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Un homme sage qui s'était révélé être un charlatan de la pire espèce bien des années plus tard, m'avait confié un dicton de son bagou qui m'avait marqué ;

« Une unité représentait un homme, cet homme réunît les peuples, ces peuples devinrent un ensemble, cet ensemble était une unité. » Ce dicton résonnait dans mon esprit comme un espoir dans ces moments de fureur. Cet homme existait. Il était grand et bousculait les royaumes. A moins que ce soit une femme, ou des femmes. Oui, sans elles il ne serait pas l'homme providentiel. Mais sera-t-il le héros de notre monde ?

Solchar Grossdite, prêtre bibliothécaire de l'Abbaye des Grandes Archives d'Horloss.

Chapitre 01 : Le Royaume de Zakusini

Les dunes de sable du royaume de Zakusini des Terres du Sud scintillaient sous la lumière puissante des Lunes de Dunia réunies en cette unique nuit. Ces valons minéraux étaient acérés de rochers de marbre blanc saillant vers le ciel tel des crocs de loup. Leurs ombres dessinaient une gueule ouverte de prédateur sur le désert. La majestueuse ville de Zakusini était au confluant de la Mer de Dunia et du fleuve nourricier des Terres du Sud. Elle était liée à la mer par son port imposant, le plus grand du continent, et mariée au fleuve ; sa colonne vertébrale et son sein allaitant une flore luxuriante.

Le roi Zaïdi Kubwa était mort le dernier Son d’Attondar, le jour de La Lune Unique, le jour où Storma la Grande éclipse Lillma la Petite, le jour où les dieux de Dunia festoient, marquant le début de la nouvelle année. A son âge avancé, son amour pour les jeux de l’Eclipse lui avait été fatal. Sa participation à la finale du combat des double-lames pour la vingtième année consécutive fut son ultime plaisir. Cette arme de guerre habituellement composée d’un long bâton de deux pas muni d’une lame à chacune de ses extrémités, était réduite à sa plus simple expression ; un bâton, à l’occasion des jeux. A la place des lames, les bouts de la tige de bambou durcie au feu de bois étaient peints en jaune. Lors du combat interminable et virevoltant dont Zaïdi avait le secret, et malgré la protection de son plastron de cuir garni de lamelles de bambou tressées, le coup violent porté au sternum par son très jeune petit-fils Sabahati arrêta net le cœur royal. Le pigment du bout de l’arme d’exhibition imprima un cercle jaune sur la protection de poitrine. Le regard figé sur la tribune royale avec en son cœur ses deux fils Falmé et Jiwe, s’éteignit devant sa lignée. Il s’effondra telle une statue renversée dans le sable tâché par la sueur, la bile et le sang. La chute souffla un nuage de poussière blanche recouvrant le corps comme de la cendre sur du bois brulé. Sabahati, à peine sorti de l’enfance, tournoyait sur lui-même pris de panique, ne sachant quoi faire. Un flot de larmes inonda son casque. Les médecins surgirent dans l’arène. On fit sonner le corne d’ivoire sacré au sommet de la statut du dieu de la santé ; Adawa. Abasourdi, Falmé s’était dressé sur ses jambes tremblantes, observant son père gisant. Jiwe resté assis dans son fauteuil confortable contemplait la scène d’ouverture de son nouveau règne. Il finit par se lever voyant son fils tomber à genoux auprès de la dépouille de son grand-père.

— Reprends-toi mon fils et quitte l’arène victorieux. Ta mère t’attend aux vestiaires.

Falmé se tourna vers son frère, choqué et furieux.

— Comment peux-tu lui dire ça, mon frère ? Père est surement mort !

— Je sais et je suis le premier dévasté par cette terrible perte, mais mon fils doit tenir son rang. Il est le prince héritier, clama-t-il. Et moi je suis le roi, songea-t-il.

Falmé fit volte-face et s’engouffra dans les travées du stade. Jiwe se réinstalla sur son fauteuil avec la posture d’un roi sur son trône. Il ne rata pas une miette de l’évacuation de son père. Une fois disparu dans les méandres sombres du stade, il posa son front sur ses mains jointes masquant son expression du visage au public horrifié, resté nombreux dans le stade.

Le palais de la dynastie Kubwa surplombait Zakusini depuis plus de cinq cents ans, niché dans une oasis abondante. Il n’y avait point de rempart en pierre, la demeure royale n’avait pour protection que ses immenses palmiers au tronc épais où l’on pouvait placer deux hommes sur son diamètre. Les feuilles aussi grandes que la voilure d’un bateau de guerre, ombrageaient efficacement les jardins du domaine. Les ingénieurs constructeurs avaient réalisé une véritable prouesse en détournant l’eau de la source Zaku qui surgissait de terre dans la cour triangulaire du palais. L’eau était dirigée par un canal de marbre rectiligne qui coupait le palais en deux s’échappant par l’entrée et le parvis, puis descendant les mille pas de dénivelé jusqu’au fleuve par des systèmes de piscines et de cascades majestueuses. Le patio paré de statues représentant les grands noms de la dynastie, d’allées végétalisées et de différents salons d’extérieur à la localisation privilégiée selon les heures de la journée et du soir, était entouré par trois grandes tours carrées à chacune de ses extrémités. Elles étaient surmontées par des petites pyramides de marbre blanc. Construites avec les épaisses pierres noir brillant des mines de la province de Kubwa, elles abritaient dans la fraicheur les appartements royaux, la grande salle à manger commune, les salons de réception et toutes les autres pièces de vie. A l’arrière du palais se dressait discrètement à couvert des palmiers millénaires, le temple d’Azaku ; le dieu des Terres du Sud. Il servait de lieu de culte, et possédait une chambre mortuaire. Dans ses entrailles, elle accueillait la crypte où reposait les ancêtres de la dynastie en position debout dans de grandes jarres de marbre ornées de sculptures et de dorure.

Le roi Zaïdi était allongé nu sur la table des défunts composée d’une pierre noir unique de trois pas de long, un de largeur et un de hauteur. Une dizaine d’encens brûlait dans la pièce sans fenêtre et propageait leur parfum fruité. Même l’éclairage composé d’une centaine de bougies brulaient dans de la cire végétale diffusait des effluves sucrés. La peau noire du roi luisait comme l’huile à feu des profondeurs des sables. Son épiderme était traité avec des huiles de conservation animal. De longs sofas encadrant l’autel du corps accueillait les membres du palais souhaitant veiller le défunt. Après plusieurs heures auprès de son père, Falmé se décida à l’abandonner pour retrouver son épouse et son nouveau-né. Avant de sortir, il s’inclina devant le Jade des Mers qui gardait le temple d’Azaku. C’était une sphère minérale parfaite d’un bleu encre quasiment noir. Il reposait sur un pied en marbre rose sculpté d’ornements rappelant les vagues de la mer. Cette géométrie parfaite était naturelle. A part un minutieux lustrage, il n’avait subi aucune modification de l’homme. Ce minérale, le Jade des Mers, était le plus précieux du royaume. C’était la pierre des dieux et des rois. Le Jade surgissait des profondeurs de Lunia, expulsé par de multitude petits cratères sous-marin grâce à de puissant geysers d’eau bouillante. Il reposait ensuite sur le sable au large de la côte de Zakusini. Les jadiers, les plongeurs les plus expérimentés du royaume, cueillaient le joyau par plusieurs dizaines de pieds sous l’eau. Falmé effleura de la paume de sa main droite la surface courbe et brillante du Jade. A son passage, une légère lueur bleue éclaira le cœur de la pierre découvrant un réseau de veines minérales comme un buisson sans feuille enfermé dans la sphère. Depuis 10000 ans et la découverte du premier Jade des Mers, les zakusiniens avaient créé un lien quasi organique avec la pierre. Elle réagissait à leur contact. Des légendes racontent qu’elle procurait d’incroyables pouvoirs à des zakusiniens élus par le Jade, il y a plusieurs millénaires. Ce serait ces élus qui serait à l’origine de la première dynastie des rois de Zakusini. L’histoire relatent qu’il fallait l’obtention du pouvoir du Jade pour être roi. Mais depuis sa puissance s’est tarie et le trône se transmet de père en fils. Cependant si un héritier n’éclaire pas le Jade à son contact, il peut être déchu. Nulle crainte pour les fils et petits-fils du roi Zaïdi, ils illuminaient tous le Jade des Mers.

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