Chapitre 4

3 minutes de lecture

Constantin tressautait presque d’impatience sur le siège de son véhicule à l’idée d’installer son acquisition au cœur de sa demeure. Pas question de le mettre en bas, dans la boutique : il ne voulait pas être obligé de répondre à tout bout de champ que ce meuble n’était pas à vendre ; or, il était persuadé qu’il attirerait les regards de tous, comme il avait captivé le sien. Non, il l’installerait dans son appartement, s’il consentait à passer par l’escalier ancien un peu étroit de son logis.

Cette entreprise eut lieu dès le lendemain, avec le renfort d’un ami de longue date, taillé en athlète et toujours prêt à rendre service. Délesté de ses portes, de sa corniche et de son tiroir pour alléger son poids, le noble objet – Constantin tirant, son ami poussant et portant – gravit donc un étage, sans autre dégât qu’une petite rayure sur la peinture du mur, causée par un angle découvert. Ouf !

Ayant équipé le meuble de patins, son nouveau propriétaire put à loisir le glisser sur le parquet ciré de l’appartement. Mais où l’installer ? Entre les deux fenêtres de la salle ? Il suffirait de retirer le tableau qui s’y trouvait. De biais, dans un angle du salon et l’utiliser comme bar ? Ou bien au fond du couloir de l’entrée, à la place du miroir qui agrandissait l’espace ? Aucune de ces solutions n’agréa Constantin.

En fin de compte, le « cher » meuble trouva place dans la seule pièce de l’appartement qui affichait un manque évident, la chambre à coucher de Constantin, orpheline de Sophie, son désordre permanent, ses robes, ses chapeaux, ses chaussures, portés un beau matin chez le fripier, quelques semaines auparavant.

Ayant sorti le tiroir de son logement, ce fut au moment d’entreprendre d’en revêtir le fond d’un papier protecteur avant d’y ranger ses chaussettes, que Constantin remarqua quelque chose d’insolite. Le fil du bois de la planchette de fond différait, dessus et dessous ! Quel était ce mystère ? Réflexion faite, une seule explication logique à cela : deux épaisseurs de bois, autrement dit, un double-fond ! Cette découverte estomaqua Constantin. Oui, mais comment l’ouvrir ?

Il posa avec fièvre l’objet sur son bureau. À première vue, l’embrèvement semblait tout ce qu’il y avait de plus normal. Il examina la face supérieure du fond. Elle était ajustée, mais sur trois côtés, ne paraissait pas insérée dans une rainure. Fixant dessus une ventouse, Constantin essaya de la tirer vers lui. En vain. Il retourna le tiroir et remarqua alors que le montant arrière était dédoublé dans son épaisseur et assemblé avec rainure et languette, mais la face avant montée à queue d’aronde. Une partie serait-elle amovible ? Il remit le tiroir à l’endroit et, après l’avoir ventousée, tira la face interne du montant arrière vers le haut. Miracle ! La pièce de bois sortit sans trop d’effort de ses rainures, libérant le panneau de fond, contre lequel elle reposait, dans une feuillure. Il ne restait plus à Constantin qu’à sortir celui-ci de la rainure avant pour découvrir, bien à plat, ce qu’il identifia presque aussitôt comme... un parchemin ! Ou plutôt un bout de parchemin. Le bord gauche, en effet, était déchiré. Il était couvert d’une série de 36 lignes de deux, trois ou quatre mots écrits à l’aide de signes à mi-chemin entre des hiéroglyphes et un alphabet. D’alphabet, Constantin n’en connaissait que trois, latin, grec et cyrillique. Et celui-là ne ressemblait à aucun de ceux-là. Mais il y en avait tant d’autres !

Parchemin. Il consulta ses livres. On en avait utilisé jusqu’au XVe. C’est alors qu’il établit le rapprochement avec la brève entendue la veille à la radio : ce rouleau découvert dans un coffret emmuré, près de Périgueux. La description collait. Il aurait donc, sans le vouloir, mis la main sur le morceau manquant ? D’une possible carte du supposé Trésor des Templiers ? Ce fragment pouvait remonter à la dissolution de l’Ordre, en effet. C’était proprement incroyable !

Il se reprit. « Ne t’emballe pas ! Il te faudrait encore réunir les deux parties du parchemin et parvenir à déchiffrer ces lignes. Tes huit années de latin sont loin... et cet alphabet paraît bien mystérieux !".

(à suivre)

©Pierre-Alain GASSE, juin 2017.

Annotations

Vous aimez lire Pierre-Alain GASSE ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0