Chapitre 3 : les jardins de Lew Castle (Partie 4 : Retour sur le parcours)

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En attendant Mike, Joseph et Harry dégustaient un whisky.

– Alors comme ça Harrold est avec Mike ? dit Logan qui venait de se joindre à la tablée.

– Oui, c’est lui qui s’est proposé, précisa le Comte.

– Et tout s’est bien passé ? demanda son fils avec un doute dans la voix.

– Apparemment, Mike a su dompter notre petit diable, ajouta le Comte avec joie. Il m’a envoyé quelques photos à l’appui et de ses dires par messages ils s’amusaient bien.

– J’espère que Harold ne l’aura pas dérangé dans son travail.

– Non je ne pense pas, ajouta Joseph, Mike est toujours à l’aise et patient avec les enfants.

– Joseph, tout à l’heure, quand nous étions à la bibliothèque, ton petit-fils semblait ailleurs. Je pense que j’ai été maladroit. Il regardait les photos sur le mur, et j’ai insisté sur le bonheur que m'apportent mes enfants.

– Ne t’en fais pas Harry, le rassura Joseph, il a appris à faire la part des choses. Il est fils unique et il devait s’imaginer avec des frères et sœurs.

– J’espère que je ne lui ai pas ravivé des souvenirs douloureux.

– Au fait, comment va Jeremiah ? Il est rentré de Bagdad ? questionna Joseph pour enchaîner sur un autre sujet.

– Oui, hier, il a eu une permission pour la naissance de son premier petit-fils. Je pense que ce sera sa dernière mission à l’étranger.

– Le savoir rentré et auprès des siens est le plus important aujourd’hui, ajouta Logan. Même si je suis son grand frère, je suis soulagé à mon tour. Bon en attendant, je dois vous laisser sinon mon colonel va m’attendre et me confier la corvée d’épluchage.

Joseph et Harry éclatèrent de rire à cette dernière remarque de Logan, et le Comte enchaîna.

– Ils se sont bien trouvés ces deux-là, Mia est la douceur dans un gant de fer, Logan est une main ouverte.

– Tu peux être fier de tes enfants, le félicita Joseph.

– De ce côté-là, je pense que je peux retourner le compliment. Ce que vous avez fait avec Olivia est remarquable.

– Nous ne pouvions pas nous effondrer, nous devions être là pour Mike. Il est devenu un homme bien, et où que soient ses parents, ils peuvent être fiers de lui.

– Je suis d’accord, nous donnerons tout pour nos enfants, et nos petits-enfants et je suis un privilégié. J’ai la chance de connaître mes arrières petits-enfants.

– Allez, trinquons à leur bonheur, dit Joseph en levant son verre.

– Slanté Joseph.

– Slanté Harry.

Les deux amis continuèrent à discuter de leurs progénitures jusqu’au retour de Mike.

– Me voilà.

– Parfait, nous t’attendions.

– Un whisky Mike ? proposa le Comte.

– Oui, avec joie, pour trinquer avec vous.

Mike s’installa à côté de Joseph et face à Harry.

– Si nous levions nos verres au Comte de Forfar, annonça Joseph.

– Oui très bonne idée, enchaîna Harry.

– À n’en pas douter, conclut Mike.

La discussion était lancée et le repas fut un moment agréable. Mike en apprit un peu plus sur les invités stars pour l’inauguration. Mais rapidement les échanges tournèrent autour de Mike et du tournoi de golf de Saint Andrews. À la fin du repas, Mike avait trouvé en Harry son fan numéro un. Quand celui-ci apprit que son poulain venait de casser son driver, il se proposa de financer l’achat du driver de remplacement. Le jeune golfeur essayait de lui faire comprendre de la difficulté d’en trouver un en si peu de temps. Le Comte n’en démordait pas, et lui demanda de le laisser faire. Joseph connaissait bien Harry, il ne lâcherait pas l’affaire. Mike s’éclipsa pour aller récupérer son club dans le coffre de sa voiture. À son retour, Harry et Joseph s’étaient rendus dans le petit salon attenant au bar pour continuer à discuter.

– Voici mon driver, dit Mike en le tendant à Harry.

– Quand partez-vous ?

– Nous prenons le ferry jeudi à sept heures, précisa le jeune homme.

– Très bien, cela me laisse un jour et demi. Parfait.

– Merci. Je dois vous laisser, le jardin m’attend et ensuite je filerai vers quinze heures, s’excusa Mike.

– Je t’attendrai sur le parking, annonça Joseph.

– Bien Grandpa, à tout à l’heure.

Harry et Joseph poursuivirent leur discussion. Harrold arriva avec Mia, un papier à la main.

– Super Papy, est ce que Mike est encore là ? demanda-t-il impatient.

– Non, il vient de partir travailler.

– Ah mince, je voulais lui donner ce dessin pour le remercier de la matinée.

– Confie le à Joseph, il lui transmettra, proposa l'arrière-grand-père.

– J’ai une meilleure idée, annonça Joseph, rejoins-moi à quinze heures trente sur le parking avec une paire de basket et un blouson.

– Pourquoi ? interrogea l’enfant curieux.

– Tu pourras le lui donner en main propre, il doit me rejoindre. Tu pourras nous accompagner au golf, il doit s’entraîner.

– Oh mamy, tu penses que ce sera possible ?

– Si Joseph te le propose, pourquoi pas. Logan, tu en penses quoi ?

– Oui, c’est une bonne idée.

– Alors c’est d’accord, jeune homme.

– Merci, viens mamie, je vais apporter quelques améliorations à mon dessin.

Harrold disparut, courant dans les couloirs en direction de l’aile familiale.

Harry, au début des travaux, avait mis une pièce à disposition à son paysagiste. Celui-ci l’avait aménagé avec beaucoup de soins. Grandma lui avait offert un tableau le représentant à son bureau, la fenêtre ouverte sur le parc, le jardin en perspective. Mike passa des derniers coups de téléphone urgents avant son départ. Il commanda les nouvelles pergolas qui devraient être livrées avant la fin de semaine prochaine.

Il rejoignit Joseph qui l’attendait près de la voiture, Hugh rapportait la balle à Harrold, qui jouait avec lui.

– Me voilà Grand-Pa, excuse-moi j’étais au téléphone avec un de mes fournisseurs.

– Mike, si ça ne te dérange pas, j’ai proposé à Harrold de venir avec nous au golf.

– Pas de soucis, allons-y.

La trois-cent-quatre prit l’allée et quitta le château, la petite troupe chantant à tue-tête « the water is wide ». Hugh, bien calé sur le siège à côté d’Harrold, la tête posée sur ses genoux, apprécie les câlins du petit garçon. Arrivés sur le parking du golf, Arthur les attendait.

– Ah, vous avez un invité ? interrogea Arthur.

– Oui, je te présente Harrold, tu le connais, lança Joseph.

– Bien sûr c’est l’arrière-petit-fils d’Harry. Tu as encore grandi. La dernière fois que je t’ai vu, c’était en juin pour l’anniversaire de mariage du Comte et de la Comtesse.

Mike attrapa son caddie, suivi d’Harrold et de Hugh. Ils partirent à pied, pendant que Joseph était déjà en route dans la voiturette avec Arthur. En chemin, Mike expliquait au petit garçon les règles de ce sport qui lui était inconnu. Harrold était impressionné, et n’avait qu’une hâte pouvoir lui aussi essayer.

– Pourquoi commences-tu par le trou numéro onze Mike ? demanda le garçon.

– C’est là que nous avons terminé notre match-play, hier avec mon grand-père.

– C’est là que tu as cassé ton driver ?

– Oui c’est bien ça, et surtout là où j’ai perdu la balle avec laquelle je jouais.

– C’est très grave ?

À cette question, Mike se surprit à sourire, Harrold par ces quelques mots venait de lui enlever un poids sans le savoir.

– Finalement, non !

– Ouf, tant mieux, parce que Hugh a quelque chose dans la gueule, et ce n’est pas la balle avec laquelle nous jouions sur le parking.

– Mais, oui tu as raison. Hugh n’a pas le droit de jouer à la balle sur le golf.

Mike appela Hugh, qui s’assit à ses pieds, fier de lui, il y déposa la balle. Puis il se retourna vers Harrold attendant une caresse.

– C’est bien Hugh, regarde comme Mike est content que tu aies retrouvé la balle.

Mike s’agenouilla, et prit le chien par le cou sous le regard attendri de Joseph. Hugh était le Sherlock de Mummy.

– Bon Mike, nous nous y mettons. Nous le finissons ce match-play, insista Joseph.

– Je suis ton homme. À toi de jouer. Ta balle était encore sur le fairway, la mienne vient de réapparaître. Aussi, considérons qu’elle était hors limite, je me droppe avec un coup de pénalité.

Arthur et Harrold suivaient la joute entre les deux hommes avec beaucoup d’attention. Le chérubin qui était toujours à courir à gauche et à droite en temps normal, était aujourd'hui au bord du green sage comme une image. Il demanda à Arthur :

– C’est qui le meilleur des deux ?

– Sans hésiter, c’est Mike.

Il remporta le trou numéro onze, enchaîna le douze, le treize un par quatre en trois coups seulement, laissa filer le quinze et le seize, et termina par un birdie sur le dix-sept, et un eagle sur le dix-huit un par cinq, sous le regard médusé d’Harrold.

– Comment est-ce qu’il a réussi à faire ça ? demanda Harrold à Joseph.

– C’est exceptionnel, lança Arthur.

– Je pense qu’il est fin prêt, annonça Joseph.

– Tu l’as mis directement, c’est toi le meilleur.

Mike était pleinement satisfait, cette journée était une bouffée d’oxygène. Et ce petit garçon y était pour beaucoup.

– Grand-Pa, tu vas pouvoir sortir le bateau de pêche pour tout le mois à venir.

– Apparemment, je n’ai plus le choix, je pense tout de même que ton emploi du temps sera un peu chargé.

– Il y a des chances.

– Tiens attrape, un petit cadeau d’Olivia au cas où.

– Qu’est-ce que c’est ? demanda Harrold.

– Une balle de golf lumineuse, répondit Mike en souriant.

– Pourquoi ta mamie te l’a offerte ?

– Au cas où Sherlock ne l’aurait pas trouvée.

– Elle m’a surtout dit, enchaîna Joseph, qu’elle te permettrait de garder le cap, comme un phare sur le green.

– Bon allez, rentrons, Henriett et Olivia doivent nous attendre, annonça Arthur.

– Arthur, je viens de recevoir un message du Comte : Karl attend Harrold à l’accueil du golf. Peux-tu le ramener ? demanda Joseph.

– Oui, un petit tour en voiturette, jeune homme.

– Nous finirons à pied avec Mike, ne nous attendez pas.

– Attendez monsieur, je dois donner quelque chose à Mike.

Harrold descendit et tendit son dessin à Mike.

– Tiens, j’ai fait ça pour toi, pour cette journée, c’était génial.

– Merci Harrold, et n’oublie pas dans un mois, nous ferons la deuxième visite du jardin, et cette fois, si le temps nous le permet, nous pourrons peut-être jouer ensemble au golf.

– Ce serait trop chouette. À bientôt Mike et bonne chance pour Saint Andrews.

Harrold fila s'asseoir à côté d’Arthur, faisant de grands gestes en guise d’au revoir en direction de Mike et Joseph.

– C’est un sacré petit bonhomme, il me fait penser à toi au même âge.

– Oui, il est très attachant. J’ai passé une bonne journée avec lui. Tu as eu raison de lui proposer de venir avec nous sur le parcours.

– Tu sais, tu as tout pour devenir un bon père à ton tour.

Les deux hommes avancèrent d’un bon pas, l’obscurité s’installait, accompagnée d’humidité et de froid. Ce n’était pas le moment de s’enrhumer. Olivia emmitouflée dans sa capeline, observait avec tendresse les deux ombres qui s’avançaient. Joseph s’approcha de Grandma pour lui offrir un doux baiser et tout le monde entra.

– Bonsoir Mike.

– Bonsoir Tata, as-tu besoin d’aide ? demanda Mike toujours prêt à rendre service.

– Non, avec Olivia nous avons tout préparé.

– Ça sent trop bon.

– À table, annonça Arthur se présentant avec le cullen skink dans les mains.

La douce odeur d’oignons, et de haddocks venait chatouiller les narines de Mike, et son estomac gargouiller. Joseph et Olivia s’installèrent, suivi d’Henriett et d’Arthur, Mike n’avait pas pu attendre, il s’était assis. Le repas se poursuivit avec un saumon sur un lit d’épinards. Arthur s’était une fois de plus surpassé, pour faire plaisir à Mike et régaler tout son petit monde.

– Bon avant de passer au dessert, Mike nous avons une surprise pour toi, annonça Henriett, elle ne tenait plus en place.

Arthur arrivait avec un énorme paquet.

– Attends, je vais t’aider, je ne voudrais pas que tu te fasses un tour de rein.

– Merci, Mike.

– Allez ouvre-le, s’empressa de dire Henriett.

Mike était aussi impatient que sa marraine, c’était noël avant l’heure. Il déchira le papier et la surprise fut aussi grande que l’emballage.

– C’est bien trop !

– Tu entres dans la cour des grands, aussi il te faut le matériel qui va avec.

Mike était planté devant le carton, il n’en croyait pas ses yeux, un sac de golf, c’était un sacré investissement.

– Tu vas pouvoir frimer sur le parcours, lui suggéra Arthur.

– Il y a de fortes chances, vous n’auriez pas dû. C’est de la folie.

– Non, c’est juste parce que nous t’aimons fort.

Mike fondit sur sa marraine, la serrant fort contre lui, Arthur vint à son tour voulant profiter des embrassades. Mike avait les yeux qui brillaient.

– Comment pourrai-je vous remercier ?

– À toi de leur prouver que tu es le meilleur, suggéra Arthur.

– Je ferai de mon mieux.

– Tiens, l’interrompit Olivia, nous aussi nous avons un petit quelque chose pour toi.

Olivia et Joseph tendirent un paquet moins imposant. Mike le prit avec précaution, et l’ouvrit en prenant tout son temps, l’émotion le gagnait petit à petit. Et les larmes qu’il avait retenues jusque-là, glissèrent sur ses joues en découvrant le contenu du cadeau. Mike tenait dans ses mains un télémètre de golf. Mike ne trouvait plus ses mots, Henriett l’aida en annonçant :

– Bon allez après toutes ces émotions, quoi de mieux qu’un bon dessert.

– Un bon whisky pour l’accompagner ne serait pas de refus, ajouta Joseph, après tout nous avons quelque chose à fêter.

Tout le monde s’installa à table, attendant le dundee cake. Joseph attrapa les verres qui étaient rangés derrière le bar, et tout en cherchant l’élixir, demanda à Arthur :

– Est ce que Olivia t’a dit qu’elle avait rencontré Lady Mac Graig hier à son exposition ?

– La femme du Lord Mac Graig, du whisky Mac Graig ?

– Oui, c’est bien elle.

– J’ai entendu dire qu’il allait passer la main dans la semaine.

– C’est ce qu’elle m’a aussi dit au cours de notre discussion.

– Parle-moi de Lady Mac Graig ? s’empressa de demander Henriett.

– C’est une vraie Lady. Je te raconterai tout dans les détails promis.

– Bon désolé, je n’ai pas de whisky Mac Graig, la prochaine fois pense à lui demander un échantillon, ajouta Arthur.

Il était minuit quand Olivia, Joseph et Mike prirent congé. Raisonnablement, la trois-cent-quatre et la Triumph deux milles restèrent garées sur le parking du golf. Ils firent les deux kilomètres qui les ramenaient à la maison à pied, continuant à parler du week-end à venir.

En franchissant la porte, Mike embrassa une fois de plus ses grands-parents, cette journée l’avait réconforté. C’est à ce moment-là, qu’il se souvint qu’il y avait le dessin d’Harrold dans la poche de son blouson, il avait oublié de le regarder. En dépliant la feuille, il découvrit le jardin de Castle Lews tel qu’Harrold l’avait perçu avec ses yeux d’enfants, et il avait ajouté un petit mot : merci Mike, mon super héros.

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