JE APRÈS-MIDI

2 minutes de lecture

Au fond de mon placard, j’hirsute le souvenir de mes cheveux d’une main réflexe. J’escalade des hypothèses insensées pour me vautrer dans la fange d’une logique insoutenable. Je tourne en cage, j’éviscère les mauvais mots. S’insinue pourtant cette petite voix, cette putasse dénuée de râtelier. Elle mendie une écoute, elle simule la caresse :

« Quelle beauté ! Quelle inaccessibilité ! S’adressait-elle seulement à toi ?
- Mais j’étais seul !
- Étrange. Peut-être se moquait-elle.
- À quels desseins ?
- Par vengeance, par ennui ; un pari, ou un vice… les femmes sont si imprévisibles.
- Mais si…
- Si quoi ? Regarde-toi. Regarde-la.
- Je ne fais que cela.
- Alors tu sais ».

Vieille salope édentée ! Elle languit sur le banc de mon esprit, grelots en mains pour rappeler sa présence.

Je clos les parenthèses, je claquemure les divagations. Delirium très mince. Elle range l’image dans le rayon des souvenirs, elle pose un bâillon sur mon cœur et serre… serre à en expulser les sentiments. Elle sourit de toutes ses gencives. Je la soupçonne de s’acoquiner avec l’arlequin dès que j’ai le dos tourné. Elle a la gueule toute irisée de mauvaises pensées.

Je m’enfuis à cheval sur mon chariot. La secrétaire pouffe les affres de ses passions nocturnes en bout de fil. J’écrase ses tongs bleues panique. Heureusement ses ongles reposent rose sur son bureau. Elle m’absout de son sourire vide.

Je file dans les étages inférieurs. Je veux la semer. Abrutissement de la collecte. Il faut du courrier. Pour l’oublier. Je ride la peur, je l’étire en bonne humeur.

Couloir en suite de portes.

TOC.
J’entre.

Ils fument café pincés, demi fesse en bord de bureau. Conversation figée, ils contemplent ma mine composée. Je souris plus qu’ils ne peuvent le supporter. Blafards aux costumes anthracite, ils pendulent au bout de leur cravate. Des bribes de phrases restent en suspend. Elles volutent impatientes de reprendre leur échange. J’effectue mon numéro. Ils déballent à nouveaux chiffres et pourcentages, doigts papiers ciseaux et m’ignorent au fond de leur dos. Débauche d’évaluations patibulaires, révocation des prévisions, langage codé pour évoquer des crimes contre le personnel.

Je repars avec mes enveloppes et mes paranos. Je crève de faux-semblants. J’me barrerais bien au fond d’un gouffre pécher des illusions. Mes rotules se démantibulent, mes poumons sifflent des mélodies tuberculeuses et pourtant je me trépane à l’habitude professionnelle.

Je shoote mon chariot. Il s’enfuit en zigzag.

J’ai la haine qui éclate, l’imaginaire qui déraille.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire hunkle ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0