7.

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Il repris ses pensées. Le prêcheur avait fini son discours et les gens se dispersaient en chuchotant comme si le charme opérait tellement qu’il outrepassait le moment de la litanie. Floria se décida à poser des questions et interpela un vieil homme qui semblait prendre du temps pour sortir et souriait franchement en regardant le haut des colonnes marbrées.

”Ou est-il possible de se procurer le discours?” c’est la question la moins bête qui lui passa en tête.

”Hmm? Je ne vous entends pas bien mais suivez-moi.

Il suit le vieux dans la foule qui sort du temple et ce dernier l’emmène dans le bistrot à l’angle de la rue de l’église. Il n’est pas venu dans le village depuis longtemps et lui propose un verre, toujours en espagnol.

Pour repousser ce dîner infâme avec cette famille infâme, rien ne pouvait mieux tomber pour Flavien.

”Je vous paierai le verre néanmoins…”

”Bon, tu veux te ”procurer le discours” c’est ça? Mon petit, tu ne réalises pas ce que tu dis n’est-ce pas ?”

Florian ne compris pas, il ne voulut pas vexer le bougre.

”Comment cela?”

”Ce gars là. Il n’est pas net, malgré l’apparent bon sens de son discours et tout le bien que la communauté dit de lui. Il est pas net, j’te l’dis.”

Le serveur les coupa et on lui re-commanda des boissons

” J’ai eu la chance de travailler dans de grandes relations de confiance avec les prêcheurs et notamment avec le prêcheur Sanchez. Il est le seul à m’avoir dit la réalité de ce bonhomme”.

Flavien n’y comprend rien, se dit que ce doivent être des querelles de villages mais il n’hésite pas à se bourrer la gueule en progressant sur le flux de bières qui passait entre sa main gauche. L’alcool lui fait oublier que le mec est un connard.

Du coup, il s’intéressa soudainement à son taf. Le mec mettait en relation des prêcheurs et récoltait une commission de 15% sur les donations des prêches réalisés en commun. Flavien se dit, pendant que le vieux parlait toujours et entrait dans les détails de la profession, ”je vais devenir pêcheur pour oublier que ma meuf est morte, au moins je n’aurai pas de voiture, mon boulot ne comprendra pas de voiture, je serai loin des putain de routes et des putain de meufs qui ne savent pas conduire et emmèenent quand même leurs potes dans une voiture, en plus je serai au milieu de vieux donc je n’aurai pas d’idylle, pas d’attache donc pas de tristesse. Personne ne sera là pour me juger « le pauvre, sa petite amie est morte… il doit vraiment souffrir une partie de sa vie est finie, ses projets sont morts ».

« C’est vachement bien mais c’est pas pour vous. » asséna le vieillard d’un coup sec.

Flavien écarquilla les yeux et remis sa bière droite sur la table. Il décroisa les jambes et un fill d’eau froide lui passa dans tout le corps.

« Vous savez que j’étais en train de me dire ça. »

« Précisément ».

Flavien mis cela sur le compte de l’égo du vieillard.

« Je sais aussi que vous avez perdu quelqu’un de cher ».

Flavien parti sans payer, en titubant presque. Le vieux le connaissait, mais il ne sait pas d’où. Pire, il connaissait sa personnalité. Impossible se dit-il, trop de choses se bousculent dans sa tête.

Au dîner, il arrive chez les parents dans une démarche sobre. La famille se comporte de manière tout à fait normale, ils sont agréables avec lui et partagent leur peine.

A la fin, pourtant, Flavien se dit que quelque chose ne va pas, sans pouvoir dire quoi. Comme si la famille d’Hannah, ses parents son frère et sa sœur, savaient quelque chose qu’il ne sait pas sur Hannah et lui cachaient. Peut-être ne voulaient-ils pas lui faire de mal, peut-être l’avait-elle trompé ? Impossible. Peut-être ne sortait-elle pas avec lui pour les bonnes raisons ? Une paranoïa remarquable le frappa en franchissant la porte de leur hôtel. D’autant plus qu’il rentrait bredouille, sans être vraiment réconforté.

Il pensa ensuite à Paris. Il ne voulait pas y retourner. Il resterait une semaine de plus dans le pays de la mort d’Hannah, le dernier sol à avoir sali ses souliers avant de monter dans la voiture mortelle.

Il se dit ensuite qu’en tant que mec, un appartement à Paris était l’ouverture de tous les possibles sexuels. Il a un pote qui se fait toutes les Hannah étrangères, et beaucoup de Hannah de Tinder grâce à son appart’ sur Paris. A tel point qu’il craignait d’en avoir un lui même lorsqu’il sortait avec Hannah de peur d’être tenté, un week-end où elle ne serait pas en ville et lors duquel une fille le draguerait en soirée, de la ramener chez lui. Paris est le lieu de toutes les trahisons, donnant à la banlieue l’aspect d’un lieu de morale et de loyauté hors pair.

Mais là, il était temps. Il n’avait plus de petite amie, il n’en retrouverait probablement jamais, c’était le moment de sombrer dans la débauche en heureux locataire d’un appartement de la capitale, le moment où il n’allait pas regretter. Eh puis de toute façon il avait le droit ; il était en deuil. Dans un deuil immense que ni ses amis, ni ses parents, ni même ses amis qui avaient perdu leurs parents ne pouvaient comprendre. Hannah était son avenir, il n’en a plus qu’un gris et redondant désormais. Il serait maintenant un dragueur lourd de soirée, célibataire, enchaînant les relations superficielles, et jamais il n’aimerait une autre fille ni ne la désirerait comme il désirait la brillante défunte.

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