Chapitre 1 : MHJ4

17 minutes de lecture

En ce premier lundi du mois de septembre, une jeune fille aux cheveux noirs descendait les escaliers du premier étage aussi lentement qu'elle le pouvait. Marche après marche, elle finit par poser ses pieds sur les carreaux blancs du salon, au rez-de-chaussée. Elle respira un bon coup, et appela :

- « Fosie ! Je suis prête ! »

Depuis l'encadrure située à côté des toilettes, une vieille femme apparut, un verre d'eau rempli à la main. Avec ses cheveux attachés en chignon où seules deux petites mèches encadraient librement son visage, elle portait un chemisier à carreaux roses avec des boutons fleuris blanc, ainsi qu'un pantalon croco noir.
Déjà munie de ses grandes bottes marrons, la grand-mère remonta ses lunettes pendantes au bout d'une chaîne sur son nez, avant de soupirer. Elle regarda sa petite-fille avec découragement, et ne put s'empêcher de constater ce spectacle désolant.

Le pull à carreaux marron-vert du grand-père Panthaléon un peu trop grand, un jean sûrement choisi au hasard, et des chaussettes noires. Sans compter ses cheveux à demi-coiffés qui lui tombaient plus qu'autre chose devant les yeux ...

- « Tu es vraiment obligée de porter ça ? »
- « Je suis vraiment obligée d'y aller ? » retournait sèchement la petite à qui l'idée de mettre autre chose ne semblait pas plaire

Fosie se résigna et avala son médicament. En allant nettoyer son verre, ses yeux tombèrent sur un petit appareil posé sur le plan de travail. Elle le prit avec un grand sourire et se précipita vers le salon.

- « On en prend une ? » agitait-elle l'appareil photo instantané dans les airs

En l'apercevant, la brune sursauta et courut se cacher derrière un fauteuil, ne laissant apparaître que sa tête.

- « Tu sais très bien que je n'aime pas les photos ! » grommelait-elle
- « Oh allez ! On en prend seulement le jour du nouvel an, à la fête des grands-mères, le 13 août ... Je veux un souvenir de ce grand jour. » expliquait-elle les yeux brillants
- « Grand jour, tu parles ! Tu m'obliges juste à aller à l'école. »
- « Ça te fera du bien d'y retourner. »
- « Je préfère les cours à domicile avec toi. »
- « ... Allez viens, on va juste en prendre une dans le jardin avec les plantes. »

Fosie s'empressa d'attraper son petit pissenlit boudeur avant qu'il ne s'envole et la poussa vers la baie vitrée du salon. Le passage ouvert, elle descendit les trois marches de bois et se posa près du cabanon où résidaient déjà quelques verdures.

- « Dis tulipe ! » réjouissait-elle avant d'appuyer sur le bouton

Elle avait beau laisser sa bonne humeur paraître comme d'habitude, la vieille ne pouvait s'empêcher d'être inquiète. Voilà à présent quatre ans qu'elle donnait des cours scolaires à sa petite-fille depuis sa maison. Et bien qu'elle ait eu un peu de mal avec les maths, les tutos YouTube que Paul lui avait montrés l'avait bien dépannés.
Mais elle devait reconnaître que ses méthodes étaient un peu vieillottes. Elle s'inquiétait de l'avenir de sa petite fleur préférée mais était persuadée que cette nouvelle école sera bonne pour elle. Après tout, Mr.Criss-Angel et Hilfe avaient même fait le déplacement jusqu'à sa demeure pour en discuter et l'accepter parmi leurs nouveaux élèves. Oui, tout ira bien, elle en était sûre.

La photo sortie du petit appareil, elle la regardait déjà avec nostalgie.
Traînant des pieds dans la maison, sa petite boudeuse alla jusqu'à l'entrée et commença à mettre ses chaussures quand elle s'exclama :

- « Oh ! Tu as vu ? C'est sûr, on va être en retard. » désigna-t-elle l'horloge murale avec un ton faussement paniqué
- « Ne t'en fais pas, le rendez-vous a été déplacé d'une heure. Sans compter que j'ai avancé toutes les horloges de la maison. Oups ! Voilà maintenant qu'on a deux heures d'avance ... Allez mauvaise graine, finis de mettre tes chaussures et on y va. » rigola la moins jeune qui ne comptait pas se laisser faire par la mauvaise humeur

Les préparations faites, la brune regarda une dernière fois le salon rempli des vieilles affaires de sa grand-mère avant d'attraper sa valise. Franchissant la porte, elle passa le portail d'entrée et se dirigea vers la voiture verte garée non loin de là. Elle ouvrit le coffre et y déposa tous ses bagages sauf un sac allongé, presque vide.

- « Tu as pris tout ce qu'il te fallait ? » demanda la vieille qui s'apprêtait à fermer la porte
- « Oui. » répondit simplement la jeune en claquant le coffre

Assise sur le siège passager avant, c'est une fois à sa hauteur que Fosie ajouta :

- « Au fait, j'ai rajouté un maillot de bain, mon lecteur CD et un peu d'argent de poche dans ton sac. »
- « Pourquoi faire ? » demanda la passagère, incompréhensive
- « Tu en auras besoin lors des soirées avec tes amis. Franchement tu exagères, on aurait dit que tu n'avais fait ta valise que pour deux jours. Comme si tu allais revenir ici aussi vite. Maintenant que j'y pense, j'aurais peut-être dû t'acheter ce truc. Comment ils disent déjà ... un lecteur mp3 ? Ouais, avec l'option bloutou. » s'égayait-elle

Mais son interlocutrice ne l'écoutait plus. Elle n'avait aucun intérêt pour les maillots vu qu'elle ne savait pas nager, et avait l'étrange impression que ce départ réjouissait la personne assise à ses côtés. Allait-elle en profiter pour faire des bêtises ? Comme acheter une voiture décapotable en son absence ? Ou pire ! La moto qu'elle avait repéré dans le magazine Sensation Fou il y a deux jours.

Elle déglutit à cette idée, mais revint immédiatement à la réalité. Bien qu'il faudrait qu'elle la surveille, elle ne pouvait bougonner pour l'heure qu'une petite phrase à peine audible :

- « Je n'aurais pas d'ami de toute façon. »
- « Oh, allons, ne sois pas si défaitiste. Cette école sera remplie de jeunes comme toi. »
- « Tu veux dire désespérés ? »
- « ... Tu sais très bien ce que je veux dire. »

Elles se regardèrent toutes les deux, droit dans les yeux et les sourcils froncés. Fosie soupira une nouvelle fois et brisa cette tension en démarrant la voiture. Si elles n'y allaient pas maintenant, elles allaient vraiment finir par être en retard.

Depuis la fenêtre du véhicule, la maison et sa petite clôture de bois blanc s'éloignaient progressivement. S'effaçant du paysage après quelques kilomètres, se fut au tour de la pancarte « Merci d'être passer à Swuyn. » d'être dépassée.
Le voyage venait bel et bien de commencer.

La route était silencieuse malgré la radio qui terminait de fredonner « Venez que je vous fume » avant d'enchaîner avec « Pitié ramenez-moi ! ». Et bien qu'elle ne s'ennuyait pas à voir le paysage champêtre, la silencieuse ne pouvait s'empêcher de repenser à la phrase de la bavarde.
« Des jeunes comme toi ... ». Machinalement, elle ouvrit le sac posé sur ses jambes et en sortit un petit prospectus qu'elle déplia.

Magihigh, une école pour mages.
Quand sa grand-mère le lui avait donné pour la première fois, elle avait mis plusieurs jours avant d'accepter de le lire et sa conclusion fut sans appel : cette situation était ridicule. Cette stupide idée venait de ces mots : « Une école ? », absurde avait-elle pensé, « Pour les mages ? », alors là, complètement grotesque. La magie était contre-nature, un truc maudit qui ne déclenchait que des malheurs. Tous les habitants des continents du Nord pensaient de cette façon, alors y mettre un pied ne lui avait même pas effleuré l'esprit.

D'ailleurs n'importe qui n'y aurait pensé ; à commencer par distribuer ce genre d'attrape-ennuie.

Bizarrement, elle s'était laissée persuadée dans une discussion interminablement longue. Elle avait décidé d'y aller non pas pour apprendre à maîtriser sa magie, mais pour s'en débarrasser. C'était peut-être un coup bas envers sa responsable légale, mais au moins elles y seraient toutes les deux gagnantes.

Parcourant le reste du prospectus sans grand intérêt, ce ramassis d'aberrations irrita encore plus la brune. Particulièrement les montages de photos ratés qui leur faisaient paraître aussi riche que ... que des patates tireuses de langues couleur mensonge, tiens !

- « Quels snobs ! » pensa-t-elle immédiatement

Elle plia le prospectus maladroitement, sans regrat, mais perçut tout de même la mention « certifié par la famille Bonté ». Bah tiens. L'une des familles les plus influentes du Nord, rien que ça ?

Malgré ces soi-disant trucages, la petite nota tout de même l'argent que cet établissement allait leur faire dépenser. Elle avait l'air chère, et sa grand-mère n'avait pas les moyens. Avec sa retraite ? Pas suffisant. Avec l'aide du facteur ? Et puis quoi encore. Avec le soutien du reste de la famille ?

Mais à quel soutien pensait-elle ? Ça faisait des années qu'elle ne les avait pas revu. Ni son père, ni sa sœur et encore moins ... Pff ! Elle réfléchissait trop.

Elle fourra définitivement le morceau de papier dans son sac et ferma les yeux. Cette bêtise lui avait donné mal à la tête.

***

Beaucoup plus de voitures passaient à côté d'elles dorénavant, sans compter les piétons aux bavardages incessants. Étaient-elles arrivées ?

- « Oh ! Tu es réveillée ? Ça tombe bien. Dis-moi, entre un aéroport et une gare, lequel est mieux ? » fit semblant de réfléchir la grand-mère
- « Lequel a le plus de passants ? » répondit la petite-fille en se frottant les yeux
- « L'aéroport. » indiqua rapidement la grise
- « Alors la gare. » trancha la noire
- « Parfait ! Donc on peut y aller. »

L'endormie ne comprenait pas. La réveillée redémarra la voiture, quitta le trottoir et rejoignit la circulation. C'est alors qu'un immense bâtiment de marbre blanc se dessina devant elles.

- « La gare de Huakograi !? Mais Fosie ... !!! »

Le véhicule se gara sur une place libre du parking avant que sa conductrice ne regarda sa passagère paniquée.

- « Ma puce, tu as vu où était l'école ? » essaya-t-elle de raisonner

Mais le choc ne lui donna aucune réponse. Les nerfs a vifs, la plus petite, elle, regardait ce nouvel environnement sur le qui-vive. Des voitures, des chariots, du bruit ... Pourquoi y avait-il autant de personnes dans un endroit pareil ?!

La plus âgée comprit rapidement que parler à sa petite fleur ne servirait à rien. Quatre ans sans voir personne d'autre que le facteur ou son fils, ça fait des dégâts. Mais elle était soulagée qu'elle ne lui ait pas fait une scène, ou pire, qu'elle se soit évanouie. Il lui fallait juste du temps à présent.

Fosie lâcha son volant et se reposa sur son dossier. Les yeux fixés sur les alentours également, elle finit par caresser le dos de sa passagère qui eut un léger sursaut.
N'ayant d'autre choix que d'attendre que sa petite-fille se calme, elle n'aimait pas voir son bouton d'or dans cet état. Elle avait l'impression qu'elle perdait les derniers pétales qui lui restaient sans qu'elle ne puisse pouvoir l'aider à les faire repousser.

Elle patienta encore et se décida à agir. Sa fleur était têtue, au point que parfois elle se devait de lui forcer la main ; et ça, elle l'avait oublié.
Elle sortit de la voiture, la contourna, et ouvrit l'autre portière. Toujours sur la défensive, elle tendit sa main à celle qui reculait déjà.
Un peu sceptique, la boudeuse accepta de sortir après une embrassade et une promesse : sa grand-mère ne lui lâcherait la main qu'à leur point d'arrivée.

Sans vraiment de conviction mais avec une partenaire pleine d'entrain, elle alla récupérer ses bagages dans le coffre et essaya de se mettre à l'aise. Durant le reste chemin jusqu'à la gare, elle ne se retenait pas de faire des commentaires désobligeant sur tout et n'importe quoi.
De son côté, la vieille essayait de retenir ses rires : l'entendre rouspéter la réconfortait, elle faisait des efforts pour s'adapter, malgré son mauvais caractère apparent.

A l'entrée de l'édifice, Fosie ne passa pas la grande porte mais resta sur les côtés et scruta l'horizon. Avec sa petite-fille cramponnée à son bras comme un machoupette, elle ne put compter que sur ses lunettes pour l'aider à chercher une pancarte.

- « Si on ne trouve pas cette fichue pancarte, on rentrera à la maison ? » demanda la cynique
- « Pourquoi, tu l'as vu ? »

Après un petit temps de réflexion, la brune lui indiqua la gauche. Mais la grise, plus maligne et la connaissait trop pour se laisser piéger, regarda dans la direction opposée. Sur la droite, il y avait un regroupement de jeunes accompagnés d'adultes qui attendaient en essayant de se faire discret.
Se rapprochant d'eux, la plus grande fut sûre de ce choix quand elle l'aperçut. Derrière deux hommes qui géraient la file des arrivants, trônait en haut d'un poteau une pancarte bleu royal aux contours dorés portant l'inscription « MHJ4 ».

MagiHigh Jour 4, le jour de rentrée pour les secondes.

Elles suivirent alors le mouvement et se placèrent au hasard dans l'une des files.

- « Personne suivante ! » cria une voix

Quand vint leur tour, elles se retrouvèrent devant un garçon de deux ou trois ans de plus que la bougonneuse. Brun au gilet jaune avec un haut vert et un jogging gris clair, il avait l'air fort sympathique.

- « Bonjour mesdames. Quel nom pour l'enregistrement ? »
- « Bonjour jeune homme. Jeoju s'il vous plaît. »
- « Alors, J ... Je ... oui ! Jeoju. Et en accompagnatrice ... Fosie Acacia ? »
- « C'est ça ! C'est nous. »
- « Vous avez vos pièces d'identité à me présenter ? »

Le garçon contrôla puis lut les informations liées au nom.

- « Alors ... Vous avez demandé une cabine isolée. Vous serez donc dans la voiture n°5, celle juste après le bar. Aurez-vous besoin d'aide pour vos bagages ? »
- « Pas le moins du monde. Je suis encore jeune et en pleine forme vous savez ? »
- « Ha ha, d'accord. Et le petit, pourquoi il fait une tête pareille ? Tu es fâché parce que tu ne retrouveras pas tes copains de l'année dernière ? » s'abaissa-t-il
- « De quoi je me mêle ... » pesta la "petite" avant que la grande ne lui cache la bouche avec un rire nerveux
- « Oui elle ... elle est stressée. Vous savez ce que c'est ... » essayait-elle de dissimuler même si les mots n'avaient pas atterrir dans l'oreille d'un sourd
- « Euh ouais ... Je vous invite à patienter sur les côtés avec les autres. Personne suivante ! »

Fosie se poussa et se mêla à la foule. Dans un petit coin isolé non loin du groupe, elle tapota la valise pour indiquer à sa petite-fille de s'asseoir dessus, avant de froncer des sourcils. Sans un mot, la plus jeune comprit directement de quoi il en retournait.

- « Désolée. Pour la méchante phrase. Mais ... il y a trop de monde ici. » grimaçait-elle en croisant les bras
- « Je sais ma petite pâquerette, mais les marguerites poussent toujours en groupe dans l'herbe. »
- « Mouais ... et les trains, c'est comme les marrons ? On les prend à l'extérieur de la gare maintenant ? »

Sur ce point, elle avait raison. Était-ce normal pour le petit groupe d'attendre dehors ? Pourquoi ne passaient-ils pas les portes de la gare pour se rendre au hall d'entrée ? Était-ce à cause des détecteurs de magie qui mettraient les jeunes en danger ?

- « Tu ne veux pas t'asseoir ? » tira sa petite-fille de sa profonde réflexion

Mais la grand-mère refusa. Elle se sentait parfaitement bien pour une femme de son âge. Des jambes d'asphalte, des fesses en béton et des bras d'acier ; que demander de plus ? Surtout que depuis sa hauteur, elle cherchait quelqu'un dans la foule ...

***

- « Mesdames et messieurs, nous allons y aller. Le train ne va pas tarder à arriver. » s'était imposé un homme châtain au pull vert et à la moustache bouclée « Merci de bien vouloir me suivre. Takagi, tu fermeras la marche. »

Tout le groupe se leva en un mouvement et obéit instinctivement au représentant de l'école.
Il se dirigea d'un pas assuré vers une direction qui contournait totalement la gare. Personne ne protesta mais tous étaient étonnés de cette décision. Ils passèrent un vieux grillage avant d'en faire de même avec une porte perdue au milieu de cartons. Remontant les escaliers, ils arrivèrent enfin dans l'une salle d'attente de la gare, ouverte sur les quais.
Traversant le hall, ils s'approchèrent des portes de service que présentait le dernier quai et ouvrirent la dernière. Ils descendirent les escaliers aux marches surprenamment larges dans un corridor arqué et lumineux, puis arrivèrent à une plate-forme. Dans le silence, des murs verticaux portant des lumières allongées se dévoilèrent. Seuls les petits lumignons incrustés au bord du quai semblaient émettre un petit bruit mécanique.

- « Pourquoi on est ici ? » demanda soudainement quelqu'un
- « Vous connaissez les Buzimski ? » répondit l'homme au pull vert
- « Bien sûr ! Qui ne connaît pas la seule famille ferroviaire qui a sût s'implanter dans tous les pays du continent Nord ? » critiqua une ado
- « Et bien nous allons emprunter leur train privé pour nous rendre à l'école. »
- « Quoi !? »

Comme s'il s'était chronométré, un train entra en gare à ce moment précis. Long d'environ 200 mètres, son toit blanc était aussi luisant que le bleu des wagons. En plus de ses lignes dorées, un énorme écusson ornait chaque voiture.

- « OH ! »
- « MON !! »
- « DIEU !!! »
- « Mesdames et messieurs, le train privé des Buzimski. » claironna le jeune brun qui accompagnait le représentant de l'école
- « HHHIII !!!!!!!!! »

Avec effervescence, s'ensuivit une avalanche de flash provenant de tout appareil pouvant prendre une photo.

- « Doucement ! Doucement ! Et n'oubliez pas la clause que vous avez accepté de signer si vous ne voulez pas avoir d'ennuis : pas de publication sur les réseaux sociaux ! »

C'était devenu un tel engouement qu'ils furent tous déçus en voyant un simple homme et une simple femme descendre du TGV. Même si l'un était blond et l'autre brune, ce n'étaient pas les Buzimski que montraient les médias.

Faisant preuve d'une certaine notoriété, les nouveaux adultes invitèrent les élèves et leurs accompagnateurs à monter dans le train.
Pendant que les autres continuaient à prendre des photos, Fosie chercha le cinquième wagon et constata avec joie qu'elles étaient les premières à monter dans celui-ci.

Avec un extérieur bleu royal, l'intérieur était d'une ambiance orange luxueuse et chaleureuse. Tapis orange relaxant au sol, lampadaires excentriques au plafond, Fosie n'en revenait pas. Mettre un tel moyen de transport au profil des élèves pour aller à l'école ... Elle avait l'impression de rêver.
Passant la deuxième porte automatisée, elle ouvrit la porte de la première cabine avec délicatesse et admira la suite. Deux bancs se faisaient face et encadraient une grande fenêtre d'où l'on voyait le quai adjacent ainsi que le reste de la rame. L'orange des banquettes était plus pâle que celui du sol, mais extrêmement doux au toucher. Les portes bagages au-dessus contenaient de magnifiques sculptures de bois et en dessous, des miroirs étaient apposés en largeur de façon à ce que l'on ne voit pas les cabines environnantes.

- « Effectivement, ils font les choses en grand ... » contempla la grand-mère

Elle n'hésita pas un instant à s'y poser, contrairement à sa petite-fille qui, restée debout, était encore sur ses gardes malgré son admiration pour la pièce.

- « Tu es sûre qu'on a le droit de s'asseoir ? »

C'était évident. Inscrire un enfant à cette école équivalait à payer des places pour prendre ce train. D'autant plus qu'il n'était à leur disposition que deux fois dans l'année, c'était donc une occasion à ne pas rater.

- « Mais, et si on stresse tellement que l'on transpire des fesses. Tu crois qu'il nous feront payer la tache ? »

Fosie n'en revenait pas. Où est-ce-qu'elle était allée chercher cette idée ? C'était cliché, mais elle réalisa rapidement que c'était de sa faute : dans tous les feuilletons qu'elles avaient visionné à la télévision, les plus riches étaient très prétentieux, si ce n'était pas sournois.
Mais les Buzimski n'étaient pas comme ça.

Pendant qu'elle essayait de démentir ces propos parfois non conventionnels, l'oreille de sa petite-fille capta soudainement une phrase du couloir.

- « Oh c'est pas vrai ! Qui a pris la première cabine ? On va devoir prendre la dernière qui est plus loin. Tous ces microbes ... J'espère qu'ils ont bien désinfecté le train comme je le leur avais demandé ! »

Cette voix ...
La plus jeune coupa court à la conversation et s'empressa d'ouvrir la porte sans lâcher la main bienveillante. Dans le couloir, il n'y avait personne. Seul un garçon aux cheveux verts montait à présent dans la voiture, par la fenêtre.

- « ... Salut mec ! » leva-t-il une main qui eut l'effet de le faire s'étaler au sol

Devant ce cirque pathétique, elle se contenta de soupirer et de lever les yeux au plafond.

- « Bouah ah ah ! C'est ce qui s'appelle se prendre un vent Marvin ! La prochaine fois, tu passeras par les escaliers comme tout le monde.» rigolait une voix féminine avant que la porte de la cabine ne se referme

Ce fut dans le silence qu'elle se retrouva à nouveau devant la banquette. Sans pouvoir en placer une, elle se retrouva brusquement assise dessus à cause de la main de sa partenaire qui l'avait tirée. Avec une mine renfrognère, elle regardait Fosie qui essayait de la mettre de bonne humeur, avant que le garçon de la fenêtre ne passe devant leur porte.

- « C'est quoi cette couleur ? C'est ce que les jeunes font maintenant ? » observait la plus âgée sans quitter ces cheveux qui sortaient de l'ordinaire
- « Tu n'as pas intérêt à t'y mettre. » devinait son interlocutrice qui la connaissait suffisamment pour savoir à quoi elle pensait « Cette couleur est affreuse. On dirait un marron mal tourné. » continuait-elle de ronchonner
- « C'est du vert kaki. »
- « ... Oui, c'est ce que je disais. En plus, ça te fera vieillir de 20 ans. Le gris te va mieux. »

Ce compliment eut l'effet d'animer la cabine autant que les autres qui l'entouraient.

Mais isolée du bruit grâce à la séparation, la brune regardait à nouveau la porte de la cabine en repensant à quelque chose. Le garçon de tout à l'heure ... l'avait appelé « mec » ?

***

- « Mesdames et messieurs, le train va partir dans quelques minutes. Prochain arrêt, la gare de Sonic à Chelou. » annonça une voix féminine dans le haut-parleur

Les passagers calmèrent leur ardeur et le train se mit en marche. Il quitta le tunnel dans un silence surprenant puis passa dans une voie moins éclairée. Au bout de quelques mètres, une autre annonce se fit :

- « Chers passagers, d'ici cinq minutes nous passerons dans un portail magique. Pas d'inquiétude à avoir, l'équipe scolaire et des autorités compétentes sont présentes pour s'assurer du bon déroulement de la procédure. Cependant, pour votre sécurité je vous recommanderais de ne pas ouvrir les fenêtres, ni de toucher ce qui apparaîtra dehors d'ici quelques minutes. Merci de votre coopération. »

Plus que de la suspicion, un mélange de panique, de stresse et d'agitationse propagea dans les wagons. Même si certains se demandaient à quoi allait ressembler ce spectacle, la plupart des passagers n'étaient tout simplement pas à l'aise avec cette solution.
La vieille également, mais elle tenait tout de même à voir ce qui allait se passer. Déjà près des fenêtres, elle se mit à écarter les rideaux.

- « Grand-mère ! Referme ces rideaux ! Sont-ils fous ?! Utiliser la magie ! Et puis quoi encore ! Pourquoi ... »
- « Comment veux-tu que l'on fasse autant de kilomètres en moins de 5h ? » la coupa-t-elle

C'est alors qu'elle comprit.

- « Tu ! Alors tu le savais ? Et tu ne m'as rien dit ?! »
- « Je dois avouer que oui. Quand Hilfe et Mr. Criss-Angel sont venus à la maison ils m'ont fait faire plusieurs petits tests pour nous assurer que l'on ait rien à craindre. Tu l'aurais su si tu étais descendu ... »

Hilfe et qui ?!
Ah oui. Elle se rappelait de deux représentants de l'école qui étaient venus chez eux à plusieurs reprises. Elle ne les avait jamais vu puisqu'elle se cachait à chaque fois dans l'une des chambres de l'étage, mais elle se rappelait que leurs voix étaient assez bienveillantes. Elle s'était même surprise à écouter des bouts de leurs conversations.

La petite laissa faire la grande, mais l'éloigna tout de même des fenêtres. Elle ne leur faisait pas totalement confiance, mais ce n'était pas comme si elle avait le choix.

Un décompte se fit entendre dans tout le train et pour les passagers qui avaient fermé les yeux de peur, ils furent surpris de ne pas entendre plus de bruit. En les rouvrant, ils virent quelque chose d'indescriptible. D'indescriptible, et de rose.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire kenzzy972 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0