Et Dieu dans tout ça ?... -(4)

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Le problème est que Jésus avait déjà une religion, il était juif ! Voire même un ultra-orthodoxe qui exigeait le respect de la Loi avec davantage de zèle encore que les autres juifs. Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux (Matthieu 5, 20). Son message ne s’adressait pas à toute l’humanité ; il n’était destiné qu’aux seuls juifs. Quand bien même Marc (11, 17) lui fait dire au Temple de Jérusalem que sa maison sera appelée maison de prière pour toutes les nations, Jésus ne faisait que reprendre Esaïe (56, 7) : on appellera mon Temple : “La Maison de prière pour tous les peuples.” Alors point de païen ni de gentil ! Même Paul (Romain 15, 8) a écrit que Christ s’est fait serviteur des circoncis, reconnaissant ainsi que Jésus prêchait uniquement pour les juifs.

Mon postulat de départ, si simple !, se désaccorde à mesure que nous avançons dans l’Histoire : la foi dans le Christ est une morale ; est-ce encore de l'amour, de la beauté et de la joie ?

Nous explorons ici le lieu de tous les désaccords. À cet endroit du monde chacun de nous est irrémédiablement seul, se tient dans sa solitude instinctive, et cherche un passage. Chaque être déploie ses réponses, ses stratégies, desquelles il demeure incrédule, ne se rendant compte vraiment ni de ce qu’il dit ni de ce qu’il prétend. Tension de soi, avant de rendre les armes contre le réel, tension de soi pour aimer le jour et le monde, et pour le ré-enchanter.

Ce ne peut être qu’ainsi, même si personne n’en sait rien, on court après des formules magiques qu’on invente et qu’on oublie aussitôt. On court après des résolutions, des insistances, des illuminations - puissent-elles ne pas retomber dans le silence oppressant. Revenir au réel brut et opaque dont on a l’habitude et auquel on ne peut rien. Cela pourrait être. Il se pourrait, si seulement on y croyait, si on y tenait assez et c’est peut-être là la question : y croie-t-on assez ? Avons-nous une conscience assez transparente pour laisser à travers elle passer la lumière ?

Sinon, que je retombe dans le silence. Je retombe comme je trébuche, je vacille, il y a toujours une aspérité, un pavé inégal. Je m’accroche, je chancèle, j’hésite, je tombe, l’élan interrompu se retourne contre moi. J’aurais voulu avoir la légèreté de voler, mais je dois, de la main, protéger le souffle de la vie comme la flamme d’une chandelle.

Tenir au creux de soi la palpitation de la vie.

N’est-ce pas là l’étrangeté de notre passage sur Terre, l’étrange sentiment du doute ?

J’ai dû chercher, creuser plus avant, accepter l’incroyable.

Entre désir et renoncement.

Comment accéder à la liberté qui accompagne le vrai désir, alors que je piétine dans mes manques et devant mes attentes fiévreuses, qui savent si perfidement m’enfermer ?

Saint Paul vint à mon secours. Saül le pharisien qui, quinze ans après le crucifiement, eu la révélation. Son message, il le tient du Christ lui-même, non pour professer aux juifs mais pour l’enseigner aux païens. Paul, fervent converti vivant sa foi chrétienne, reconnaissait à Jésus de Nazareth, sans ambiguïté ni réserve, la qualité de Dieu : Lui, de condition divine, bien que devenant semblable aux hommes (Epitre aux Philippiens 2, 6/7)

Comment en est-on venu là ? Comment un messie qui a échoué, qui a connu une mort ignominieuse, accusé de crime contre l’Etat romain, a-t-il pu se transformer en l’espace de quelques années, en créateur du Ciel et de la Terre, en Dieu incarné ? Pour répondre à cette question, il convient de prendre en considération que tous les mots écrits sur Jésus de Nazareth, y compris les récits évangéliques de Marc, Matthieu, Luc et Jean, le furent par des personnes qui, tel Paul, ne le connurent jamais de son vivant. De même, à l’exception de Luc, les évangiles ne furent pas écrits par ceux dont ils portent le nom. Ceux qui le connurent vraiment – qui le suivirent à Jérusalem en voyant en lui leur Roi, descendant de David, qui assistèrent au renvoi des marchands du Temple au nom de Dieu, qui furent présent lors de son arrestation et qui suivirent son agonie solitaire sur la croix – jouèrent un rôle étonnamment réduit ! Les apôtres à qui Jésus avait confié la mission de répandre son message était dans l’incapacité à exposer le fondement théologique de leur nouvelle confession ou à composer des récits instructifs sur la vie et la mort de Jésus. Simples cultivateurs et pêcheurs, ils ne savaient ni lire ni écrire.

La tâche de diffuser le message de Jésus revint donc à un nouveau groupe de juifs de la diaspora, hellénophones, urbanisés et instruits. Ils transformèrent peu à peu Jésus, faisant du zélote révolutionnaire un demi-dieu romanisé, du messie qui avait essayé de libérer les Juifs de l’oppression romaine un être céleste, entièrement indifférent aux préoccupations terrestre : Mon royaume n'est pas de ce monde (Jean 18, 36).

Et Paul de prêcher : Je vous ai enseigné avant tout, comme je l'avais aussi reçu, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Ecritures ; qu'il a été enseveli, et qu'il est ressuscité le troisième jour, selon les Ecritures ; et qu'il est apparu à Céphas, puis aux douze. Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart sont encore vivants, et dont quelques-uns sont morts. Ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres (1 Corinthiens 15, 3/8). La croyance en la Résurrection de Jésus figurait parmi les premières attestations de foi, plus anciennes que les récits de la Passion et même que celui de la conception virginale. L’acte fondateur de Paul est le mystérieux épisode de la Pentecôte. La fête que les chrétiens célèbrent sous ce nom est en réalité une fête juive, comme beaucoup de fêtes chrétiennes ; une fête juive : Chavouot, le don de la Torah, cinquante jours après Pessah’, pour nous cinquante jours après Pâque. C’est donc moins de deux mois après la mort et la Résurrection de Jésus que ses douze compagnons se trouvent réunis dans la maison même de la Cène. Ils prient. Ils espèrent. Quand le jour de la Pentecôte arriva, les disciples étaient tous rassemblés au même endroit. Tout à coup, un grand bruit survint du ciel : c'était comme si un violent coup de vent s'abattait sur eux et remplissait toute la maison où ils se trouvaient assis. Au même moment, ils virent apparaître des sortes de langues qui ressemblaient à des flammèches. Elles se séparèrent et allèrent se poser sur la tête de chacun d'eux. Aussitôt, ils furent tous remplis du Saint-Esprit et commencèrent à parler dans différentes langues, chacun s'exprimant comme le Saint-Esprit lui donnait de le faire (Acte 2, 1/4). Alors arrive l’acte de foi, inéluctable : Dieu a ressuscité des morts ce Jésus dont je parle : nous en sommes tous témoins. Ensuite, il a été élevé pour siéger à la droite de Dieu. Et maintenant, comme Dieu l'a promis, il a reçu du Père l'Esprit Saint et il l'a répandu sur nous. C'est là ce que vous voyez et entendez (Acte 2, 32/33).

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