Orgueil - Scène I

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J'ai marché et je suis arrivé à destination dans la nuit du trente au trente et un Janvier. Sur mon chemin, une chemise bien trop grande et de mauvaise confection pour moi séchait, là, dans un jardin. Elle me faisait de l’œil et elle ne manquerait pas à son propriétaire, je l'ai donc empruntée. Il ne faisait pas chaud et je n'avais pas fière allure, tiens. Celle d'un gueux, bon, ça en apitoiera certains à nul en douter me dis-je, et ce n'est peut être pas si mal car je pourrais tourner la chose à mon avantage. Tellement qu'à mon arrivée, alors qu'en pauvre hère je marchais dans les ruelles à me demander dans laquelle ma génitrice m'avait pondue, une bonne âme à voulu m'aider en m'indiquant le chemin menant tout droit au taudis du village. Qu'est-ce que je disais! C'était si prévisible.

Je me présente au taudis, la puanteur semble émaner des couches encrassées et même des murs, quel endroit austère, qu'elle condition scandaleuse. J'aurai préféré les doux draps d'une bourgeoise après le levé du soleil et une nuit de débauche. On me refile une paillasse dégueulasse, je me demande combien de personnes on étalées leur transpiration dessus, et je m'empresse de la balancer dans le coin qu'on m'a réservé. J'observe malgré tout curieusement les lieux insalubres, tiens il y a de quoi écrire et rédiger des lettres. Quel luxe. Dans mon élan, je prend la plume pour écrire au tribun parce que le vieillard qui moisit dans un coin m'a soufflé de son haleine vinasse qu'il était ce que je devais faire. Bon sang, mais je me fond dans la masse et prend la plume pour laisser là un mot.



Ferré,

J'aurai préféré me prélasser dans le stupre après avoir ramené mes pieds bottés dans la ville qui m'a vue naître, mais il paraîtrait que je dois vous écrire, à des fins qui me sont totalement inconnues. Ne sommes-nous plus libre de circuler sans devoir rendre des comptes?

Dans mon infinie bonté, je vous adresse ces quelques mots en prenant la plume ici bas, pour me créer un contre-temps.

Acèrbement,

Ephialtès



Je me réajuste, ce n'est pas comme si j'avais trop de matière à, mais en attendant de mieux je me donne l'illusion, et je me casse faire un tour. Je ne vais pas rester ad vitam aeternam et me rend à la mairie puis m'en voir sur les étales du marché pour trouver de quoi me mettre sous la dent. Avec un peu de chance on me refilera un truc et si ce n'est pas le cas, j'en emprunterai un. La chance n'a pas été avec moi sur ce coup là et je retourne donc à ma piaule où je remarque que le Tribun m'a laissé une lettre et de quoi bouffer. Je n'ai pas à me fatiguer pour le coup, tant mieux. Je lis et j’apprends qu'en tant que nouvel arrivant installé dans le village, j'ai le droit à quinze écus si j'écris au Maire. L'aubaine! Tout me tombe tout cuit, c'est presque parfait. Pourquoi attendre? Je reprend la plume en ricanant, ce n'est pas comme si j'avais grand chose à faire en l'instant, en même temps.



Maire,

Par cet écrit, je viens réclamer mon dû. Pour mon retour dans cette ville qui m'a vue naître, vous me devez quinze écus.

Nous pouvons nous retrouver dans une ruelle pour la transaction.

Acèrbement,
Ephialtès

A cet écrit, il m'aura fallut attendre un jour et la nuit tombée pour recevoir une réponse. Pourtant j'ai été cordial mais le Maire n'a visiblement pas l'envie de me rencontrer. Crasseux d'avoir du aller travailler à la mine pour m'intégrer, je rejoins ma piaule et y découvre son mot ainsi une petite bourse. Ah, tiens, j'ai l'immense honneur d'avoir une chandelle en cadeau de bienvenue. Aurait pu mieux faire, une femme pour la nuit m'aurait plus convenu. Je devrais pouvoir la revendre à un prix correct, voir même à un pas correct ce qui serait bien mieux. La chandelle, pas la femme, quoi que... Ça me fera plaisir et il y a toujours un nigaud pour acheter à plus que les choses ne valent. Les ignorants. Je lis le petit mot et la preuve que la bourse m'est donnée. J’apprends par les lettres faites de la main de l'édile, qui me tutoie pour me rappeler ma condition, qu'il espère que cette aide me sera profitable pour progresser socialement dans la belle cité d'Antwerpen. Un sourire en coin se dessine alors sur mon visage face à ces mots à l’arrière goût amer. Je me sens comme Bélial et sa réflexion. Cependant il n'a pas tout à fait tors, j'ai aspiré mes premières bouffées d'air ici, la ville ne peut être que belle. Un azur sur le reçu et l’annotation me demandant si je suis certain de mériter et je me marre.
Oui, j'en suis certain même.

Sous ma couche je glisse le tout et m’affale. Si viens à l'idée d'un misérable d'y glisser ses doigts, je les lui arrache avec les dents. Un œil clos et je me demande en quelle quantité je vais pouvoir ripailler avec ces clinquants écus tiens. J'attrape la miche qu'on m'a refourguée et comprend alors pourquoi c'était gratuit quand j'y croque. Du pain rassit que je mâche sans grande conviction, mais j'ai la dalle. Scandaleux, me donner du pain rassit, à moi. Tiens, je ne suis pas le seul dans le taudis tant que j'y pense. Hm, intéressant à savoir, ça. Est-ce que les autres on reçu la même bourse que moi?

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