Harcèlement

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Pour moi chaque mot , chaque intonation , chaque allusion a de l'importance. Tous ces détails pris séparément paraissent anodins mais leur ensemble me crée un processus de mal-être dans ma vie professionnel et se répercute bien sûre dans ma vie privée.

Dans un groupe il est normal que des conflits se manifestent, une remarque blessante dans un moment d'énervement ou de mauvaise humeur est dans les possibles mais c'est dans la répétition de ces remarques humiliantes , sans nuances qui étayent, j'essaye de ne pas me formaliser, j'essaye de le prendre à la légère afin que l'on dise de moi que je suis tolérante et compréhensive comme je me dois de l'être envers les résidents dont je m'occupe( je suis éducatrice spécialisée).

Dans des moments de crise, et là cela fait un moment que la crise dure dans cet établissement pour personnes sourdes avec des handicaps associés, j'ai tendance à accentuer ce que je suis(encore faut-il que je sache qui je suis!) après une dizaine d'années de psychothérapie pensez vous que je sache qui je suis?

J'ai une capacité à réagir à l'autoritarisme et  à résister ce qui me fait devenir "cible".

Ma dévalorisation par la direction a été acceptée et cautionnée par le groupe( pendant qu'on s'occupe d'elle ,on me laisse tranquille)

Retours des collègues:" tu es difficile à vivre, tu as mauvais caractère, tu n'es pas d'ici, tu es homosexuelle, tu es trop différente du groupe et cela fait peur"

J'ai été agressée par une collègue connaissant mon histoire lors de la synthèse d'une résidente, il a fallu pour me faire taire et fuir une allusion sur mon passé.

S'il n'existe pas un climat de confiance il est impossible de demander de l'aide.

Dans un premier temps cela a commencé:"-Dés maintenant il faut que vous alliez en activité" des ordres de ce genre sans tenir compte de l'état de santé du résident me mettait dans un stress pas possible!

Après ce fut la surveillance:"Comment se fait il que vous commenciez à 8h?" par téléphone cette question, alors que j'avais laissé la résidente sous la douche!

Des appels sans cesse pour demander des explications sur tout 

Je pouvais tout accepter et ne pas arriver à dire que c'était insupportable et j'entendais en réunion:-"il faut travailler sur la confiance!" quand il y a des reproches ils sont flous, imprécis et laissent place à toutes les interprétations et à tous les malentendus. Une communication non verbale: soupirs, haussements d'épaules, regards en coin, non dits, sous-entendus, allusions(-"c'est vrai que vous, vous avez croqué la pomme!) . j'ai commencé à douter de mes compétences professionnelles, en réunion de synthèse toutes mes paroles sont décortiquées, sont remises en question, un mot pour un autre, qui ne veut rien dire, qui déforme mes pensées, mes dires. On me coupe la parole, on ne m'écoute pas, je cherche des alliées du regard et tout le monde baisse la tête, je suis souvent déstabilisée par des propos contradictoires sans arguments valables. Difficile de se défendre, comment rapporter un regard? une parole chargée de sous-entendus?

Mes propres perceptions ne sont pas remises en question quand j'entends d'autres collègues d'un autre groupe, ouf, je ne suis plus seule.

Fixer des objectifs impossibles à tenir par exemple:- 2 éducateurs pour 21 résidents à faire manger, donner les médicaments, les soins du corps(douches,habillages) , contention des jeunes en crise, et bien sur activité parce qu'on oublie pas sa formation première: "les amener à être sujet"

-Horaires extensibles impossibles à négocier, surcharge de travail dans l'urgence, exigences incohérentes, "il est interdit de faire de la confiture sur la Mas! mais vous devez leur faire à manger sur ce lieu! injonctions paradoxales qui rend fou!

Comment avoir pour objectif l'autonomie des résidents quand la moindre initiative est menacé d'avertissement ou ramené à un rappel incessant de responsabilité et donc d'une culpabilité?

Aucun sentiment! aucune émotion ne doit transparaître, il n'y a aucune possibilité de parler de ses affects, il en faut pour rentrer en relation avec la personne quelquefois la personne.

Où est la limite entre se faire houspiller pour stimuler et manipuler afin d'obtenir la soumission?

Aucune possibilités de formation tout est refusé sous des prétextes fallacieux, les motivations sont cassées en réunion de groupe car supervisé par la direction.

"La peur de se tromper est la porte qui nous enferme dans le château de la médiocrité. Si nous parvenons à la vaincre, nous faisons un pas décisif vers notre liberté"

"Se tromper fait partie de la condition humaine": NIETZSCHE

Attitudes paradoxales: mensonges, sarcasmes, dérision et mépris sont des comportements inacceptables mais courants dans cette entreprise, comme si s'occuper de personnes handicapées ramènent les actes les plus destructeurs à la surface des personnes qui s'en occupent.

Je me suis sentie longtemps inintéressante voire inexistante pour ne pas dire d'autre mot qui encore à ce jour me dévaluerait à mes propres yeux car là est la question, l'essence même du harcelé est qu'il a tellement peu confiance en lui, la vie m'a tellement abimé qu'il me faudra des années avant de trouver ou retrouver une estime de moi même, ma colère est tellement forte de m'être laissé faire, de n'avoir pas trouvé les moyens de me défendre sans perdre mon emploi que pour le moment j'écris, j'écris pour dire et alerter que maintenant c'est courant.

Il y a des prédateurs partout, au moindre doute fuyez, fuyez si vous vous aimez un peu.

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