans un large tunnel passant au-dessous de la seconde muraille.

Ceux qui allaient et venaient de ci de là dans les allées semblaient tous appartenir à une de ces races humaines particulières. Gabriel aperçut de nombreux Foudroyants, des lanceurs de feu et tout un tas d'autres personnes un peu spéciales dont il ne connaissait pas les noms.

— Nous sommes dans le premier cercle, expliqua Ellohira en voyant son compagnon froncer les sourcils. Ici habitent tous ceux qui possèdent des capacités inhérentes à leur race.

Gabriel aperçut Wort, accompagné d'une dizaine d'hommes, un peu plus loin.

— Ensuite nous irons dans le second cercle, puis dans le troisième, etc... Il y a en tout quatre cercles. Ensuite il y a les six cellules qui entourent le palais. Mes parents habitent là-bas.

— Au palais ?

— Mais non idiot, dans les cellules.

Ils continuèrent leur chemin, passant successivement dans les différents quartiers de la cité. Le second cercle ressemblait à une immense caserne militaire : on n'y voyait que soldats et armuriers. Dans le troisième, la plupart des hommes et des femmes portaient de longues robes colorées.

— Le quartier des mages, indiqua Ellohira. Ces gens-là sont un peu bizarres. C'est dans ce quartier que vit Jalrem, le tailleur qui s'occupe de nos uniformes.

— On ne s'y arrête pas ?

— Pas maintenant, répondit Nihyr. Demain, nous irons. Pour le moment, nous allons directement chez Ellohira. Je vous y laisserai pendant que j'irais saluer le régent.

En arrivant dans le quatrième cercle, Gabriel fut très surpris. Il découvrit une immense étendue verdoyante entre deux murailles d'une hauteur à couper le souffle. Placés très haut, des miroirs renvoyaient la lumière du soleil vers le sol afin de permettre la culture. Une longue file de hauts silos servait à garder à l'abri les récoltes. Les bâtiments se faisaient plus rares ici et il faisait très chaud. Au loin, Gabriel aperçut un enclos dans lequel il aperçut de petits animaux bruns. Il faillit pousser un cri de surprise lorsque, en forçant sa vue pour voir de quelle espèce il s'agissait, ses yeux firent un véritable zoom vers l'avant. Il s'essaya à cette capacité très utile pendant quelques minutes, n'osant rien demander de peur de passer pour un idiot.

De nombreuses personnes circulaient encore sur l'avenue principale, transportant grain, armes, légumes, charbon, lingots d'acier ou de fer, sur de solides plateaux de bois montés sur roues et tirés par des... Peu importe, se dit Gabriel en observant les singulières créatures.

Dans le quartier suivant, il y avait tout autant de circulation, mais bien plus de fumée et de poussière. L'ambiance changeait du tout au tout. C'était comme passer d'une petite campagne tranquille au centre d'une grande ville durant les années folles du charbon. Un bruit incessant de métal frappé résonnait partout.

— C'est la Forge, la première cellule, cria Ellohira à Gabriel qui eut du mal à entendre alors qu'il se trouvait juste à côté. Il y a ensuite le quartier résidentiel 1 à droite, le 3 à gauche. Mes parents habitent dans le quartier 3.

Nihyr avança jusqu'à l'embranchement suivant. Là, l'avenue s'arrêtait et se divisait en deux parties. Deux grands panneaux se trouvaient là. Celui de gauche énumérait :

- Quartier résidentiel 3.

- Garnison 2.

- Quartier résidentiel 2.

- Garnison 1.

- Quartier résidentiel 1.

Celui de droite énumérait les mêmes noms, dans l'ordre inverse. Au-dessus, en grosses lettres, le mot « FORGE » trônait, recouvert de poussière noire.

— Par où se trouve le palais ? demanda Gabriel, espérant avoir l'occasion de le voir.

— L'entrée se trouve dans le résidentiel 2, dit Nihyr. Je prends à droite, j'ai quelqu'un à voir sur le chemin. Ellohira, tu emmènes Gabriel chez tes parents.

Ellohira acquiesça et entraîna Gabriel avec elle en le saisissant par la main. Il oublia instantanément le palais.

Ils arrivèrent dans le quartier où Ellohira avait passé ses premières années après avoir traversé une nouvelle muraille. À leur passage, les gens les saluaient et s'inclinaient. Ellohira se dirigeait avec assurance dans un véritable dédale de rues et de ruelles. Là encore les bâtiments étaient hauts, serrés et nombreux. Puis la disposition changea et les immeubles furent remplacés par de petites maisons individuelles, chacune disposant de son propre petit terrain. C'est tout au fond d'une impasse qu'Ellohira se rendit. Elle franchit le portail d'un bond, invitant Gabriel à la suivre. Elle se dirigea rapidement vers la porte et fit signe de faire silence.

Elle frappa trois coups contre le panneau de bois brut.

Presque aussitôt une voix de femme répondit à l'intérieur. La porte s'ouvrit soudainement, révélant une femme d'une quarantaine d'année, menue, encore plutôt jolie. Elle lâcha son panier de linge pour serrer sa fille dans ses bras et l'embrasser à n'en plus finir.

— Par pitié maman, arrête ! Ne vois-tu pas que nous avons un invité ?

— Rien du tout ! Un an que tu n'es pas réapparue ! Et tu arrives comme ça, sans rien dire. Et ton père qui doit rentrer tard ! Tu reste ici cette nuit au moins, qu'il puisse te voir ?

— Oui, nous resterons un moment. Nihyr est parti au palais, il viendra aussi quand il en aura terminé, si tu veux bien.

— Bien sûr, bien sûr ! Vous êtes toujours les bienvenus ici, tous autant que vous êtes !

— Maman, voici Gabriel. Il fait partie des élèves depuis peu.

— Bienvenue mon garçon.

— Comme tu l'as deviné, voici ma mère, Virestë.

— Enchanté m'dame.

Virestë fit un geste désinvolte de la main.

— Appelle-moi Virestë, tout simplement. Alors, qu'attendez-vous tous les deux ? Entrez ! Entrez !

Elle ramassa son panier de linge et disparut dans la maison. Ellohira entra, Gabriel sur les talons.

L'intérieur ressemblait un peu à celui d'un chalet de montagne. La grande majorité de la bâtisse était de bois. La pierre se faisait rare, hormis une magnifique cheminée, se trouvant à l'extrémité du salon dans lequel venaient d'arriver les deux jeunes hovacks. Aucun feu n'y brûlait, l'air extérieur étant suffisamment chaud.

Gabriel entendit des bruits provenant d'une pièce voisine. Il devina qu'il devait s'agir de la cuisine. Le salon, vaste et meublé avec goût, invitait les visiteurs à se détendre et Gabriel s'affala dans un grand fauteuil, se rendant soudain compte qu'il était fatigué.

— C'est le fauteuil de mon père, lâcha laconiquement Ellohira.

Gabriel lui lança un rapide coup d'œil pour savoir s'il lui fallait lever le camp ou non. Il décida que le sourire de la jeune fille ne nécessitait pas cette mesure d'urgence.

— Que fait-il, ton père ?

— Je te l'ai déjà dit non ? Il est ce qu'on peut appeler un guérisseur. En fait c'est un mage qui pratique un type de magie bien particulier. S'il m'entendait prononcer le mot « magie »...

— Et bien quoi ?

— Oh, rien, juste un vieux débat sans fin sur l'utilisation de ce terme. Mais c'est plus pratique, tout le monde comprend tout de suite de quoi on parle.

— Et comment il s'appelle ?

— Yhioan. Tu verras, il est tout le contraire de ma mère.

— Tu veux dire qu'il est grand, gros, sinistre et laid ?

Ellohira gratifia Gabriel d'un regard faussement réprobateur avant de répondre « pas tout à fait, non ». Elle monta ensuite au premier étage et ne redescendit qu'après une quinzaine de minutes. Elle retrouva Gabriel endormi dans son fauteuil. Par une fenêtre, elle vit sa mère s'affairer dans le jardin. Après avoir étendu le linge, elle cueillait à présent des fruits. Ellohira sortit la rejoindre.

*

Nihyr s'était vite retrouvé devant les portes du palais. Elles étaient grandes ouvertes et une longue file de personnes de tous horizons avançait petit à petit à l'intérieur de la dernière enceinte. Cette dernière enceinte, comme la première, était faite non pas de pierre, mais d'acier azuré. Un matériau spécial très résistant et aux propriétés étonnantes. Nihyr contempla la muraille un moment puis avança, ignorant la file d'attente sous l’œil impressionnés de certains qui, pour la première fois, voyaient un de ces fameux seigneurs chasseur de dragon. Les gardes ne lui posèrent aucun problème. Il ressorti de l'autre côté du mur d'acier, épais de plusieurs dizaines de mètres. Il contempla alors à nouveau ce spectacle, qu'il voyait chaque fois comme si c'était la première : le magnifique palais d'Azulimar et son port-aérien flottant dans les airs. Le palais prenait la forme d'une tour. Qualifier cette tour de gigantesque relèverait de l'euphémisme. Géante, énorme, sans commune mesure avec aucun gratte-ciel lui rendrait un peu plus grâce. Six tours titanesques faisaient office de contreforts. Le palais semblait entièrement fait d'argent et de verre, scintillant sous le soleil. Très haut, loin au-dessus des sommets des contreforts, un gigantesque anneau de pierre blanche, suspendu dans les airs, faisait prendre conscience de la puissance de la magie : le port aérien.

Nihyr avança jusqu'à l'intérieur, se dirigea droit vers un tube transparent s'élevant dans les étages, ignorant le hall titanesque et ses colonnes imposantes. Sitôt qu'il eut pris place, le sol de sa cabine commença à s'élever. Il attendit un long moment avant de penser très fort « merci », et l'ascenseur s'arrêta. Il voulait monter les quelques étages restants à pied, histoire de bien se remettre les idées en place. Avoir une discussion avec un descendant de la lignée des Galdor restait toujours une expérience particulière.

*

Gabriel s'éveilla lorsqu'une douce odeur sucrée vint lui chatouiller les narines. Il entendit Virestë et sa fille discuter dans la cuisine. Dehors, il faisait grand jour, signe que le soleil se trouvait proche de son zénith. Il se leva, se dirigea vers une porte-fenêtre ouverte et sortit. Il contempla l'immense muraille d'acier azuré qui le dominait de toute sa grandeur. Puis observa un peu le petit jardin rempli de fleurs, d'arbres et de buissons. Caché derrière une courte haie, un jardin potager impeccablement entretenu recelait une riche diversité. Un chat, animal singulièrement familier, s'était installé sous une grande feuille de rhubarbe.

— Tu viens ? On va déjeuner.

— J'arrive, j'arrive.

Gabriel retourna à l'intérieur. Dans la cuisine l'attendaient Nihyr, revenu du palais, et une table bien garnie. Durant le déjeuner, Nihyr et Virestë discutèrent de la situation préoccupante dans laquelle se trouvait la cité. Des dragons plus nombreux, un épuisement des mines de fer et une foule d'autres problèmes. Une bonne nouvelle cependant redonnait le moral à toute la cité : Torgar, pays voisin et allié, venait d'envoyer à Azulimar ses meilleurs atouts. Elebrùn, pilote très célèbre et très haut gradé de l'armée Torgienne, et son vaisseau flambant neuf venaient d'arriver.

— Le Nebu est vraiment impressionnant, commenta Nihyr, j'ai eu l'occasion de le voir ce matin. Vraiment très impressionnant. Quant à Elebrùn, ses qualités de pilote et de commandant sont reconnues depuis un bout de temps.

Gabriel n'avait pas encore vu un seul aéronef et il en était déçu. Bien qu'il ait eu de nombreuses autres choses impressionnantes à voir. Le déjeuner terminé, Gabriel voulut reprendre sa sieste, mais Nihyr l'en empêcha et l'entraîna devant la maison. Là, il lui imposa de nombreux exercices, sous le regard amusé d'Ellohira et de quelques voisines impressionnées.

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