La Femme de ma Vie

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  Les doux rayons du soleil caressent mon visage, et leur chaleur réchauffe subtilement ma peau. La lueur agresse légèrement mes pupilles protégées par de fines paupières. Je n'ai aucunement envie de me lever tout de suite, je veux encore profiter de cette savoureuse mélodie matinale, ainsi que les draps moelleux qui me protègent. Je me tourne de l'autre côté pour retrouver une luminosité plus agréable, et replonge mon esprit dans une atmosphère détendue. Alors que mon corps est totalement apaisé, j'entends à côté de moi un bruit de frottement. Un air qui s'apparente à une danse entre deux tissus soyeux, berçant mes oreilles attentives. Cependant, je ne peux résister au désir d'ouvrir mes yeux. En réalisant mon souhait, je vois en face de moi une merveille, encore plus éblouissante que la brillance du soleil. Un visage fin avec des traits sereins émerveille ma vue. Une jeune fille se présente devant moi. Non, elle est bien plus que cela, elle représente ma bien-aimée, ma moitié, mon tout. J'observe son nez fin et délicat, d'où provienne le son de sa respiration lente et régulière. Puis, mon attention se focalise sur ses lèvres attirantes.

Ses cheveux lisses comme de la soie cachent une partie de sa joue de forme homogène. D'un geste contrôlé et calme, je relève les quelques mèches pour admirer le portrait si merveilleux de mon amoureuse. Sans le vouloir, mon mouvement la fait réveiller peu à peu. Des iris d'une profondeur envoûtante m'hypnotisent. Quel regard ! Je ne m'en lasserai jamais d'une telle beauté. Rien que la voir me permet de vivre dans un bonheur unique. Cette adorable demoiselle me sourit tendrement, la rendant encore plus belle. Je réalise ma chance inouïe d'avoir à mes côtés une telle personne. Je ne peux être plus heureux. Elle m'apporte un enchantement que je n'ai jamais connu avant. Une joie indescriptible que seul l'amour d'une telle femme peut engendrer. Je la prends dans mes bras. Au contact de sa peau, des frissons parcourent mon corps, et une sensation des plus bienfaisantes s'empare de mon être. Maintenant, il en est sûr, elle est la femme de ma vie, personne d'autre ne peut remplir ce rôle mieux qu'elle. J'ai encore du mal à réaliser que ce n'est pas un rêve, mais bien une réalité. Le destin est tellement clément avec moi. Je me souviens encore du jour où nous nous sommes rencontrés.

  Cela s'était passé l'année dernière, dans le plus grand des hasards. Je venais de quitter mon lieu de travail, éreinté par cette longue journée difficile. Je marchai dans un froid glacial pour rejoindre mon bus habituel. J'attendis quelques minutes en essayant de me réchauffer du mieux que je pouvais, puis le transport arriva. A l'intérieur, certaines personnes étaient en train de lire, tandis que d'autres écoutaient de la musique. Je me dépêchai de traverser l'étroit couloir en faisant attention de ne pas déranger les passagers, et je m'assis à la première place disponible située au milieu du véhicule. Celui-ci démarra quelques instants plus tard et reprit son trajet. A côté de moi se trouvait une jeune femme qui semblait dormir. Je me mis à l'aise et fermai les yeux pour me reposer. Malgré les vibrations du bus qui me déstabilisaient parfois, je vidai mes pensées pour reprendre des forces. Soudain, je sentis un léger contact sur mon épaule. En relevant mes paupières, je vis la tête de ma voisine s'appuyer sur moi. Cette dernière était en plein sommeil. Ce rapprochement me gênait un peu, mais je n'osais pas la réveiller car elle paraissait si fatiguée. Lorsque mes pupilles s'étaient posées sur son visage endormi, j'avais été immédiatement subjugué par sa splendeur. Mon cœur répondait à mes émotions, mon souffle devenait court et une bouffée de chaleur ranimait mon corps gelé.

Jamais je n'avais ressenti de pareils sentiments. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Était-ce cela l'amour ? Étais-je donc amoureux ? Pourtant, je ne la connaissais pas. Je ne savais ni son nom ni sa personnalité. Alors pourquoi avais-je une telle attirance pour elle ? Était-ce ce fameux coup de foudre ? Le bus s'arrêta de façon assez brusque, ce qui me libéra de ma rêverie. La jeune dormeuse se réveilla également, et se leva soudainement. En se rendant compte qu'elle s'était servie de moi comme un oreiller, elle me fixa avec ses beaux yeux marron et me sourit en s'excusant. Je ne réagissais pas, j'étais comme paralysé par son charme si omniprésent. C'était fou comment j'étais captivé par elle. Je n'eus pas le temps de lui parler qu'elle était déjà partie. Je continuai ma route, la tête encore perturbée par cette rencontre bouleversante. Une petite tristesse me frappa, je regrettais de n'avoir pas été plus entreprenant. Même si je mourrais d'envie de la connaître davantage, il était peu probable que je la revoie à nouveau. Toutefois, la chance ne m'avait pas abandonné puisqu'elle était revenue le jour suivant. Ma joie fut incontrôlable, et je ne pouvais pas m'empêcher de sourire bêtement. Heureusement, mon attitude étrange ne faisait pas fuir la jolie demoiselle. Au contraire, alors qu'il y avait d'autres places de libre, celle-ci s'installa à côté de moi, me surprenant grandement au passage. Elle me gratifia de son sourire discret mais plein d'élégance, puis m'adressa même la parole :

« Bonsoir, je tiens à m'excuser encore une fois pour hier. »

A ce moment-là, j'avais enfin pu entendre son timbre de voix si doux et captivant. Je restais ébahi. J'avais du mal à comprendre pourquoi j'étais aussi séduit par elle. Tout me plaisait : son visage, sa posture, sa voix, sa gestuelle et même ses tics. J'étais persuadé que j'aimerais aussi son caractère. Après plusieurs secondes de silence, je balbutiai quelques mots difficilement :

« Ne vous inquiétez pas ... ce n'est rien. »

Dire que d'habitude, j'arrivais à m'exprimer facilement, mais devant elle, je perdais complètement mes acquis. Elle commença à me parler de son travail, des raisons de son épuisement de la fois dernière. Je l'écoutais attentivement et admirais son aisance. Plus le temps passait et plus je reprenais confiance. La discussion s'anima progressivement, et nos cœurs battirent à l'unisson. Depuis ce jour, nous nous mîmes à chaque fois côte à côte, et nos sentiments l'un envers l'autre grandirent. Je pus lui avouer mon amour avec courage. Un amour qu'elle accepta pour ma plus grande joie. S'ensuit des moments de pur bonheur, et ce conte de fée se poursuit jusqu'à aujourd'hui.

  Cela fait maintenant près d'un an que nous sommes en couple. Mon affection pour elle n'a pas changé, je peux même dire qu'elle s'est amplifiée. Nous habitons ensemble depuis quelques semaines, dans un appartement modeste. Ma petite amie vient d'obtenir une promotion qui l'oblige à travailler plus. Bien que cela m'attriste de moins la voir, je me dois d'être patient et de la soutenir du mieux que je peux. Les journées défilent rapidement, se transformant en mois. Dû à nos emplois, nous n'avons plus beaucoup de temps libre en commun. La routine s'installe de façon ennuyeuse, et notre relation fusionnelle s'atténue dangereusement. Je l'aime toujours autant, mais je dois avouer que la magie d'avant a perdu de sa superbe. Les preuves d'amour se font de moins en moins, et je découvre au fil du temps ses défauts. Malgré cela, mon attachement pour elle les étouffe, et je n'y prête pas attention. En revanche, j'ai l'impression qu'elle commence à prendre ses distances, qu'elle m'évite parfois et qu'elle ne prend plus autant de plaisir à être avec moi.

Non, je me fais sûrement des idées, c'est juste ma frustration qui me joue des tours. Ce n'est pas le moment de douter, il faut juste le supporter un peu, et tout redeviendra comme avant. Même si mes efforts sont réels, la situation se détériore graduellement. Les premières disputes apparaissent et introduisent par la même occasion une mauvaise ambiance. Pourquoi ? Que s'est-il vraiment passé ? Qu'ai-je fait pour qu'elle m'aime moins ? Est-ce moi qui suis fautif dans cette histoire ? S'est-elle lassée de moi ? Je décide d'en parler à ma bien-aimée. Je ne peux laisser les choses continuer dans ce sens. Il faut sans attendre régler ce problème avant que cela n'empire. Un samedi, alors que nous déjeunions tranquillement, je commence à lui parler de mon malaise. Elle m'écoute avec un air quelque peu indifférent. J'essaie de capter son attention, en vain. Elle semble ailleurs, j'ai l'impression que mon discours l'agace. Je ne la reconnais plus, elle a tellement changé depuis quelques temps, mais je ne baisse pas les bras, je tiens trop à elle, je dois absolument connaître l'origine de ce chamboulement :

« Y-a-t-il quelque chose qui te tracasse en ce moment ? »

Elle secoue négativement la tête en baissant les yeux. Son comportement est étrange. Cependant, je décide de continuer à creuser :

« Dis-moi ce qui ne va pas. Je veux juste le savoir pour pouvoir t'aider. »

Elle reste muette, n'osant même pas me regarder. Je sens un réel mal être, plus profond que ce que j'aurais pensé. Je tente une dernière question, celle qui peut me rassurer ou à l'inverse m'anéantir.

« Est-ce que ... tu m'aimes toujours, ma chérie ? »

Aucune réponse. Elle reste impassible. Ce silence me surprend, me choque même. Je pensais qu'elle allait me dire quelque chose, ou au moins me faire un petit geste. Mais rien, aucune expression, le néant absolu. Le désespoir m'envahit, humidifiant mes yeux déçus. Je ne peux plus supporter d'être en face d'un mur. Je pars de l'appartement, blessé et abattu, la laissant seule. Il faut que je prenne l'air et que je médite sur ce qui vient de se passer. Ma plus grande peur semble devenir une réalité. Que dois-je faire ? Insister ou laisser le temps faire son travail ? Après une journée sous le signe de la réflexion, je rentre à mon domicile, bien décidé à renouer le contact avec mon amoureuse. Bizarrement, il fait tout noir dans le salon, et il n'y a aucun bruit. J'actionne la lumière et appelle ma petite amie. Pas de réponse. Je m'inquiète de plus en plus. Où est-elle partie ? Je décide de l'attendre, étant certain qu'elle reviendra un peu plus tard, mais une lettre posée sur la table à manger brise mon optimisme. Je l'attrape avec crainte et la lis une première fois, ensuite une deuxième fois, puis une troisième. Je ne peux pas croire ce qu'il est écrit dessus. Mon cerveau rejette ces mots si douloureux. Elle s'en est allée, elle m'a quitté, elle m'a abandonné et cela pour quelqu'un d'autre. Elle, que je chérissais plus que mon existence, ne m'aime plus. Elle, que je considérais comme la femme de ma vie, ne fait plus partie de ma vie. Mon corps réagit à cette peine extrême, tandis que mon esprit reste figé par le choc. Quel désastre !

Mes larmes coulent à flots pour laver mon malheur, mais celui-ci est si envahissant qu'il ne pouvait être débarrassé. Je passe la nuit à ressasser ce chagrin. Jamais je n'ai ressenti une souffrance pareille. Les jours suivants ne font que m'enfoncer dans la dépression. Je n'ai plus envie de sortir, je ne veux plus manger, j'ai même délaissé mon travail. Je me lamente seul, dans mon monde tombé en ruine. Dans chaque pièce de l'appartement, je me remémore les moments heureux passés avec cette femme que j'aime tant, et cela me fait encore plus mal. Je ne parviens pas à l'oublier, elle est tout pour moi. Une vie sans elle est une torture atroce. Ma tête est lourde, mon corps devient las et mon cœur subit des blessures inguérissables. Je ne supporte plus ce déchirement, chaque seconde est un calvaire pour moi. A quoi bon vivre dans de telles circonstances ? Mon âme est dans un état végétatif et n'attend plus que ce martyre s'arrête. Je rassemble mes dernières forces pour me diriger vers la cuisine. Je me tiens devant un tiroir et l'ouvre sans une once d'appréhension. Quelques larmes s'échappent pour me dire adieu. Je saisis un grand couteau, puis le dirige vers mon poignet. Soudain, le téléphone sonne bruyamment. La tonalité stridente me stoppe dans mon élan. Je reste immobile, mes pupilles fixant l'arme aiguisée. Quelques instants plus tard, l'appel entre dans la messagerie. A l'entente de ce timbre si familier et nostalgique, je laisse tomber l'ustensile et décroche le combiné avec des mains tremblantes.

« Allô, maman ? réussis-je à prononcer avec une faible voix.
- Oh mon garçon, comment vas-tu ? » demande-t-elle d'un ton doux et chaleureux.

Cette question innocente me procure un apaisement imminent. Je ne peux retenir mes émotions et craque sans retenu. J'entends l'inquiétude de ma mère qui tente de comprendre la cause de ma détresse. Je ne dis rien, noyé par mes pleurs. Je lâche le téléphone, ne pouvant plus garder mon calme. Je sombre dans une mélancolie absurde pendant une certaine durée. Combien ? Je ne peux répondre tellement j'ai perdu la notion du temps. Quelqu'un frappe à la porte et la voix de ma mère m'appelle anxieusement. Malgré mon peu d'énergie, je me dirige vers l'entrée pour l'ouvrir. Dès que je l'aperçois, je me jette dans ses bras en pleurant davantage. Elle m'enlace également avec sa gentillesse naturelle, et me chuchote des mots réconfortants qui me calment peu à peu. Mon envie de suicide disparaît de façon surprenante. J'ai l'impression de retourner en enfance, à côté de cette personne si aimante. Je me laisse totalement aller et ne suis plus conscient de rien. Retrouvant mon calme après sûrement des heures de lamentations, je me rends compte que je me trouve dans mon lit. Mes yeux rougis m'incitent à les garder fermés, et mon corps éreinté par ce traumatisme me convainc de dormir sagement.

  Je me réveille enfin, je ne sais pas quelle heure il est, ni où je suis. J'ai mal à la tête, mes muscles sont courbaturés et ma vision est floue. Je ne me souviens pas clairement des événements précédents. Pourquoi suis-je dans ce lit ? Quel jour sommes-nous ? J'ai l'impression d'avoir été maltraité pendant des jours. Je tourne mon visage et aperçois la silhouette d'une personne. En plissant des yeux, je reconnais ma mère et me rappelle enfin les moments passés. Bien que je sois extrêmement fatigué, j'avais encore envie de pleurer. Une main affectueuse me caresse les cheveux, accompagnée d'une voix attendrissante. Ma mère sait toujours comment me consoler, sa tendresse m'a tellement manqué. Grâce à cela, je me retiens et profite de ce soutien bienveillant. Le temps s'écoule lentement, et je garde inlassablement ce désespoir qui compresse ma gorge. J'ai eu enfin le courage de raconter toute l'histoire à ma mère. Sa présence m'honore. Elle n'a pas hésité à rester auprès de moi depuis cette crise. Je peux ressentir dans son attitude, dans son regard, dans ses agissements, dans ses paroles et même dans ses plats son amour infini pour moi.

Elle m'écoute et m'encourage sans chercher à me faire la morale. Pourtant, lorsque je lui avais annoncé vouloir vivre avec cette jeune fille, ma mère me mettait en garde et me signalait que c'était trop tôt. Je n'y faisais pas attention, aveuglé par mon désir. Je comprends dorénavant sa crainte. Pourquoi ne l'avais-je pas écoutée avant ? Je l'avais pourtant abandonnée soudainement, ne faisant qu'à ma tête. Je lui ai certainement fait beaucoup de peine. Je ne me souviens même pas lui avoir rendu visite depuis que je me suis installé dans cet appartement. Malgré mon ingratitude, elle est venue immédiatement à mon secours, sans aucune hésitation. Cela lui ressemble bien, à toujours m'aider lorsque j'en ai besoin. Si je suis encore là, c'est grâce à elle. Mon existence, mon bonheur, ma réussite, tout cela est grâce à elle. Quand j'y réfléchis ne serait-ce qu'un peu, je lui dois tellement. Depuis ma naissance, elle n'a pas cessé de s'inquiéter et de s'occuper de moi, le faisant de façon transparente, sans laisser paraître une quelconque lassitude. Ma mère ne s'est jamais plainte de mes caprices. Elle a constamment fait des efforts avec le sourire. Elle m'a inculqué les valeurs morales avec patience, pardonnant mes erreurs sans exception, même les pires.

Qu'est-ce qui m'a pris de l'ignorer de cette manière ? Peu importe le nombre de fois que je la blesse, elle a sans cesse été là pour moi. Lorsque je chute, elle me relève. Lorsque je suis épuisé, elle me donne de la force. Lorsque je deviens fou, elle m'apporte de la lucidité. Et moi, qu'ai-je fait pour elle ? Qu'ai-je fait pour mériter son amour ? J'avais pensé naïvement que son affection pour moi était ordinaire, qu'elle m'était due, qu'il n'y avait rien d'exceptionnel. Je me suis trompé lourdement. Ce qui m'est arrivé est certes très malheureux. Toutefois, cela m'a ouvert les yeux sur une chose encore plus importante. Elle était là depuis le début, depuis ma venue au monde, à côté de moi depuis toujours. Je me sens atrocement idiot de ne pas l'avoir réalisé avant. Néanmoins, j'ai maintenant une certitude : ma mère est la personne la plus importante pour moi. C'est tellement évident que cela me rend triste de ne pas m'en être aperçu préalablement. Dans l'avenir, je retomberai probablement amoureux d'une autre personne. Mais quoi qu'il advienne, ma mère sera ma priorité, la seule qui mérite mon dévouement, celle pour qui je donnerai ma vie. Car il n'y a plus aucun doute, c'est elle, la femme de ma vie.

Maman, je t'aime ♥

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